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CAC 40

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Cac 40 : Pourquoi le CAC 40 est autant à la traîne des autres grands indices européens cette année

samedi 12 juillet 2025 à 07h00
Le CAC est dans le dur

(BFM Bourse) - L'indice parisien s'adjuge 6% depuis le début de 2025 quand ses homologues européens connaissent des bonds à deux chiffres. Même Wall Street, à la peine depuis avril, a dépassé le marché parisien. Les difficultés de plusieurs poids lourds, dont le luxe, de même que les incertitudes budgétaires et politiques plombent la Bourse tricolore.

"Make Europe great again" ("Mega") ou "rendre sa superbe à l'Europe". Ce slogan, miroir du "Make America great again" ("Maga") de Donald Trump, a inspiré un entrepreneur français qui a créé une casquette brandissant cette injonction. La coiffe a d'ailleurs été fièrement portée par le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, lors des Rencontres économiques d'Aix-en-Provence, la semaine dernière.

Sur les marchés financiers, ce slogan est utilisé par les analystes et les stratégistes depuis plusieurs mois. Deutsche Bank avait par exemple mentionné le terme "Mega" pour l'opposer au "Maga" américain en mars dernier. Une façon pour la banque allemande de souligner la surperformance des actions européennes face aux actions américaines.

Comme nous l'avons écrit à plusieurs reprises, le Vieux continent a bénéficié d'un important regain d'attrait des investisseurs depuis le début de l'année, grâce, par exemple, à la volonté de l'Allemagne de relancer sa croissance en investissant dans la défense et les infrastructures.

Surtout, l'administration Trump a grippé les investisseurs avec ses atermoiements sur les droits de douane ou les menaces du président américain sur l'indépendance de la Réserve fédérale américaine (Fed).

Les opérateurs de marché ont ainsi réalloué leurs portefeuilles, en réduisant leur exposition aux marchés américains pour réinvestir dans d'autres zone géographiques, l'Europe en tête.

En conséquence, les Bourses européennes ont le vent en poupe depuis le début de l'année. Le DAX 40 de Francfort prend 22%, l'IBEX 35 de Madrid avance de 20,8%, le FTSE Mib de Milan gagne 17,2%. Le FTSE 100 de Londres prend un peu moins (+9,4%) mais a signé un nouveau record cette semaine.

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Le CAC 40, le vilain petit canard de la Bourse en Europe

Le CAC 40, lui, est totalement distancé. Le grand baromètre de la Bourse de Paris s'adjuge à peine 6% sur l'ensemble de 2025.

Comble de l'ironie, Wall Street, qui a souffert en avril après l'annonce des droits de douane réciproques de Donald Trump, est repassée devant la Bourse de Paris. Le S&P 500 prend 6,4% (*) depuis le début de l'année, le Nasdaq Composite avance de 6,8%.

Comment expliquer une telle sous-performance du CAC 40? Comme pour l'année dernière, durant laquelle l'indice parisien avait également vu sa performance être plombée par la dissolution de l'Assemblée nationale, en juin 2024, et par l'instabilité qui a suivi, la réponse provient en partie de la situation politique.

Dans une note publiée fin juin, la banque Barclays soulignait que "les investisseurs (étaient) de nouveau plus nerveux à l'égard de la France".

L'établissement britannique estime que l'échec des négociations entre les partenaires sociaux sur les contours de la réforme des retraites, avec à la clef une motion de censure qui n'a pas abouti, a remis en évidence la fragilité du gouvernement français.

L'incertitude politique pèse encore

"Bien que nous ne nous attendions pas à une répétition du stress de l'été dernier, car il est peu probable que le président Macron convoque de nouvelles élections anticipées même si le gouvernement s'effondre (il peut simplement nommer un nouveau Premier ministre), nous pensons que la faiblesse de la macroéconomie, comme en témoignent les mauvais indices PMI (des indicateurs d'activité du secteur privé, NDLR) de juin, et les négociations budgétaires potentiellement délicates, peuvent justifier une prime de risque plus élevée sur les marchés français", développait Barclays.

