(BFM Bourse) - Déstabilisé par la flambée encore plus forte que prévu de l'indice des prix à la consommation en janvier aux Etats-Unis, le marché parisien a perdu jusqu'à 1,1% en séance jeudi. Le CAC 40 a ensuite réussi à nettement limiter les pertes, clôturant en repli de seulement 0,4%.
Prudent en matinée dans l'attente de la publication, à 14h30 à Paris, de l'indice des prix à la consommation aux Etats-Unis du mois dernier, le marché parisien s'est affolé en prenant connaissance du chiffre calculé par le Bureau of Labor Statistics. Selon cet indice, l'inflation a encore accéléré en janvier à +7,5% sur un an, du jamais-vu depuis février 1982 (un mois qui marquait l'envolée au hit parade de "Chacun fait (c’qui lui plaît)", considéré comme le premier titre de rap français, mais aussi l'adoption des 39 heures et de la cinquième semaine de congés payés). Sur le coup, l'indice parisien (qui n'existait pas encore en 1982 pour sa part) a fléchi de 1,1%, mais a remonté la pente en voyant que le recul à Wall Street restait contenu. La séance s'est terminée à 7.101,55 points, en repli de 0,41% seulement après trois séance de baisse.
Au moment de la clôture européenne, les principaux indices américains affichaient une baisse comprise entre 0,4% pour le Dow et -0,8% pour le Nasdaq Composite, en passant par -0,65% pour le S&P 500.
Les tarifs pétroliers accéléraient à nouveau (+1,5% pour le baril de Brent à 92,93 dollars) au vu de nouveaux indices de la difficulté pour l'Opep+ à réellement ramener la production aux niveaux prévu, la progression le mois dernier n'ayant progressé que de 64.000 barils par jour en moyenne. En théorie, les membres du cartel élargi devraient pomper plus de 400.000 barils par jour supplémentaires, mais certains ont bien du mal à suivre (la production de l'Irak, deuxième plus gros producteur de l'Opep a même diminué en janvier, ainsi que celle du Venezuela et de la Libye).
La monnaie unique se raffermissait de façon inattendue (+0,52% à 1,1484 dollar) après la publication de l'inflation aux Etats-Unis, qui tend pourtant à accroître la probabilité d'un relèvement marqué des taux directeurs de la Fed.
Enfin (et surtout, pour les investisseurs férus d'analyse fondamentale) la séance à Paris a été marquée par une impressionnante salve de résultats, dont voici les principaux éléments à retenir.
TotalEnergies
Le géant pétrolier tricolore a profité de la flambée des tarifs pétroliers (et gaziers) pour dégager un bénéfice net part du groupe de 16 milliards de dollars (contre -7,2 milliards en 2020), au plus haut depuis 2008. Evoquant un quatrième trimestre 2021 "exceptionnel", "le plus fort de l'histoire de l'entreprise" avec un Ebitda ajusté de 14,3 milliards de dollars et un bénéfice ajusté de 6,4 milliards, TotalEnergies annonce une augmentation de 5% de ses acomptes sur dividendes pour 2022, ainsi que le lancement d'un programme de rachat d'actions à hauteur de 2 milliards de dollars au premier semestre, montant qui pourrait être encore supérieur au deuxième trimestre. Il a par ailleurs indiqué que ses investissements nets devraient s'établir à hauteur de 14 à 15 milliards de dollars en 2022, dont un quart (3,5 milliards) seront consacrés aux énergies renouvelables et à l'électricité. Après avoir récemment atteint un pic depuis octobre 2018, le titre a toutefois redonné 0,9%.
Legrand
Malgré des résultats financiers records et supérieurs aux attentes du marché, le titre Legrand cède de son côté 1% - après une ouverture en hausse. Le spécialiste mondial des infrastructures électriques et numériques du bâtiment a pourtant constaté une hausse de près de 15% de ses revenus en 2021 à plus de 6,6 milliards d'euros, à la faveur de nouveaux gains de parts de marché, du succès de ses initiatives de développement et de son "pricing power" - élément important en ces temps d'inflation galopante. En dépit de tensions sur les chaînes d'approvisionnement qui se sont traduites par une flambée du coût des matières premières et des composants (+11% sur l'année, +17% sur le seul 4e trimestre), Legrand est en effet parvenu à faire progresser sa marge opérationnelle à 20,5%, contre 19,0% en 2020. En nette progression en début de séance, le titre a toutefois été rattrapé par les prises de bénéfices, cédant 3%.
