(BFM Bourse) - La banque américaine a abaissé son conseil ce lundi 8 décembre sur le groupe pharmaceutique, passant de "surpondérer" à "neutre". L'établissement note que les bons résultats attendus en 2026 sont intégrés par le marché et que les futurs résultats d'essais cliniques sont peu susceptibles de changer la perception du marché sur le titre.
Sanofi n'a pas tenu ses promesses en Bourse cette année. Le groupe pharmaceutique possédait de multiples catalyseurs en stocks pour impressionner les investisseurs. Las, les multiples déceptions ont plombé son action, qui abandonne 10,2% depuis le début de l'année, quand le CAC 40 s'adjuge 9,6%.
Le groupe a livré une série de résultats financiers en demi-teinte, avec notamment une sévère punition du marché (l'action a perdu 7,8% dans la foulée de l'annonce) lors de la publication des comptes semestriels marqués par un bénéfice inférieur aux attentes.
Mais là n'est pas le plus important pour l'action, en réalité. Sanofi jouit d'une croissance relativement soutenue (8,7% en données comparables sur les neuf premiers mois de 2025) mais dont l'essentiel s'explique par la solidité de son blockbuster phare, Dupixent. Cet anti-inflammatoire aux nombreuses indications (asthme, dermatite atopique, prurigo nudolaire) a créé une ultra-dépendance chez Sanofi en matière de croissance.
Selon JPMorgan, les revenus du groupe pharmaceutique progresseront de 3,17 milliards d'euros l'an prochain, en valeur absolue. À lui seul, Dupixent apportera 2,56 milliards d'euros de chiffre d'affaires additionnel, soit 80% du total.
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Le "patent cliff"
Problème: Dupixent fera face, à compter du début des années 2030 à un "patent cliff", c'est-à-dire une série de pertes de brevets. Ce "patent cliff" retranchera 17,3 milliards d'euros de revenus entre 2030 et 2035, selon les projections de JPMorgan.
Depuis fin 2023, Sanofi a mis les bouchées doubles dans la R&D pour soigner ses essais cliniques et son "pipeline" (le gisement) de nouveaux traitements, afin de trouver des nouveaux médicaments prometteurs susceptibles de prendre le relais de Dupixent. Lors d'un "R&D day" fin 2023, l'entreprise avait ainsi identifié 12 molécules dont le potentiel de ventes en année pleine s'élevait entre 2 et plus de 5 milliards d'euros.
Ce qui représente un potentiel total allant de 33 à plus de 60 milliards d'euros. "Si cet objectif (de revenus, NDLR) était atteint, les lancements de médicaments innovants généreraient un chiffre d'affaires supérieur à celui nécessaire pour remplacer les ventes de Dupixent à l'expiration de ses brevets", écrivait alors UBS.
"Le débat sur l'action Sanofi reste centré sur le remplacement de la puissance de frappe sur les résultats de Dupixent par le pipeline de R&D", résumait de son côté HSBC en octobre.
Encore faut-il présenter des résultats d'essais cliniques concluants sur ces futurs traitements. Or, sur ce dernier point, Sanofi a enchaîné les déceptions cette année, sur deux rendez-vous phares en particulier.
Fin mai, le groupe avait publié les données de deux essais de phase III (la dernière étape avant une potentielle commercialisation) évaluant l'itépekimab pour traiter la "bronchopneumopathie chronique obstructive" (BPCO), une maladie surnommée "la bronchite du fumeur", qui prend la forme d'une inflammation chronique des bronches.
Seul un de ces deux essais de phase III avait atteint ses critères d'évaluation. "La première étude a obtenu de très bons résultats mais pour la deuxième, c'est très mauvais. Ce qui est perturbant car les deux études ont quasiment la même population, ce qui pose la question de savoir si les résultats de la première étude ne sont pas un "one-off" (un résultat exceptionnel, non reproductible, NDLR)", soulignait alors un analyste. L'action Sanofi avait alors perdu près de 5%.