"Même si on s'est habitué à cet aspect politique, l'incertitude n'a pas disparu pour autant", souligne, de son côté, Alexandre Baradez, chef de l'analyse de marché pour IG France. Le spécialiste pointe le fameux "spread" (l'écart) entre le taux d'emprunt sur le titre de dette à 10 ans de l'État français et celui de même maturité de l'Allemagne, thermomètre habituel du stress de marché sur les finances publiques tricolores.

"Ce spread avait dépassé les 90 points de base (0,9 point de pourcentage, NDLR) lors de l'été 2024. Il est retombé autour de 70 points de base mais reste inférieur aux 50 points de base qui s'observaient avant la dissolution. Cela veut dire que le marché n'est pas totalement rassuré", explique Alexandre Baradez.

La trajectoire des finances publiques françaises reste scrutée par les investisseurs. Après un déficit public représentant 5,8% du produit intérieur brut (PIB) en 2024, la Commission européenne table sur un taux pour la France de 5,6% pour 2025 et de 5,7% en 2026. L'Espagne elle passerait, selon les projections de Bruxelles sous les 3% cette année (2,8%), l'Italie arriverait à 3,3%, le Portugal serait proche de l'équilibre (0,1%) tandis que la Grèce s'en rapprocherait (0,7%).

"La sous-performance de la France sur les marchés peut venir en partie de cela. Un investisseur étranger va se dire que, en comparaison, l'Allemagne lance un boost budgétaire, est peu endettée et a un chancelier plus actif (Frierich Merz, NDLR) que par le passé, que l'Espagne bénéficie d'une forte croissance et qu'en Italie il y a une certaine stabilité avec la politique de Giorgia Meloni qui fait attention à la trajectoire budgétaire", développe Alexandre Baradez.

Le luxe dans le dur

Au-delà de ces aspects politico-macroéconomiques, la composition du CAC 40 joue aussi. Alexandre Baradez note que le secteur financier (banques, assurances) a un poids relativement plus important sur les bourses de Milan et Madrid.

Trois banques et assureurs font partie des cinq plus importantes capitalisations boursières de la Bourse de Milan, et le chiffre est le même à Madrid. Aucun ne figure dans le "top 5" à Paris. Or les banques représentent l'un des secteurs (avec la défense) qui cartonnent en Europe depuis le début de l'année. L'Eurostoxx Banks, un indice sectoriel paneuropéen, prend 40% en 2025 tandis que le Stoxx Europe 600 Insurance s'adjuge 16,6%.

Par ailleurs, le luxe, le compartiment phare de la Bourse de Paris et qui représente environ 30% de la capitalisation boursière totale du CAC 40 (en intégrant L'Oréal) est à la peine.

LVMH chute de 23,2% sur l'ensemble de 2025, Kering de 17%. Hermès, grâce à son modèle ultra-résilient et son positionnement très haut de gamme, évolue dans le vert (+5,3%) mais sous-performe le CAC 40.

Ce secteur est frappé de plein fouet par une demande en berne pour les produits de luxe mais aussi par des incertitudes provoquées par la politique économique américaine.

LVMH, qui constitue un bon baromètre du compartiment au vu de ses différentes activités, a vu ses revenus reculer de 3% en données comparables sur les trois premiers mois de 2025. UBS et Bank of America anticipent une baisse de 4% pour le deuxième trimestre.

"Jusqu'à fin février tout se passait très bien et puis on est arrivé en face d'une situation géopolitique et économique mondiale qui a été bouleversée par les droits de douane potentiels, par l'aggravation des crises internationales, ce qui a perturbé un peu le mois de mars", avait expliqué en avril Bernard Arnault, son PDG.

