(BFM Bourse) - Le marché européen des introductions en Bourse a repris des couleurs sur les six premiers mois de l'année, soutenu par des indices au plus haut et des attentes élevées sur les baisses de taux. Quel bilan peut-on tirer des plus grosses opérations de 2024 sur le sol européen?
Après une traversée du désert d'au moins deux ans, le marché des introductions en Bourse en Europe a gagné en vigueur sur la première partie de l'année 2024. Le terrain s'est avéré plus favorable pour ce type d'opération avec des indices au plus haut et des espoirs de prochaines baisses de taux d'intérêt cette année.
Ainsi, 69 entreprises ont décidé de franchir le pas au premier semestre 2024. C'est 10% de plus que l'an passé à pareille époque remarque EY dans son dernier rapport "EY Global Trends Q2 2024". Ces mêmes entreprises ont ainsi levé 15,2 milliards de dollars depuis janvier, soit trois fois plus que l'année dernière à la même époque, toujours selon des données compilées par EY.
Cette reprise a été soutenue par "une stabilisation de l'économie en Europe, une baisse de l'inflation, la diminution des prix de l'énergie, l'augmentation des bénéfices des entreprises et le renforcement de la confiance des investisseurs", cite George Chan, spécialiste du marché des introductions en Bourse chez EY.
"Au cours du premier semestre, les secteurs de la consommation, de la finance, de la santé et des sciences de la vie ont été majoritaires en Europe, chacun des secteurs cités ayant été animé par une méga-introduction en Bourse d'une valeur de plus de 2 milliards de dollars", poursuit le spécialiste.
Plusieurs opérations d'envergure qui avaient été mises en sommeil en 2023 ont en effet pu se concrétiser sur les six premiers mois de cette année. Parmi ces entreprises, on peut citer CVC au Pays-Bas, Renk en Allemagne ou Planisware en France qui avaient dû rebrousser chemin à la dernière minute en fin d'année dernière, face à des conditions de marché difficiles. Le premier semestre ayant tout récemment touché à sa fin, quel bilan peut-on dresser de ces nouveaux venus en Bourse en Europe*?
Parmi les plus grosses opérations qui ont animé le marché européen des introductions en Bourse sur la première partie d'année, on peut citer la mise en Bourse partielle de l'Aéroport international d'Athènes, par l'État hellénique début février. Et la demande a été plus qu'au rendez-vous pour la privatisation partielle de l'aéroport le plus important du pays, avec une opération sursouscrite 12 fois. Après un net décollage dans les premiers jours de cotation, l'action a perdu en altitude et cote près de 5% en dessous de son cours d'introduction fixé à 8,20 euros.
Un retour en Bourse gagnant pour Renk
L'allemand Renk a aussi franchi avec succès les fourches caudines de la Bourse, fin février cette fois-ci. Le fabricant allemand de boîtes de vitesses pour chars d'assaut a réussi son retour sur les marchés financiers, le groupe ayant déjà été coté de 1923 à 2020 à Francfort. Le titre évolue sur les 25 euros, soit près de 70% au-dessus du prix d'introduction fixé à 15 euros. La ténacité de Renk a donc été payante alors que le groupe avait suspendu son projet cinq mois auparavant, en raison de conditions de marché difficiles.
Toujours en Allemagne, on peut aussi évoquer l'entrée en Bourse du groupe allemand de parfumerie et cosmétiques Douglas, plus connu en France pour son enseigne Nocibé. Pour être plus précis, il s'agit comme pour Renk, d'un retour en Bourse de la société Douglas. La société avait été retirée de la Bourse de Francfort en 2013, après avoir été rachetée par le fonds d'investissement Advent et la famille Kreke. Les premiers pas du groupe ont été plus compliqués qu'attendu. Le titre a clôturé nettement sous son cours d'introduction en Bourse de 26 euros, qui était déjà fixé sur la borne basse de la fourchette indicative allant jusqu'à 30 euros. Depuis ses premiers pas inauguraux, le titre n'est pas en odeur de sainteté auprès des marchés, puisqu'il perd près de 35% par rapport à son cours d'introduction en Bourse.
Le voisin suisse Galderma lui a emboîté le pas le 22 mars dernier. Le spécialiste des soins dermatologiques, a fixé son prix à 53 francs suisses, ce qui lui a permis de lever 2,3 milliards de francs suisses. Ce montant correspond presque exactement au volume total des dix introductions en Bourse de l’année dernière en Suisse, note EY Suisse. Il s'agit de la plus importante introduction en Bourse en Suisse depuis 2017 s'est félicité SIX, l'opérateur boursier suisse dans un communiqué. Et le bilan est plutôt flatteur pour le spécialiste suisse cofondé par L'Oréal et Nestlé dans les années 1980. Il gagne près de 40% depuis son entrée à la Bourse de Zurich.
Un mois plus tard, les investisseurs ont enfin assisté aux premiers pas à la Bourse d'Amsterdam du fonds d'investissement CVC après deux tentatives ajournées. Le fonds d'investissement était ainsi parvenu à lever au moins 2 milliards d'euros, ce qui constituait à l'époque la plus grande introduction en Bourse sur le sol européen depuis le début de l'année. A l'image de Galderma, l'entrée en Bourse du propriétaire des pâtes Panzani a aussi été plébiscitée par les investisseurs, le titre progresse encore de 22,5% par rapport à son cours d'introduction fixé à 14 euros.
Mais le groupe familial de mode et cosmétiques, Puig - prononcez Poutch - est venu ravir la couronne de la plus grosse opération sur le sol européen. Le propriétaire catalan des marques Nina Ricci, Paco Rabanne et Jean Paul Gaultier a aussi eu les faveurs des investisseurs, et a pu lever 3 milliards d'euros, sur la base d'un prix d'introduction en Bourse de 24,50 euros. Ce qui constitue le plus gros lancement boursier de l'année en Espagne et comme l'un des principaux en Europe. Depuis ses pas inauguraux, le titre gagne 6,5%. Un parcours honorable dans un marché du luxe qui s'est complexifié.
Un marché français qui frémit?
Quid de la France? Deux opérations d'envergure ont animé la cote parisienne sur les six premiers mois de 2024. La première étant l'éditeur de logiciels pour la gestion de projets Planisware, qui a fait une entrée remarquée à la Bourse de Paris mi-avril. Le groupe s'est finalement jeté à l'eau six mois après une première tentative qui avait été annulée en raison de conditions de marché adverses. La patience de Planisware a été récompensée, puisque le titre progresse de 65% par rapport à un prix ferme de 16 euros retenu pour l'opération.
Début juin, c'était la pépite de la défense Exosens qui avait fait une entrée remarquée sur Euronext Paris. Le spécialiste des technologies de détection et d’imagerie électro-optiques a lui aussi reçu un accueil plus que chaleureux en Bourse, et évolue toujours au-dessus du prix ferme de 20 euros retenu pour cette opération.
À l’instar de Plansiware mi-avril, Exosens a privilégié la voie du placement privé pour cette entrée en Bourse "express". La société a profité du récent assouplissement des règles en matière d'introduction en Bourse. Les entreprises souhaitant rejoindre la place de Paris ne sont en effet plus obligées de réserver une partie de leurs actions aux investisseurs individuels. Auparavant, elles étaient obligées de proposer aux petits porteurs un minimum de 10% du montant global de l’opération.
En revanche du côté des petites et moyennes capitalisations, aucune entrée en Bourse n'a été comptabilisée. Or, c'était ce même compartiment de la cote qui avait animé, pour ne pas dire sauvé, le marché des introductions en Bourse l'an dernier.
*Cours arrêtés au 28/06/2024