par Matthieu Protard
PARIS (Reuters) - Resté discret et en retrait depuis qu'il a quitté en mai 2008 les commandes opérationnelles de la Société générale après l'affaire Kerviel, Daniel Bouton a fini par jeter l'éponge.
Ces dernières semaines, le tollé sur ses stock options puis les révélations dans la presse concernant ses indemnités de retraite ou l'existence de "baronnies" au sein de sa banque ont rendu son maintien à la tête de la Socgen de plus en plus intenable.
De l'aveu même de Daniel Bouton, sa présence au sein de la banque commençait à porter préjudice au groupe qu'il avait rejoint il y a dix-huit ans et qu'il présidait depuis 1997.
"Je suis la cible d'attaques incessantes qui finissent par nuire à cette entreprise à laquelle je suis très attaché", confie au Figaro celui qui fut le directeur de cabinet d'Alain Juppé entre 1986 et 1988.
Mais l'ancien inspecteur des Finances, âgé aujourd'hui de 59 ans, n'en dira pas plus sur les origines de ces "attaques".
Au moment où les dirigeants de banque se préparent à négocier d'arrache-pied avec les pouvoirs publics les futures règles de régulation économique et financière, sa disgrâce auprès de Nicolas Sarkozy n'aurait pas facilité non plus la tâche des dirigeants de la banque.
Au plus fort de l'affaire Kerviel depuis 2008, puis à nouveau à l'automne dernier, le chef de l'Etat n'avait pas ménagé ses efforts pour réclamer sa démission.
Soignant sa sortie, Daniel Bouton a défendu dans la presse son bilan à la tête de la Socgen en affirmant laisser "un beau navire, avec un bon capitaine, armé pour affronter la période extrêmement ventée du moment", ajoutant que sa banque avait "même résisté à Jérôme Kerviel".
Mais l'affaire Kerviel, qui vaut à la banque d'afficher le record de la plus importante perte de trading de l'histoire de la finance, 4,9 milliards d'euros, puis les révélations récentes de Libération sur sa gestion d'actifs ont donné l'image d'une banque qui ne semblait pas maîtriser tous ses risques.
Or pour un groupe comme la Socgen, la maîtrise des risques est le nerf de la guerre, surtout quand il s'est bâti une renommée mondiale avec la conception de produits très sophistiqués, les dérivés actions.
LE PLUS JEUNE INSPECTEUR DES FINANCES
Sorti de l'ENA à 23 ans et devenu le plus jeune inspecteur des Finances de France, Daniel Bouton, débauché par Marc Viénot, a rejoint la Société générale en 1991, cinq ans après la privatisation de la banque.
Un an plus tard, ce joueur de golf reconnu et amateur d'opéra affronte sa première tempête, la crise asiatique, qui l'amènera à repenser la stratégie de l'établissement.
Arrivé à la tête de la banque, il se lance en 1999 à l'assaut de la banque Paribas avant de croiser sur son chemin la BNP qui contre-attaque en lançant une double offre hostile sur les deux maisons.
Au terme d'une bataille acharnée de six mois, c'est finalement BNP qui remporte Paribas mais la banque présidée par Michel Pébereau échoue sur la Société générale.
A partir de cette date, les rumeurs d'OPA de la banque de la rue d'Antin sur son éternelle rivale seront récurrentes. Mais les équipes de la Socgen tiennent tête et ne cesseront de s'accrocher à leur indépendance.
Sous l'impulsion de son président, la Société générale ajuste alors sa stratégie et jette son dévolu sur les pays émergents, en particulier sur l'Europe de l'Est et la Russie qui deviennent sa zone géographique prioritaire de développement mais suscite aujourd'hui des inquiétudes chez les analystes.
La banque se renforce également dans des activités comme la gestion d'actifs. Mais la crise financière financière et économique, qui a commencé à se propager à partir de l'automne dernier aux pays émergents, s'en mêle et oblige la Socgen revoir sa copie, en mariant notamment sa gestion d'actifs avec celle du Crédit agricole.
Avec la contribution de Yann Le Guernigou, édité par Marc Angrand
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