(BFM Bourse) - Le cartel et d’autres grands producteurs emmenés par la Russie ont convenu samedi, à l'exception du Mexique, d’étendre d’un mois la réduction coordonnée de leur offre, prolongeant ainsi leur accord obtenu mi-avril dernier qui a permis le rebond des cours des principaux barils de brut en retirant du marché près de 10% de l’offre mondiale.
Nouvelle victoire pour l'Opep et ses partenaires, de nouveau réunis par visioconférence ce week-end. "Tous les pays participants ont accepté la possibilité de prolonger d'un mois supplémentaire la première phase des ajustements de la production de mai et juin", a indiqué l'organisation dans un communiqué à l'issue de deux rounds de négociations. Selon le ministre algérien de l'Energie Mohamed Arkab, cité par l'agence APS, le but de l'accord est "d’asseoir et d'assurer une stabilité sur le marché pétrolier entre l'offre et la demande".
Face à la chute brutale de cette dernière et des prix du brut, les membres du cartel et leurs partenaires (ou Opep+) s'étaient engagés le 12 avril à une réduction historique de leur production de 9,7 millions de barils par jour (mbj) pour les mois de mai et juin, qui devait passer à 7,7 mbj à compter du 1er juillet et jusqu'à décembre, puis à 5,8 mbj de janvier 2021 à avril 2022.
Interrogé par l'AFP, Mohamed Arkab évoque néanmoins le chiffre de 9,6 mbj pour le mois de juillet, soit 100.000 barils par jour en moins que pour mai et juin, une information qui ne figure pas dans le communiqué de l'Opep.
Faire remonter le niveau de l'offre de brut "est un exercice d'équilibre à la fois redoutable et délicat, a souligné Ann-Louise Hittle, analyste chez Wood Mackenzie. "Il est essentiel de trouver le bon moment", a-t-elle ajouté, qui n'est donc pas encore venu. Le secrétaire américain à l'Energie, Dan Brouillette, a quant à lui adressé sur Twitter ses "félicitations" à l'Opep+ peu après l'annonce de l'accord.
Des quotas pas toujours respectés
Le cartel et ses partenaires ont ainsi surmonté les dissensions auxquelles ils ont habitué le marché et dépassé les querelles qui ont porté cette semaine sur le non-respect par certains pays de leurs quotas. Selon les calculs du fournisseur de données Kpler, le groupe de pays producteurs n'a réduit sa production que d'environ 8,6 mbj en mai, soit 11% de moins que le volume prévu.L'accord trouvé samedi stipule que les pays n'ayant pas respecté leurs engagements en mai et juin, dont l'Irak et le Nigeria souvent pointés du doigt, devront non seulement s'y conformer mais limiter d'autant leurs productions entre juillet et septembre.
"Nous avons une très bonne ambiance entre les pays Opep et non Opep. Nous travaillons en parfaite symbiose sur les grandes questions", avait assuré plus tôt dans la journée Mohamed Arkab, qui assure par ailleurs la présidence tournante du cartel.
Le Mexique joue encore les trouble-fête
Un seul pays a refusé, samedi, de prolonger cette réduction historique de production sur lesquels les producteurs se sont entendus: le Mexique. Pour rappel, le pays nord-américain avait déjà menacé de faire capoter les précédentes négociations en bloquant l'accord final d'une coupe de 10 mbj, refusant de réduire sa production de plus de 100.000 barils par jour quand les autres producteurs lui en réclamaient 400.000, d'où le compromis final trouvé sur le chiffre de 9,7 mbj.La ministre mexicaine de l'Energie Rocio Nahle a indiqué à la presse, lors d'une visite dans une usine pétrochimique dans l'Etat de Veracruz, que le Mexique ne se plierait pas au prolongement de ces coupes. "Il y a d'autres pays qui ont prolongé en juillet la réduction. Nous leur avons dit que non, que nous maintenons l'accord signé en avril. Il n'y a pas de problème", a-t-elle déclaré. Selon elle, le pays "a complètement respecté" l'accord initial, qui prévoit dans son cas 100.000 barils de moins par jour en mai et en juin, mais d'autres pays "ne l'ont pas respecté". Elle n'a pas spécifié lesquels. Ce refus mexicain de jouer les prolongations explique le chiffre de 9,6 mbj annoncé par Mohamed Arkab.
Les négociations sont par ailleurs souvent tendues entre la Russie et l'Arabie Saoudite, les deux poids lourds de l'Opep+, qui ont même déclenché une courte mais intense guerre des prix après l'échec de précédentes négociations en mars.
Des coupes qui se révèlent efficaces
Malgré les doutes qui planent sur la difficile entente des producteurs, la politique de l'Opep a montré son efficacité puisque les cours sont remontés en ce début juin autour de 40 dollars le baril pour la référence américaine, le West Texas Intermediate (WTI), et son équivalent européen, le Brent de la mer du Nord. Ils avaient atteint des plus bas historique aux alentours du 20 avril, heurtant la barre des 15 dollars pour le Brent et passant même en négatif pour le WTI.Peu après 10h lundi matin, les cours de ces deux références mondiales de brut poursuivent donc leur rebond, le baril de Brent grappillant 1,16% à 42,79 dollars quand celui de WTI avance de 1,01% à 39,95 dollars, et reviennent à leur niveau de début mars, avant que les cours ne s'effondrent faute d'un accord russo-saoudien.
"Le marché n'aurait pas pu souhaiter une meilleure issue à l'effondrement des prix", a réagi Bjornar Tonhaugen, analyste de Rystad Energy, après l'annonce de l'accord. "A moins qu'une deuxième vague de Covid-19 ne frappe le monde, l'accord d'aujourd'hui sera l'épine dorsale d'une reprise rapide de l'industrie énergétique", a-t-il ajouté.
Les ministres de l'Opep+ doivent se retrouver le 1er décembre à Vienne, en Autriche, où se trouve le siège de l'organisation.