(BFM Bourse) - Soutenu par les robustes publications annuelles de plusieurs de ses poids lourds (Kering mais aussi Schneider Electric ou Carrefour), le marché parisien a limité son repli ce jeudi (-0,26%) en dépit des déclarations inquiétantes de Joe Biden concernant une possible attaque russe contre l'Ukraine.
Les regards braqués vers la frontière entre l'Ukraine et la Russie, les investisseurs tentent de jauger la probabilité que l'escalade verbale des dernières semaines se transforme en véritable conflit armé. À cet égard, les sorties du jour, de Joe Biden ou de son secrétaire d'Etat Anthony Blinken, sont tout sauf rassurantes. Tout en affirmant qu'une solution diplomatique reste possible, le président des Etats-Unis juge en effet désormais "très élevée" la menace d'une invasion russe en Ukraine. Devant le Conseil de sécurité de l'ONU, le second a affirmé cet après-midi que les forces russes se préparent à lancer une offensive "dans les jours à venir", ajoutant que Moscou cherche un prétexte pour déclencher les hostilités. "Je suis ici aujourd'hui non pas pour commencer une guerre, mais pour en prévenir une", a-t-il également lancé.
Ces déclarations ont ajouté à la nervosité ambiante sur les marchés et brièvement provoqué une chute de plus de 0,8% pour le CAC, qui avait ouvert en hausse de près de 0,7%. L'indice vedette de la cote tricolore limite néanmoins son recul en clôture à -0,26% à 6.946,82 points, dans un volume d'affaires de 4,1 milliards d'euros.
Au même moment à Wall Street, les principaux indices lâchent entre 1,2% (DJIA et S&P) et 1,5% (Nasdaq) en raison de l'amplification des tensions géopolitiques. Des tirs d'artillerie ont été observés par Reuters dans le Donbass, province séparatiste à l'est de l'Ukraine, où les infractions au cessez-le-feu sont fréquentes depuis 2015 mais prennent plus d'ampleur dans le contexte actuel. À cela s'ajoutent l'expulsion, par la Russie, de l'ambassadeur adjoint des Etats-Unis à Moscou, décision contre laquelle Washington a promis des représailles. L'ensemble forme un tout assez anxiogène, qui propulse "l'indice de la peur" à plus de 26 points (+8% par rapport à la veille), engendrant un surcroît de volatilité.
Sur le marché parisien, le CAC est parvenu à contenir sa chute grâce à une nouvelle salve globalement très probante de résultats annuels.
Kering affiche des bénéfices records
La livraison du jour donne de fait aux investisseurs des raisons de se placer à l'achat, en particulier sur Kering (+5%) qui bondit en tête de l'indice phare. Il faut dire que les ventes de sa marque phare Gucci ont nettement ré-accéléré entre octobre et décembre, surpassant largement les attentes des analystes. Les ventes et les bénéfices du groupe atteignent des records, tandis que sa marge opérationnelle revient proche de son pic de 2019.
Les comptes de Carrefour (+4,8%) sont presque aussi chaleureusement accueillis, le groupe ayant réussi à améliorer de 7,7% (à changes constants) son résultat opérationnel courant en 2021, grâce notamment à un bond spectaculaire de 20% du ROC de la France (alors que la croissance du chiffre d'affaires n'y a été que de +1,8%), ce qui illustre le travail de fond accompli sous la direction d'Alexandre Bompard. Celui qui a repris les rênes du distributeur en 2017 annonce par ailleurs qu'un "ambitieux" nouveau plan stratégique sera présenté à l'automne prochain.
De la publication des annuels de Schneider Electric le marché retient notamment une génération de cash-flow opérationnel record de 4,5 milliards d'euros (free cash-flow à 2,8 milliards). L'action prend 2,1%.Orange a fait un peu mieux qu'attendu et confirmé ses objectifs d'ici à 2023, mais se contente de grappiller 0,4%.
Hors de l'indice phare, Klépierre s'adjuge 5,7% après une amélioration supérieure aux objectifs de son cash-flow l'an dernier, et alors que le groupe signale que le chiffre d'affaires de ses locataires revient en ce début d'année 2022 quasiment à son niveau d'avant la pandémie.
Toutes les publications ne sont pas aussi bien accueillies, Airbus reculant pour sa part de 1,3% malgré des comptes annuels robustes et le retour du dividende. Verallia perd 2,8%, en dépit de réalisations plutôt supérieures au consensus des prévisions, tandis que le fabricant de contenants en verre pense améliorer son Ebitda cette année malgré l'inflation des coûts. Sodexo a également été malmené (-6%) alors que la direction générale a finalement été confiée à la présidente Sophie Bellon, quand un candidat extérieur était pressenti pour ce rôle.
Eutelsat en panne de croissance
La baisse atteint 6,5% sur Eutelsat, l'opérateur satellitaire avertissant que le chiffre d'affaires pour l'exercice en cours se situerait dans la partie basse des attentes initiales, tandis que les retards de mise en service de certains satellites réduirait le chiffre d'affaires des prochaines années. Le retour à une croissance des revenus n'est désormais pas attendu avant 2023-2024.
La correction la plus spectaculaire (7,6%) touche Air France-KLM, bien que le groupe a réussi à fortement réduire ses pertes par rapport à 2020, avec même un retour de l'Ebitda largement en territoire positif à 745 millions d'euros, grâce à un très bon quatrième trimestre. Néanmoins, l'horizon n'est toujours pas dégagé pour le transporteur face à la situation sanitaire en Asie notamment, et la question du refinancement demeure en suspens.
Parmi les plus petites valeurs, Nacon s'adjuge 2,5% à l'annonce du rachat de l'éditeur allemand Daedalic Entertainment pour 53 millions d'euros, la plus grosse opération de croissance externe de son histoire. Graines Voltz au contraire perd 12,5% après une augmentation de capital réservée, excluant les actionnaires actuels.
Du côté des autres actifs, les cours pétroliers rebroussent chemin (-1,9% à 93 dollars pour le baril Brent) malgré les tensions très fortes autour de l'Ukraine, intuitivement porteuses pour les tarifs de l'or noir compte tenu des perturbations de l'offre qu'un tel conflit peut engendrer. L'euro varie peu à 1,1364 dollar (-0,09%) vers 17h55.