(BFM Bourse) - Les investisseurs s'efforcent de positionner au mieux le curseur en tenant compte de la tourmente géopolitique, mais aussi de la réalité des performances au quotidien des sociétés cotées. Après un repli de 10% en moins d'un mois face aux craintes puis au déclenchement de la guerre en Ukraine, l'indice phare esquisse une stabilisation en s'affichant symboliquement dans le vert mercredi.
Alors que se poursuit l'offensive de l'armée russe en Ukraine, notamment autour du port de Marioupol et de la ville de Kherson, le niveau des indices boursiers cherche à s'ajuster au mieux en fonction de facteurs largement occultés jusqu'ici. Soit l'impact du risque géostratégique, le coût des sanctions infligées au régime russe (monumental pour l'économie du pays, mais pas anodin non plus pour les pays occidentaux), mais aussi la réponse des banques centrales : difficile de croire que le scénario de normalisation monétaire à marche forcée envisagé depuis fin 2021 soit toujours valable. Par ailleurs, plusieurs entreprises de premier rang sont directement exposées à une chute de l'activité en Russie, beaucoup d'autres n'échappent pas à une exposition indirecte, mais il ne faut pas oublier qu'en agrégé, les échanges sont mineurs dans le concert mondial. Dans ce contexte, après une brutale "correction" (ainsi que les boursiers désignent une chute d'au moins 10% par rapport à un précédente sommet), le CAC 40 sans s'affranchir d'une volatilité encore sensible en matinée stoppe pour le moment son repli, en regagnant 0,4% à 6.422,38 points vers 12h10.
La croissance mondiale va ralentir et l’inflation se faire plus vive, explique Hervé Goulletquer, de l'équipe de recherche de La Banque Postale Asset Management, avec des Etats-Unis moins pénalisés que la zone euro (elle-même moins affectée que la Russie). Le spécialiste rappelle que les exportations vers la Russie pèsent 0,5 point de PIB pour la zone euro et 0,1 point pour les Etats-Unis ; les importations en provenance de la Russie respectivement 1 point et 0,1 point (la différence s'expliquant par les achats de produits énergétiques de la part de l'Europe, quand les USA bénéficient sur ce plan de leurs gigantesques capacités de production). Selon lui, les risques de ralentissement de la croissance devraient amener un rythme plus prudent de normalisation monétaire, de part et d'autre de l'Atlantique.
Au niveau des valeurs, la forte incertitude quant aux retombées du conflit russo-ukrainien sur la fin de campagne de semences en Europe de l’Est amène par exemple le groupe français Vilmorin à réviser en baisse ses objectifs 2021-2022. Le titre chute de près de 14%. Mais l'actualité d'autres sociétés montre que la vie économique ne s'arrête pas pour autant, à l'image d'une opération capitalistique envisagée chez Cegedim (+13,6%), par laquelle les groupes de protection sociale Malakoff Humanis, VYV (groupement comprenant Harmonie Mutuelle, MGEN Chorum etc.) et Pro BTP envisagent une prise de participation au capital de Cegedim Santé, la filiale du groupe dédiée aux solutions digitales destinées aux professionnels de santé et aux patients.
Les opérateurs commencent aussi à relativiser la crise d'image des opérateurs de maisons de retraite : Korian, qui a répondu point par point au reportage de Cash Investigation de la veille, gagne 11% et Orpea monte de 10% (ce dernier a désormais repris 28% depuis le plancher atteint à la suite de la publication du livre Les Fossoyeurs).
Même TotalEnergies, pourtant menacé de devoir emboîter le pas de ses homologues BP, Shell ou Chevron de devoir non seulement stopper tout nouveau projet, mais abandonner ses investissements en cours en Russie, parvient à regagner 4,6%. Société Générale (+0,6%) se stabilise également. Au contraire Thales, porté ces dernières séances par l'engouement pour les valeurs de la défense, redonne 2%.
Sur le SBF 120, bioMérieux et Albioma chutent de 10% et 8,5% respectivement après la publication de leurs résultats et prévisions annuels.
Le courant d'achat spéculatif se maintient sur le pétrole avec un baril de Brent pour livraison mai qui se traite à 109,86 dollars, en hausse de 4,66%, après avoir "tapé" les 110 dollars pour la première fois depuis 2013 plus tôt en matinée.
Le dollar continue à régner en maître sur le marché des changes, avec un nouveau repli de 0,26% à 1,1096 euro.