Connexion
Mot de passe oublié Pas encore de compte ?

Marché : Pression maximale sur Jerome Powell à quelques heures de la décision de la Fed

mercredi 18 septembre 2019 à 13h50
La Fed devrait annoncer une nouvelle baisse de taux

(BFM Bourse) - Les marchés ont de nouveau les yeux tournés vers la réunion de politique monétaire de la Fed à l'issue de laquelle "Jay" Powell devrait, sauf imprévu, annoncer une nouvelle baisse des taux de 0,25%. Le président de l'institution donnera également des indications sur l'état de l'économie américaine et l'évolution à venir de la politique monétaire, tandis qu'il pourrait également dévoiler des mesures de soutien additionnelles.

Après une première baisse des taux en dix ans le 31 juillet dernier, la Réserve fédérale américaine devrait de nouveau réduire ses taux directeurs ce mercredi à 20h. "La probabilité estimée par les "futures" d'une réduction de 0,25% (ce qui les situera entre 1.75% et 2%, NDLR) est de 99,9% au moment d'écrire ces lignes" indiquait ainsi Gilles Prince, directeur des investissements chez Edmond de Rothschild dans sa note matinale. Autant dire que ce deuxième assouplissement monétaire en un mois et demi est "acquis et déjà pris en compte par le marché" relève Christopher Dembik, responsable de la recherche économique chez Saxo Banque.

En outre, "selon les calculs de Bloomberg, le marché anticipe même une voir deux baisses de taux supplémentaires d'ici la fin de l'année" précise Gilles Prince, qui ajoute néanmoins que ces attentes de baisses de taux additionnelles sont devenues plus raisonnables depuis la fin août, quand jusqu'à quatre baisses de taux étaient escomptées.

De son côté toutefois, le célèbre outil "FedWatch" du CME Group, qui se fonde sur les cours des contrats à terme sur les taux pour cerner les attentes implicites du marché, n'attribue plus qu'une probabilité de 58,8% de baisse d'un quart de point des taux directeurs américains, contre 92% il y a une semaine, et 41,2% de chances d'un statu quo.

Et si au contraire, la Fed se montrait encore plus accommodante que le scénario central ? Vu les tensions sur les opérations "repo" (les transactions à très court terme qui permettent aux banques et entreprises de se refinancer et constituent un autre outil pour la Fed pour peser sur les taux) et les interventions depuis deux jours de de la banque centrale pour apporter de la liquidité, il se pourrait que cette dernière soit plus "dovish" que prévu, développe Nicolas Chéron. "Si tel est le cas, et alors que le consensus est plutôt neutre, les marchés pourraient apprécier", indique le stratégiste de Binck.fr. Si la Fed évoquait une forme de micro-QE pour réparer le marché repo, l'annonce d'un plan d'assouplissement quantitatif aussi infime soit-il "pourrait faire exploser les indices vers de nouveaux records historiques" selon l'analyste.

La Fed est-elle proche de l'erreur de politique monétaire ?

C'est la question que se posent les experts de Mirabaud Securities Genève dans leur note matinale. Pour eux, c'est "à contrecœur" que la Banque centrale américaine va annoncer une nouvelle baisse de taux, Jerome Powell étant "pressé de toute part", il "aura fort à faire lors de la conférence de presse qui suivra la publication du communiqué" anticipent-ils. Le bureau d'études précise que, sur les dix membres du comité de politique monétaire appelés à voter ce mercredi, cinq (dont Jerome Powell) se sont prononcés en faveur d'une nouvelle baisse de taux, alors que deux (Eric Rosengren et Esther George, respectivement présidents des Fed de Boston et Kansas City) y sont opposés, les trois autres n'ayant pas publiquement pris position.

Les analystes de Mirabaud rappellent également que le "livre beige" -le rapport sur l'état de l'économie américaine publié huit fois par an par l'institution monétaire- du 4 septembre qui "sert de base à la réunion de la Fed" pointait plusieurs éléments importants. Premièrement, les douze antennes régionales avaient fait état d'une croissance économique modeste en juillet et août, trois sur douze ayant vu leur économie stagner, une de plus que dans le précédent "Beige book".

Deuxièmement, le rapport mettait en avant deux points faibles de l'économie américaine, à savoir l'industrie manufacturière et l'agriculture. Quant aux dépenses de consommation, elles étaient décrites comme "mitigées". En revanche, "la plupart des entreprises américaines sont restées optimistes sur leurs perspectives en dépit des inquiétudes liées aux droits de douane et à la politique commerciale" relèvent les experts de Mirabaud.