L'Oréal
Le marché a également fait la fine bouche devant la publication "historique" du n°1 mondial des cosmétiques, qui a fait part de ventes et de bénéfices records. Sur l'ensemble de l'année, L'Oréal a vu son chiffre d'affaires grimper de 15,3% par rapport à 2020 (+8% par rapport à son niveau pré-pandémie), à 32,28 milliards d'euros, au-dessus des consensus établis par Bloomberg (31,93 milliards) et Factset (32,04 milliards). Sur le seul 4e trimestre, les ventes -encore soutenues par la clientèle chinoise et américaine- ont atteint 9,09 milliards d'euros, quand le consensus misait sur 8,74 milliards. Le bénéfice net annuel part du groupe flirte ressort pour sa part à près de 4,6 milliards d'euros (+29% sur un an). Fort de ces résultats, L'Oréal proposera à ses actionnaires un dividende de 4,80 euros par action contre 4 euros en 2020. Le titre a pourtant perdu 2%.
Crédit Agricole
La deuxième banque tricolore derrière BNP Paribas a fièrement annoncé avoir dépassé, en 2021, son objectif de bénéfice net sous-jacent pour 2022 avec un an d'avance grâce à la baisse des coûts liés aux créances douteuses et à une hausse des revenus de tous ses secteurs d'activité. Celui-ci a ainsi atteint 5,4 milliards d'euros en 2021, bien supérieur à l'objectif de 5 milliards avancé pour 2022. "Il s'agit d'une "bonne publication" de résultats pour le quatrième trimestre, ont observé les analystes de Jefferies, soulignant que le résultat net trimestriel est ressorti supérieur de 17% au consensus, à 1,43 milliard d'euros. Crédit Agricole annonce par ailleurs qu'il distribuera 1,05 euro de dividende par action en 2021: 85 centimes en vertu de sa politique de distribution de 50% de son résultat net, et 20 centimes pour le dividende qui n'avait pas pu être versé en 2019. Après avoir repris plus de 150% depuis son krach de mars 2020, le titre avance de 1,4% supplémentaires à un nouveau plus haut depuis début 2018.
Société Générale
À l'instar de BNP Paribas et Crédit Agricole, Société Générale a à son tour dévoilé un bénéfice net record pour l'année 2021, à 5,6 milliards d'euros, à comparer à une perte de 258 millions en 2020, en raison de provisions liées à la pandémie de Covid-19. "L'ensemble des métiers contribuent à cette très belle performance et le groupe affiche par ailleurs en fin d'année un bilan très solide avec un portefeuille de crédits de très bonne qualité et des ratios de capital élevés", se félicite le directeur général du groupe Frédéric Oudéa. Le groupe a notamment quadruplé son bénéfice net au 4e trimestre 2021, à près 1,8 milliard d'euros, et se dit confiant pour 2022, indiquant que "sa rentabilité devrait continuer de s'améliorer". En Bourse, le titre qui a signé la meilleure performance du CAC en 2021 (+77%) a gagné 3,2%, remontant à un sommet depuis mai 2015.
