(BFM Bourse) - La consommation des ménages a fortement ralenti, ce qui a contraint plusieurs groupes cotés à abaisser leurs perspectives financières au cours de la dernière saison des résultats. Dans ce contexte, les investisseurs se doivent d'être encore plus sélectifs.
Les investisseurs cherchent à identifier les valeurs qui ne souffriront pas d'une normalisation des achats post-pandémie, voire d'une récession, ce alors que les consommateurs de plus en plus attentifs à leurs dépenses limitent le pouvoir de fixation des prix des grandes entreprises.
"Les consommateurs ont absorbé les hausses de coûts des entreprises grâce à des niveaux d'épargne exceptionnellement hauts. Cela semble toucher à sa fin", remarque Chiara Robba, responsable action chez Generali AM.
"La saison des résultats du second trimestre met en évidence une certaine réduction des dépenses de consommation et des efforts de baisses de prix des entreprises pour soutenir la demande", ajoute-t-elle.
Les enquêtes PMI du mois de juillet suggèrent que les entreprises en zone euro et aux États-Unis ne sont plus capable de transmettre aussi facilement leurs hausses de coûts aux consommateurs.
Des avertissements sur résultats en pagaille
De nombreuses entreprises ont ainsi publié des avertissements sur résultats au cours du deuxième trimestre, ravivant les inquiétudes sur la croissance aux États-Unis et dans le reste du monde et contribuant à la chute des actifs risqués, début août.
Nestlé et Ryanair en Europe, McDonald's aux États-Unis, ainsi que les entreprises de paiement Visa et Worldline ont ainsi alerté sur leurs perspectives.
Selon les chiffres compilés par BofA, 40 entreprises ont abaissé leurs perspectives financières au cours de la dernière saison des résultats, un plus haut en un an, la plupart évoquant la faiblesse du consommateur. "Les signes d'une faiblesse de la consommation inquiètent", explique la banque.
Le secteur du luxe déchante
Le secteur du luxe n'a pas été épargné par la tendance, en Chine ou ailleurs.
Saint Laurent, détenu par Kering, a baissé de 10 à 15% le prix de son sac Loulou en France, en Grande-Bretagne, aux États-Unis et en Chine, une décision "très rare" pour le secteur qui, selon Barclays, montre que la marque juge ses précédentes hausses de prix trop importantes.
L'inflation des produits de luxe semble retrouver sa moyenne historique de 5% à 7%, et pourrait même chuter sous ce niveau, après trois années durant lesquelles cette inflation a été nettement supérieure à sa tendance de long terme, estime Luca Solca, analyste chez Bernstein.
"Des marques peu populaires qui ont monté substantiellement leurs prix, en rythme avec le secteur, doivent désormais corriger ces hausses à travers soldes et promotions. Cela est dû à la normalisation des comportements de consommation occidentaux, après l'euphorie post-pandémie", ajoute l'analyste.
Burberry, qui a renvoyé son directeur général et averti sur ses résultats en juillet, en est un bon exemple, le titre ayant perdu presque 20% de sa valeur le jour de ses résultats.
Selon Mediobanca, Swatch et Hugo Boss sont deux des titres les plus vendus à découvert de l'indice Stoxx 600, à la suite de résultats décevants.
Même le mastodonte LVMH, deuxième plus grande capitalisation européenne derrière Novo Nordisk, n'est pas à l'abri d'une faiblesse de la consommation.
"Avec la crise du coût de la vie, le consommateur hésite devant des prix plus élevés. Cela se ressent pour tous les niveaux de revenus, les entreprises du luxe faisant par exemple état de conditions plus difficiles pour l'ensemble des consommateurs à travers le monde et notamment en Chine. Seuls les plus riches en sont exempts", résume Sanjiv Tumkur, responsable actions chez Rathbones IM.
Une polarisation des consommateurs
Gillian Diesen, gérante chez Pictet AM, estime que les derniers résultats suggèrent davantage une polarisation accrue des consommateurs plutôt qu'une perte générale de pouvoir d'achat.
"Côté haut de gamme, la plupart des marques premium (...) relèvent de nouveau leurs prix cette année, à un rythme plus normal toutefois", explique-t-elle, soulignant que cette tendance va au-delà du luxe.
Ferrari a ainsi dépassé les attentes malgré une demande fluctuante dans le secteur automobile, grâce aux ventes de ses modèles onéreux.
La différenciation est un autre facteur important, et les secteurs à risque sont ceux où elle est faible, comme les soins personnels et la nourriture et boissons, souligne Chiara Robba.
Les groupes d'équipements sportifs innovants, comme On et Deckers affichent toujours des hausses de prix et de chiffre d'affaires, contrairement aux noms plus établis comme Nike et Puma, dont le cours a touché un plus bas en six ans mercredi après ses résultats.
Dans l'aérien, Sanjiv Tumkur prévient que la situation de Ryanair n'est pas celle de tout le secteur, la demande pour les concurrents Easyjet et Jet2 étant plus forte.
"Ryanair est un transporteur à bas coût, tandis que ses concurrents offrent aussi des vacances tout compris, davantage demandées par les consommateurs. Comme toujours, la sélection sera clé", résume le gérant.
(Avec Reuters)