(BFM Bourse) - Le marché parisien a signé jeudi une nouvelle séance de progression, le relatif durcissement du discours de la Réserve fédérale étant finalement aisément digéré.
Au lendemain d'une progression de 0,2%, dans une volume de 3,2 milliards d'euros, le CAC 40 a progressé jeudi de... 0,2% (dans un volume de 3,2 milliards d'euros), clôturant à 6.666,26 points. Si la séance n'a donc pas brillé par son originalité, cette nouvelle performance -au passage, la 9e hausse en 10 journées de Bourse- témoigne de la vigueur, pour certains observateurs étonnante, de la tendance qui anime le marché parisien, en rien désarçonné par le relatif durcissement du discours de la Fed.
Jeudi, la banque centrale des États-Unis a en essence reconnu que le sujet de la réduction du soutien monétaire arriverait bientôt sur la table, mais que le moment d'en fixer le calendrier et montant n'est pas tout à fait arrivé - la réunion de septembre pourrait en être le lieu.
Satisfaits d'avoir été prévenus avec suffisamment de ménagement, les investisseurs ont donc pris acte sans s'alarmer outre-mesure. C'était grosso modo le cas également outre-Atlantique, où le S&P 500 s'affichait en légère hausse et où le Nasdaq gagnait plus de 1% au moment de la clôture européenne (le Dow restait un peu en arrière, pénalisé par son secteur financier et industriel).
"Jay" Powell cherche visiblement à éviter un remake du "taper tantrum", cet accès de volatilité sur les taux d'intérêt survenu en 2013 (le marché d'action n'avait guère bronché, lui, le S&P 500 bouclant l'année avec près de 30% de gains...) lorsque Ben Bernanke avait annoncé, apparemment un peu trop brusquement, que le soutien inédit mis en place face à la crise financière allait progressivement s'atténuer. L'actuel patron de la Fed a décidé de prendre un chemin opposé, mais "pas sans risque", estime Ronan Blanc, gérant obligataire à la Financière Arbevel.
Si le montant des achats d'actifs est maintenu à 120 milliards de dollars par mois pour l'instant, les projections des taux de la Fed laissent désormais entrevoir deux tours de vis monétaire en 2023, contre aucun auparavant (certains membres visant même 2022). L’institution en a profité pour revoir en hausse ses perspectives de croissance (7% contre 6,5%) mais surtout d’inflation (3,4% contre 2,4%) pour cette année. La Fed continue d’estimer que la hausse de celle-ci est transitoire (liée à l'effet réouverture de l’économie) les prévisions pour 2022 et 2023 n’ont donc été que modestement revues. "Pour autant on sent un Jerome Powell moins catégorique", souligne Ronan Blanc. "Si le scénario central reste celui d’une hausse transitoire des prix, il reconnait la difficulté qu’à l’institution à bien appréhender le contexte de reprise. Il se dit satisfait du niveau atteint par les anticipations d’inflation, mais s’attend à une dynamique forte de l’emploi cet été. Une telle perspective ouvrirait la voie à des annonces sur un calendrier précis de ralentissement des achats d’actifs dès la rentrée de septembre".
"La Fed ne pouvait que reconnaitre la poussée d’inflation que traversent actuellement les États-Unis. Les pénuries qui touchent de plus en plus de secteurs sont un phénomène global et pas seulement américain. Mais elles arrivent à un moment où la relance fiscale est forte et la politique sociale une priorité. La question centrale est donc de savoir dans quelle mesure les agents économiques vont ajuster leur comportement à ce nouveau contexte de prix. Si une partie de cette hausse est transitoire, le risque que les pressions sous-jacentes s'accentuent augmente (fameux effets de second tour). Il va donc falloir qu’elle continue d’ajuster son scénario dans les prochains mois si elle ne veut pas voir ce scénario se matérialiser et sa crédibilité écornée", conclut le gérant.
Pour l'instant, ce n'est clairement pas ce que redoutent les marchés. Une brève poussée a été observée sur les taux, le rendement de l'OAT française à dix ans approchant 0,19%, mais en fin de journée il retombait à 0,15% (et le dix ans américain à moins de 1,5%). Les banques, qui se rémunèrent sur la marge d'intérêt, ont d'ailleurs réduit leurs gains autour de +1%, contre plus de 3% à la mi-séance... Toutefois au sein du CAC 40 le luxe (+1,2%) et les technologiques (+1,1% pour STMicro, +0,85% pour Capgemini), ont en partie pris le relais.
L'automobile a aussi ralenti sa progression avec finalement 0,3% seulement pour Stellantis et 0,14% pour pour Renault, à la suite d'un rebond de 53,4% du nombre d'immatriculations neuves sur un an au mois de mai dans l'Union européenne.
Victime d'une note de Bank of America qui adopte un avis négatif (sous-performance attendue et valeur estimée à 36 euros), Alstom a perdu près de 3% - avant l'annonce juste après la clôture de l'attribution d'un contrat de 2,6 milliards d'euros auprès des chemins de fer danois.
Hors de l'indice phare, Metabolic Explorer a flambé de +14%, le groupe ayant commencé la livraison à ses clients de premiers lots commerciaux de PDO, un composé habituellement issu de la pétrochimie que Metex fabrique avec un bioprocédé à partir de ressources renouvelables.
Ayant terminé jeudi sur une chute proche de 15%, McPhy perdait encore 4% ce jeudi. Solutions 30 signait une troisième séance consécutive de repli, mais limitait ses pertes sensiblement en clôture (-0,6%).
Les cours pétroliers enregistraient quelques prises de bénéfices après l'atteinte d'un niveau inédit depuis près de trois ans, le Brent redescendant à 73,30 dollars (-1,47%) et le WTI à 71,15 dollars (-1,39%). Le cours du cuivre flanchait de 3,33% après les initiatives de la Chine pour tenter de contenir la flambée des matières premières. Pour le bois d'œuvre, marché qui avait été pris d'une frénésie inédite depuis l'an dernier, le repli est supérieur à 4% ce jeudi, soit -44% par rapport au pic atteint début mai.
Sur le marché des changes, le billet vert profitait d'un courant d'achat après la réunion de la Fed, entraînant une baisse de 0,6% de l'euro à 1,1924 dollar.