Unibail-Rodamco-Westfield
Le géant des centres commerciaux, notamment propriétaire des Halles dans le centre de Paris ou du centre commercial Les Quatre Temps à la Défense, a publié jeudi un chiffre d'affaires 2021 encore en baisse de 3,7% à 1,72 milliard d'euros. Il a néanmoins enfin fourni des perspectives chiffrées pour 2022, et celles-ci sont optimistes alors que le groupe anticipe un retour progressif à la normale. URW dit en effet s'attendre cette année à un bénéfice par action ajusté (BPA) récurrent entre 8,20 et 8,40 euros en 2022, contre 6,91 euros en 2021 - un chiffre au-dessus des attentes du groupe qui tablait sur "au moins 6,75 euros" mais en-deçà de son niveau de 2020 (-5,2%). Le groupe a fait état d'une collecte des loyers à 88% sur l'ensemble de l'année, contre 80% en 2020, avec une très nette amélioration au second semestre (93%). Il a parallèlement annoncé un accord pour la cession d'une participation de 45% d'un centre commercial à Société Générale Assurances et BNP Paribas Cardif pour un prix implicite d’environ un milliard d’euros. Le titre a dominé le palmarès du CAC (+7,95%).
Atos
Nouvelle déconvenue pour les actionnaires d'Atos, qui annonce une dépréciation de près de 2 milliards d'euros sur ses comptes 2021 en raison de son recentrage stratégique opéré l'an dernier. Le spécialiste des services du numérique a par ailleurs annoncé qu'il n'atteindrait pas ses objectifs annuels déjà nettement revus à la baisse en janvier (et en juillet dernier). Le titre a replongé de 4,55%, proche de son creux de près de 10 ans atteint en janvier.
Pernod Ricard
Le titre du géant des spiritueux a peu varié (-0,7%) en dépit du relèvement de perspectives annoncé, le groupe tablant désormais sur une "très bonne" croissance de ses ventes pour l'ensemble de son exercice qui sera clos fin juin, quand il avait auparavant dit s'attendre à une croissance "dynamique". Pernod Ricard a fait part d'une croissance organique de ses revenus de 17% à 5,95 milliards d'euros au premier semestre, avec une nouvelle hausse de 9% aux Etats-Unis (son premier marché), pour un résultat opérationnel courant qui flirte avec les 2 milliards d'euros (+22% en organique), un record.
Dassault Aviation
Pas de résultats annuels mais l'annonce d'une vente portant sur 42 Rafale de dernière génération à l'Indonésie pour Dassault Aviation ce jeudi. Contrat qui "marque le début d'un partenariat de long terme qui se concrétisera par la montée en puissance rapide et concrète de la présence de Dassault Aviation dans le pays" selon le PDG du groupe Eric Trappier, et qui a permis au titre de s'adjuger 5,1%.
Les autres valeurs
Parmi les plus petites valeurs, Claranova a lâché 6% après avoir achevé le premier semestre (juillet-décembre 2021) de son exercice décalé avec des revenus stables par rapport à 2020, malgré "un retour progressif à la croissance" constatée au 2e trimestre (+3% à changes constants).
Le spécialiste de l'ingénierie nucléaire Assystem a pour sa part dévoilé un chiffre d'affaires consolidé de 483,1 millions d'euros en 2021 (+7,8% en organique) et son titre a gagné 2,45%.
Lectra, spécialisé dans les logiciels, équipements de découpe, services et données destinés aux entreprises de mode, a de son côté bondi de 11,6% en réaction à l'annonce d'une vive progression de son activité et de ses résultats en 2021, notamment grâce à l'intégration de Gerber Technology. Le cours a accéléré de 11,6%, tout proche du pic historique touché début janvier.
Le groupe de conseil et de services numériques Neurones publie une croissance organique à deux chiffres de ses revenus en 2021 (+10,1% à 580 millions d'euros), mais lâché 0,6% en clôture au terme d'une séance passée dans le vert.
Enfin, le spécialiste stéphanois de la logistique à l’intérieur des entrepôts BOA Concept, récemment introduit en Bourse, a annoncé avoir largement dépassé les objectifs qu'il s'était fixés sur l'année écoulée, grâce notamment à la forte demande des acteurs du e-commerce. Le titre a vivement grimpé en séance, mais fini proche de l'équilibre.
Également à souligner, le rebond de près de 8% d'Orpea après que le nouveau PDG du groupe dans la tourmente a déclaré qu'il soumettra au conseil d'administration les propositions énoncées par son actionnaire Mirova dans une lettre ouverte publiée lundi.