(BFM Bourse) - L'agitation qui règne sur les places boursières mondiales en ce début d'automne semble donner du crédit à la mauvaise réputation du mois d'octobre, due notamment aux krachs de 1929 et 1987. Mais "l'october effect", comme on l'appelle en anglais, relève plus d'un biais cognitif des investisseurs qui surestiment la possibilité d'une chute des actions durant ce mois que d'une réalité statistique.
Minés par un ensemble de craintes mêlant ralentissement économique, inflation galopante, des prix de l'énergie qui explosent et les hausses de taux par les banques centrales, les investisseurs doutent, et les indices sont à la peine. D'autant qu'à la morosité ambiante peut potentiellement venir s'ajouter un effet calendaire en raison de la réputation sulfureuse du dixième mois de l'année civile.
"Au niveau technique l’entame du mois d’octobre fait de plus en plus trembler les investisseurs" observe le directeur des investissements de Mirabaud John Plassard, qui évoque "The October effect", une anomalie, du moins telle que certains acteurs du marché la perçoivent, qui voudrait que les actions ont tendance à baisser pendant le mois d'octobre.
Un biais cognitif plus qu'un phénomène tangible
Cet effet est cependant considéré comme un biais cognitif et non comme un phénomène vérifiable, la plupart des statistiques allant à l'encontre de cette théorie (le mois de septembre compte par exemple plus de mois baissiers depuis près de 100 ans que le mois d'octobre), cet "effet octobre" renvoie surtout au fait que certains des grands krachs de la période moderne ont effectivement eu lieu pendant ce mois.
Parmi les évènements qui ont forgé la mauvaise réputation d'octobre, John Plassard cite notamment la panique bancaire américaine de 1907, les mardi, jeudi puis lundi noirs de la crise de 1929 puis le "lundi noir" du krach de 1987, au cours duquel le Dow a connu sa plus forte chute journalière, abandonnant 22,6%. Des évènements extrêmes, auxquels on peut ajouter la crise économique et financière de l'automne 2008, le gros de la chute des marchés ayant eu lieu lors de la première semaine d'octobre (-18% pour le Dow lors de la semaine bouclée le 6 octobre).
Mais force est de constater qu'en dépit de la survenue des ces krachs, le rendement du S&P 500 en octobre reste meilleur que celui des mois de février, mai ou septembre en moyenne depuis 1928.
Le mois le plus volatil pour les actions
Ce qui est vrai en revanche, "c'est qu'octobre est traditionnellement le mois le plus volatil pour les actions" relève John Plassard, qui pointe une étude étude de LPL Financial selon laquelle il y a davantage de variations supérieures 1% pour le S&P 500 en octobre que lors de n'importe quel autre mois de l'année depuis 1950. "Cela peut être attribué en partie au fait que le mois d'octobre précède les élections de début novembre (mi-mandat et présidentielle) aux États-Unis une année sur deux.
Parmi les effets calendaires les plus populaires de Wall Street, avec le rallye de Noël et le "Sell in May & go away" (ou son corollaire, l'effet Halloween), l'effet octobre est également appelé "l'effet Mark Twain", en référence à une célèbre phrase de l'écrivain dans son roman La Tragédie de Pudd’nhead Wilson et la comédie des deux jumeaux extraordinaires: "Octobre est l'un des mois particulièrement dangereux pour spéculer sur les actions. Les autres sont juillet, janvier, septembre, avril, novembre, mai, mars, juin, décembre, août et février".
Si cette affirmation est clairement ironique et sous-entend que la spéculation est toujours dangereuse, le fait que Mark Twain commence par le mois d'octobre peut être considéré comme une étrange coïncidence puisque le roman en question date de 1894 - et précède donc tous les krachs boursiers mentionnés.
Il est encore trop tôt pour évaluer un quelconque "effet octobre" sur les marchés en 2022. La Bourse de Paris clôture la première semaine d'octobre sur un gain de 1,8%. Les autres marchés européens ont également terminé cette semaine dans le vert après un mois de septembre calamiteux. A Wall Street, le Dow Jones, le S&P 500 tout comme le Nasdaq sont également parvenus à rester en territoire positif en rythme hebdomadaire malgré une clôture nettement baissière vendredi soir.
Le rebond des indices en début de semaine a ainsi permis de limiter la casse, les investisseurs misaient alors sur un adoucissement du ton de la Réserve fédérale américaine sur ses taux. Des espoirs qui ont été par la suite douchés par un rapport sur l'emploi meilleur que prévu ce vendredi...