par Matthieu Protard
PARIS (Reuters) - La Société générale se retrouve dans une nouvelle tourmente après la publication par Libération d'articles évoquant de possibles pertes dans ses activités de gestion d'actifs, que la banque française a toutefois démenties.
Le groupe, déjà ébranlé l'an dernier par l'affaire Kerviel, a tenté d'expliquer que la gestion du portefeuille qui lui a été transféré par sa filiale Sgam Alternative Investments n'avait pas entraîné des pertes de 5 milliards d'euros, pouvant même aller jusqu'à 10 milliards, comme l'affirmait Libération.
Le titre Socgen a clôturé lundi en repli de 3,69% à 36,95 euros après avoir ouvert en baisse de 5,21%, dans un marché où les valeurs bancaires ont été pour la plupart en recul.
L'indice sectoriel DJ Stoxx des banques européennes a terminé sur une baisse limitée de 0,12%, avec un CAC 40 quasiment à l'équilibre (-0,01%).
Le portefeuille des actifs litigieux de la Socgen, valorisé à 11,2 milliards d'euros début 2008, est valorisé à 5,3 milliards d'euros dans les comptes de la banque arrêtés au 31 décembre dernier. Mais la banque assure que cette différence de valeur ne correspond pas à des pertes.
"Sur le portefeuille de 11,2 milliards d'euros transféré par Sgam Alternative Investments au premier trimestre 2008, 4,6 mds d'euros d'actifs ont été cédés par la Socgen ou sont arrivés à échéance en 2008", a déclaré à Reuters Jean-Pierre Mustier, le directeur du pôle GIMS (gestion d'actifs et services aux investisseurs).
Jean-Pierre Mustier, qui était le patron de la banque de financement et d'investissement (BFI) de la Socgen au moment de l'affaire Kerviel, a assuré que la facture pour la banque s'était élevée l'an dernier à 1,2 milliard d'euros de dépréciations et de pertes avant impôts pour sa BFI.
Viennent s'y ajouter 274 millions d'euros de pertes avant impôts et de dépréciations enregistrées en 2008 dans les comptes de sa filiale Sgam (Société générale Asset Management).
INTERROGATIONS SUR LES ACTIFS TOXIQUES
Les révélations de Libération, qui ont été formellement démenties dès dimanche soir par la Socgen, n'ont pas manqué de relancer les interrogations sur l'ampleur des actifs toxiques encore présents dans les bilans des banques.
"La question qui se pose aujourd'hui encore c'est celle des actifs toxiques qui existent dans toutes les grandes banques du monde", a réagi le Premier ministre François Fillon à l'occasion de son déplacement à Mulhouse consacré au plan de relance de l'économie et au contrat de transition professionnelle.
"Nous pensons que les banques françaises sont plutôt plus préservées que d'autres, qu'elles ont fait le travail de nettoyage nécessaire", a-t-il souligné, tout en reconnaissant qu'il pouvait "y avoir encore des mauvaises surprises".
L'Autorité des marchés financiers (AMF), qui surveille les sociétés de gestion, a fait savoir qu'elle avait été informée de la décision de la Socgen de transférer des actifs de sa filiale.
La Banque de France, autorité de contrôle des banques, s'est en revanche abstenue de tout commentaire.
"Les montants de pertes passées indiqués par Libération sont erronés et les pertes futures évoquées (...) très exagérées et polémiques selon nous", estime de son côté dans une note Pierre Chédeville, analyste chez CM CIC Securities.
D'autres s'interrogent sur les dépréciations que la banque pourrait encore être contrainte de passer dans ses comptes.
Le responsable des activités de gestion d'actifs de la Socgen a précisé que les 5,3 milliards d'euros d'actifs encore présents dans le portefeuille de sa filiale avaient déjà été dépréciés à hauteur de 29% de leur valeur en moyenne.
Mais Jean-Pierre Mustier affirme que la banque n'a pour le moment "aucune pression" pour les céder.
ÉTAT-MAJOR DE LA GESTION D'ACTIFS REMANIÉ EN SEPTEMBRE 2008
En janvier 2008, la Socgen avait défrayé la chronique en révélant une perte de trading lui ayant coûté 4,9 milliards d'euros, la plus importante de l'histoire de la finance mondiale, suite à des prises de positions imputées au trader Jérôme Kerviel.
Touchée dès 2007 par la crise sur les marchés du crédit, sa gestion d'actifs a par ailleurs été placée courant 2008 sous revue stratégique, avant que la banque ne procède à une remaniement complet de l'état-major de ces activités.
Jean-Pierre Mustier a pris en septembre 2008 les commandes du pôle GIMS (gestion d'actifs et services aux investisseurs) et de Sgam pour y remplacer les deux principaux dirigeants, Philippe Collas et Alain Clot.
Philippe Collas est devenu conseiller du directeur général Frédéric Oudéa tandis qu'Alain Clot a été nommé directeur général délégué de Crédit du Nord, filiale à 80% de la Société générale.
En janvier 2009, la Société générale a franchi une nouvelle étape dans la restructuration de sa gestion en fusionnant une partie de ses activités avec celles du Crédit agricole au sein d'une entreprise commune détenue à 30% par la Socgen et 70% par la Banque verte.
Sa filiale de gestion alternative Sgam Alternative Investments est toutefois exclue du périmètre de ce rapprochement. Elle doit être fusionnée avec Lyxor, une autre filiale de gestion alternative de Société générale rattachée à la banque de financement et d'investissement.
Avec les contributions de Sudip Kar-Gupta, Juliette Rouillon et Gilbert Reilhac, édité par Marc Angrand, Jacques Poznanski et Benjamin Mallet
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