Autant d'éléments qui font dire à Gilles Prince que, "certes, l'économie l’économie américaine est en phase de ralentissement, c’est indéniable, mais elle ne nous apparaît pas être à son point de rupture". Selon lui, "si une coupe préventive de 0.25% est justifiable, les espoirs du marché pour des baisses additionnelles nous semblent à ce stade plus difficiles à expliquer sans une détérioration supplémentaire des moteurs de croissance comme la consommation, une escalade de la guerre commerciale ou un choc extérieur".

Qu'en est-il des deux mandats de la Fed ?

Les mandats de l'institution monétaire sont très clairs et concernent uniquement le plein-emploi et la stabilité des prix. Concernant le premier, "si plus de 40 millions de travailleurs américains ont besoin d’aide de l’État pour se nourrir, le taux de chômage "officiel" est actuellement de 3,7%, au plus bas depuis près de 50 ans, ce qui laisse entendre que ce mandat est accompli" pour les experts de Mirabaud. Sur la stabilité des prix, l'objectif d'inflation de la Fed est de 2% et "ce mandat n'est pas atteint aujourd'hui". "Force est de constater cependant que cette donnée n'est pas en décélération, bien au contraire si on observe les dernières statistiques" pointe Mirabaud, selon qui "les taxes actuellement imposées sur les produits chinois vont par ailleurs progressivement avoir un impact sur l’inflation importée, au même titre que la poursuite de la hausse des prix du pétrole".

Des mesures additionnelles ?

"Au-delà de la baisse des taux de la Fed ce soir, on peut s'attendre à des mesures additionnelles parmi lesquelles une nouvelle baisse du taux IOER (pour "Interest Rate on Excess Reserves", le taux auquel certaines banques placent à la Fed, l’équivalent du "taux de facilité de dépôt" de la BCE) pour inciter les banques à remettre leurs liquidités excédentaires sur le marché" estime Stéphane Déo, stratégiste chez La Banque Postale Asset Management.

Stéphane Déo relève également que mardi, pour la première fois en dix ans, "la Fed est directement intervenue sur le marché du repo (le taux de refinancement à un jour) hier pour 52,2 milliards de dollars et devrait le refaire aujourd'hui dans la limite des 75 milliards qui lui est fixée". Autrement dit, la Fed a pris en pension des titres d’Etat en échange de liquidités mises sur le marché, une opération qui a "le goût, l'odeur et la couleur" d'un QE". Les commentateurs outre-Atlantique parlent d'ailleurs de "baby QE" ou de QE light", bien qu'il s'agisse d'une opération temporaire de 24 heures.

Donald Trump menace

Cela fait désormais des mois que Donald Trump n'a de cesse d'exhorter le président de l'institution Jerome Powell et "ces incapables de la Fed", "qui n'y comprennent rien", d'assouplir beaucoup plus, et plus vite, leur politique monétaire. Face à ces tentatives d'ingérence à répétition du président américain, la question de l'indépendance de l'institution monétaire revient régulièrement sur la table et "Jay" pourrait avoir à cœur de la réaffirmer en allant une nouvelle fois contre la volonté de Donald Trump.

Le locataire de la Maison Blanche est d'ailleurs récemment allé encore plus loin en réclamant à la Fed des taux d'intérêts négatifs afin (notamment) de réduire le coût de la dette américaine. "On imagine bien que ce n'est pas la seule raison et que le président américain veut avant tout et à tout prix éviter une récession avant la fin de son mandat" car "si les États-Unis devaient rentrer en récession avant les élections présidentielles de 2020, 57% de la population américaine blâmerait Donald Trump (et 30% la Fed)" rappelle Mirabaud.

"À quand le prochain tweet ?" s'interroge ainsi Gilles Prince, pour qui "le meeting de la Fed pourrait bien, finalement, être un non-événement du point de vue des marchés financiers". Concernant la réaction des marchés, les experts de Mirabaud notent qu'historiquement, "les indices américains ont basculé 10 fois dans le rouge lors des 12 dernières conférences de presse de Jerome Powell"

Quentin Soubranne - ©2025 BFM Bourse
Forum suspendu temporairement
Portefeuille Trading
+336.70 % vs +57.27 % pour le CAC 40
Performance depuis le 28 mai 2008

Newsletter bfm bourse

Recevez gratuitement chaque matin la valeur du jour