Surtout, début septembre, la société a livré des résultats inférieurs aux attentes pour l'amlitelimab, un candidat-médicament sur lequel le marché fondait de grands espoirs. Cette molécule doit permettre de traiter la dermatite atopique, une maladie qui provoque des inflammations chroniques de la peau responsables de démangeaisons et qui touche en grande partie les enfants, notamment les nourrissons (et qui concernerait au moins 171 millions de personnes, selon un article paru dans le "Journal of European academy of dermatology and venereology").
Or les données de phase III de l'essai clinique "Coast 1" ont montré des données d'efficacité dans la borne inférieure des anticipations des analystes, nettement moindres qu'en phase II, et significativement moins élevées que celles d'autres traitements (comme le Rocatinlimab d'Amgen ou même Dupixent). L'action Sanofi avait alors dévissé de 8,3%.
Une reconquête difficile
Le groupe pharmaceutique peut-il rectifier le tir et reconquérir le marché en 2026? JPMorgan en doute.
La banque américaine est passée de "surpondérer" à "neutre" sur le titre, tout en abaissant son objectif de cours à 95 euros contre 105 euros auparavant.
À la Bourse de Paris, cet abaissement de recommandation pèse un peu sur le titre, l'action Sanofi abandonnant 1,2% vers 11h30 ce lundi et accusant l'un des replis les plus prononcés du CAC 40.
JPMorgan s'attend à ce que Sanofi génère l'an prochain une croissance élevée de son résultat net des activités par action, le principal indicateur de rentabilité de la société. La banque retient une progression "high single digit", ce que l'on peut grosso modo traduire par allant de 6 à 9%. Mais, souligne JPMorgan, "cela est déjà intégré par le marché".
Le problème vient en réalité du "pipeline" de nouveaux médicaments. JPMorgan estime que les principales annonces de la société en matière d'essais cliniques attendues en 2026 ne permettront pas de changer "la perception (des investisseurs, NDLR) des perspectives de croissance à long terme de Sanofi".
Deux principaux ensembles de résultats doivent survenir en 2026. Tout d'abord,Sanofi doit publier de nouvelles données de phase III pour l'amlitelimab avec les essais "Coast 1" et "Coast 2", au premier trimestre.
"Nous estimons qu'il est peu probable que (une amélioration des résultats montrés par ses essais) soit suffisante pour modifier la perception du positionnement concurrentiel et de l'utilisation de l'amlitelimab par rapport au Dupixent", explique JPMorgan.
La banque pense que le médicament génèrera des ventes de 1,1 milliard d'euros en pic d'ici à 2032, soit 18% de moins que le consensus (la prévision moyenne des analystes).
"Nous constatons également l'émergence de données concurrentielles provenant à la fois d'UCB et d'Apogee Therapeutics, qui pourraient déboucher sur de nouveaux agents plus efficaces contre la dermatite atopique, ce qui pourrait finalement réduire les opportunités pour l'amlitelimab", observe JPMorgan.
Tolebrutinib, pas un catalyseur
L'autre ensemble de données importants concerne des données de phase III pour tolebrutinib, une molécule destinée au traitement des formes spécifiques de la sclérose en plaques, une maladie auto-immune (le système de défense censé protéger le patient d'agressions extérieures se retournent contre ses propres cellules) extrêmement invalidante.
Ces données seront publiées pour des essais évaluant tolebrutinib pour traiter la sclérose en plaques "primaires progressives", qui, contrairement à la sclérose "récurrent-rémittente", ne connaît pas de phase de rémission.
La banque s'attend à ce que ces données soient positives. Mais elles ne changeront pas la donne car un candidat-médicament rival de Roche, à savoir le fénébrutinib, a obtenu des résultats d'essais cliniques robustes. En conséquence, "nous prévoyons que les opportunités commerciales du tolebrutinib dans le traitement de la SEP-PP (la sclérose en plaques primaire progressive) pourraient être plus limitées que prévu initialement", conclut JPMorgan.
Pour toutes ces raisons, la banque américaine n'attend pas de "re-rating", c'est-à-dire d'appréciation des multiples boursiers, sur l'action Sanofi, cette année.
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