"Le constat pour le luxe ressemble un peu à celui que l'on peut faire sur Apple (qui perd 16% depuis le début de l'année, NDLR) sur le S&P 500. La croissance s'est atténuée, les risques commerciaux sont apparus et ces titres peuvent pâtir de la hausse de l'euro. Mais il y a surtout la question de l'Asie et de la Chine où la croissance du luxe est à l'arrêt. Apple a le même problème avec les ventes d'iPhone. D'un moteur, le luxe est devenu un poids depuis quelques trimestres", développe Alexandre Baradez.

Schneider Electric et Totalenergies à la peine

Les autres poids lourds du CAC 40 ne sont pas en grande forme non plus. Schneider Electric, qui a la plus forte pondération dans le calcul de l'indice, c'est-à-dire que ses variations sont celles qui ont le plus d'influence sur le CAC 40, perd 6,5% sur 2025.

Le spécialiste des équipements électriques et des technologies d'efficacité énergétique est désormais très exposé à la thématique de l'intelligence artificielle (IA). Pour assurer leur développement dans l'IA, les grands groupes techs ont besoin de capacités de data centers, des structures très énergivores. Ce qui porte la demande pour les produits du groupe français, au point que les data centers constituent le grand vecteur de croissance de la société.

Schneider Electric a d'abord été plombé par l'essor de la start-up chinoise Deepseek, dont les prouesses à moindre coût avaient jeté le doute sur les énormes dépenses de dizaines voire de centaines de milliards de dollars prévues par les "big tech" américaines dans l'IA.

Des informations de presse rapportant que Microsoft puis qu'Amazon envisageaient de lever un peu le pied sur les data centers ont également plombé l'action. La croissance du premier trimestre du groupe a par ailleurs déçu le marché.

Totalenergies, la deuxième plus forte pondération du CAC 40, a pour sa part pâti de la baisse des cours du pétrole. Au premier trimestre 2025, son bénéfice net avait reculé de 33%, pénalisé par une baisse moyenne du baril de Brent d'environ 9%. Le deuxième trimestre risque de s'avérer du même acabit. Les cours du Brent se sont échelonnés entre 58,4 dollars et 79,4 dollars le baril sur la période, selon les données d'investing.com. Or, au deuxième trimestre 2024, le prix moyen du Brent retenu par la société s'était élevé à 85 dollars.

Par ailleurs, les comptes du premier trimestre avaient été assez mal accueillis par le marché, le titre reculant alors de plus de 2%. La hausse de la dette nette avait fait sourciller les investisseurs. L'action prend à peine 1% en 2025

Vers un second semestre meilleur?

Faut-il s'attendre à ce que la sous-performance du CAC 40 se poursuive sur la seconde partie de 2025? Alexandre Baradez se veut optimiste.

Le spécialiste de marché a le sentiment que la dynamique de la Chine "va s'améliorer" et porter ainsi le luxe, alors que le Premier ministre, Li Qiang a estimé que la demande intérieure avait besoin d'être davantage soutenue et que "les indicateurs économiques se stabilisent".

Par ailleurs, "pour les groupes industriels du CAC 40, la hausse de l'euro face au dollar n'est pas forcément une mauvaise chose car elle peut réduire le coût de certaines matières premières", fait-il valoir.

Alexandre Baradez exprime toutefois une inquiétude, redoutant qu'une baisse des marchés américains cet été ait des effets collatéraux négatifs sur le CAC 40.

"Les actions américaines sont chères, alors que la Fed n'a pas encore baissé ses taux et que les effets des mesures commerciales ne se font pas encore pleinement sentir. Les périodes estivales sont souvent calmes mais on a vu des phases de stress, par exemple en 2015 avec les marchés chinois, et je trouve que le calendrier s'y prête cette année", développe-t-il.

"Si le S&P 500 venait à lâcher 10% au cours de l'été après la période des résultats, je pense que le CAC 40 y serait sensible", conclut-il.

(*) Les variations ont été arrêtées après la clôture européenne, vendredi soir.

Julien Marion - ©2025 BFM Bourse
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