(BFM Bourse) - De nombreux groupes, y compris sur le CAC 40, ont subi des corrections violentes sur la première partie de cette saison des résultats, notamment dans l'automobile et la consommation.
Le marché a la main lourde en cette saison des résultats semestriels en Europe. Les corrections et punitions se sont multipliées ces derniers jours.
Le CAC 40 n'y échappe pas. La saison n'est pas terminée, une douzaine de sociétés de l'indice devant encore publier leurs comptes. Mais sur les 26 sociétés qui ont déjà livré leurs copies, 11 ont enregistré une hausse dans la séance suivant leurs publications, et 15 une baisse, selon un décompte effectué par BFM Bourse. On serait même tenté d'ajouter la chute de 9,4% d'Airbus (qui publie ses résultats ce mardi soir) à la suite de son avertissement sur résultats, en juin. Et sur les 15 baisses enregistrées, 10 ont été supérieures à 3%, 7 à plus de 5%.
"On a vu une réaction asymétrique des marchés, surtout ces derniers jours, avec finalement des sociétés qui publiaient de bons résultats et qui ont connu des hausses de temps en temps modérées alors que les gadins se sont payés très cher", a déclaré vendredi dans BFM Bourse Matthias Desmarais, responsable de la recherche chez Oddo BHF.
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Le luxe dans le dur
A bien y regarder, les résultats ne sont pas forcément si mauvais dans l'absolu. Dans une note publiée lundi, Bank of America remarque que sur les 40% de sociétés du Stoxx Europe 600 qui ont déjà livré leurs comptes, la hausse du bénéfice par action s'inscrit en moyenne autour de 4%. "Si cela se maintient, ce serait le premier taux de croissance positif depuis le quatrième trimestre 2022", remarque la banque américaine.
"Si les résultats du deuxième trimestre ont été globalement corrects, la saison a néanmoins effrayé le marché en raison des signes de tension chez les consommateurs", ajoute toutefois l'établissement.
"La faiblesse persistante de la demande en Chine a été rejointe par une faiblesse surprenante aux États-Unis, les deux régions étant particulièrement problématiques pour les produits de luxe, les biens de consommation de base et les automobiles au deuxième trimestre, tandis que la détérioration des tendances en matière de publicité et de transport aux États-Unis a également pesé sur les pairs européens", développe Bank of America.
Le luxe a, effectivement, été à la peine sur l'ensemble de la saison. Que ce soit Burberry, Swatch, Kering ou dans une moindre mesure LVMH, leurs titres ont souffert après des publications globalement décevantes, le coup de frein sur la demande de produits de luxe étant palpables, notamment en Chine. Moncler s'en est toutefois un peu mieux tiré, progressant de 1,9% dans la foulée de la publication de ses résultats. Hermès (+3,4%) a, lui, confirmé son statut de meilleur élève du luxe, avec une croissance en données comparables qui a atomisé la concurrence au deuxième trimestre (+13,3%). Sa direction a évoqué un "flight to quality", qui pour simplifier, pousse les consommateurs de produits de luxe a privilégier les marques les plus qualitatives (donc Hermès) lorsque le contexte macroéconomique devient plus incertain.
Au-delà du luxe, plusieurs sociétés ont été contraintes d'abaisser leurs perspectives, comme STMicroelectronics, Capgemini ou encore Nestlé.
Or, au cours de cette saison, mieux vaut ne pas décevoir le marché. Bank of America souligne que les sociétés européennes qui ont déjà publié et livré un bénéfice par action sous les attentes ont enregistré une sous-performance médiane par rapport à leur indice de référence de 2,4 point de pourcentage sur une séance. Selon la banque, il s'agit de la sous-performance la plus prononcée depuis au moins douze années. A contrario la surperformance médiane pour les entreprises qui battent les attentes ne se situent qu'à 0,8 point de pourcentage.
Surtout le marché s'est montré extrêmement sévère avec la moindre anicroche. Renault en a clairement fait les frais.
Des punitions difficilement compréhensibles
Le groupe au losange a perdu 7,5% dans la foulée de sa publication, jeudi dernier, soit presqu'autant que Stellantis (8,7%), le même jour. Si le constructeur automobile issu de la fusion entre Fiat Chrysler et PSA avait publié des résultats totalement sous les attentes et en chute libre, Renault avait rendu une copie jugée satisfaisante par les analystes.
"Renault n’a pas déçu avec une marge opérationnelle record tirée par un petit dépassement de sa marge automobile. Le 25 juillet, la réunion d’analystes/investisseurs ayant été posée et positive, comment expliquer le repli de 8% du titre depuis sa publication du premier semestre 2024? L’effet de contagion semble être la meilleure explication, après une publication par Stellantis, le 25 juillet, de résultats du premier semestre 2024 nettement inférieurs aux anticipations du consensus", a tenté d'expliquer lundi Bernstein.
Renault ne constitue qu'un exemple. Thales a aussi souffert (-6,7% lors de la séance suivant ses résultats) alors que ses résultats ont coché la plupart des bonnes cases. Le raté sur la génération de trésorerie et surtout le resserrement vers le bas de sa cible de marge, dus aux difficultés de ses activités spatiales, ont lourdement pesé dans la balance. Jefferies évoque une réaction "punitive" alors que les résultats étaient "largement en ligne avec les attentes".
Et que dire d'Edenred qui a plongé de 13,5% dans la foulée de sa publication alors que tous ses principaux indicateurs ont dépassé les attentes, Deutsche Bank évoquant des résultats "très solides"? " Rien dans la publication ne justifie une telle sanction, le groupe croît rapidement, à une vitesse que même un groupe de luxe n'est pas en mesure d'afficher", confiait la semaine dernière un analyste. Certains bureaux d'études, comme Alphavalue, ont évoqué le ralentissement de la croissance au deuxième trimestre (qui est quand même restée à 16,3% en données comparables après 20,5% au premier trimestre) pour tenter d'expliquer cette sanction.
Même la baisse de 4,8% de Carrefour peut paraître un peu rude, dans la mesure où les résultats s'étaient avérés en ligne avec le consensus. Mais la région Europe hors France avait très largement manqué les attentes en termes de rentabilité.