par Yann Le Guernigou et Sudip Kar-Gupta
PARIS (Reuters) - Le président de la Société générale, Daniel Bouton, a déclaré bénéficier du soutien de son conseil d'administration pour poursuivre le développement de la banque selon le modèle stratégique qui lui a réussi avant la crise des marchés du crédit et la perte record occasionnée par les manipulations d'un trader.
Dans une interview à l'agence Reuters, il a indiqué en outre ne pas envisager d'importantes acquisitions en 2008 après la prise de contrôle de la banque russe Rosbank, fin 2007.
"Le conseil m'a demandé de gérer cette crise, le conseil m'a demandé de poursuivre le développement de cette banque et je le fais", a-t-il dit, car il dispose pour cela d'un "mandat parfaitement clair".
"Je suis complètement déterminé à continuer cette stratégie parce que, même en prenant en compte une très mauvaise année 2007 compte tenu de la crise et de cette fraude, c'est celle qui crée et qui créera à terme pour l'actionnaire le maximum de valeur. C'est mon opinion, elle est soutenue par le conseil", a-t-il poursuivi.
Le conseil d'administration avait déjà apporté à deux reprises son soutien au président de la banque, une première fois en refusant la démission qu'il avait proposée en même temps que l'annonce des pertes sur les positions accumulées par Jérôme Kerviel, la seconde le 30 janvier après que plusieurs voix se sont élevées dans le monde politique pour réclamer son départ.
Dans l'interview accordée mercredi soir, Daniel Bouton s'est refusé au moindre commentaire sur les "rumeurs" d'intérêt potentiel de certains concurrents pour la Société générale, au premier chef sa grande rivale BNP Paribas.
De même, invoquant l'existence d'un comité spécial de son conseil d'administration chargé de la superviser, il n'a rien voulu dire sur l'enquête à propos des conditions dans lesquelles un trader isolé, Jérôme Kerviel, est parvenu à accumuler pendant plus de deux ans des positions spéculatives non détectées par la banque et dont le débouclage le mois dernier s'est soldé par une perte nette de 4,9 milliards d'euros.
PROBLÈME ET SOLUTION
A la question de savoir si la réputation de la Société générale avait été durablement atteinte, il a répondu que ce serait le cas pour une banque qui ne pourrait régler rapidement un tel problème. "Mais nous avons annoncé à la fois le problème et sa solution", a-t-il souligné, évoquant l'augmentation de capital de 5,5 milliards d'euros mise en place pour consolider sa solvabilité.
L'opération, qui débutait ce jeudi pour prendre fin le 29 février, bénéficie d'une garantie d'un syndicat bancaire.
"Le modèle de développement de la Société générale est tellement solide que, malgré le cumul de la fraude et des dépréciations (NDLR de 2,6 milliards d'euros liées à la crise financière), elle est restée profitable et même substantiellement", a dit le président.
Ce modèle repose sur le développement d'activités de banque de détail dans les pays émergents et de services financiers spécialisés, comme le crédit à la consommation, financé par les importants cash flows dégagés par les réseaux français et surtout la BFI.
Concernant cette dernière, Daniel Bouton a confirmé que le premier semestre 2008 serait en retrait, le temps qu'un renforcement du contrôle du risque opérationnel soit mis en place à la lumière de l'affaire Jérôme Kerviel et parce que la grande volatilité des marchés l'a conduite à réduire ses limites de risque.
Mais il s'est dit confiant que cette banque de financement et d'investissement, avec sa forte composante dérivés actions, un métier dont la Société générale est le numéro un mondial, serait à nouveau très compétitive pour atteindre les nouveaux objectifs fixés à l'horizon 2009-2010.
ESTIMATION CONSERVATRICE
Ceux-ci, qui reposent sur une rentabilité des fonds propres de 30% en 2009 après 20% en 2008, ont été jugés trop optimistes par plusieurs analystes.
Le président de la Société générale souligne que les 30% visés marquent un retrait d'un tiers par rapport aux 45% atteints en 2006, haut de cycle dans ces activités, et reposent sur une hypothèse de léger rebond de la croissance économique après une année 2008 qui débute, il s'en dit convaincu, par une récession aux Etats-Unis.
Il fait valoir en outre que la BFI ne devrait plus représenter en 2010 que 25% des actifs pondérés de la Société générale, contre 28% à fin 2007 : "Nous la diminuons chaque année mécaniquement du simple fait que nous investissons par croissance organique ou par acquisitions dans les activités de banque de détail ou de crédit à la consommation".
Dernière en date de ces acquisitions, elle vient de prendre le contrôle de Rosbank, la plus grande banque privée russe, en deux étapes pour un montant de 2,3 milliards de dollars.
Comme elle le fait après chaque acquisition de taille importante, elle entend donner la priorité à court terme à sa croissance organique sans exclure de petites transactions.
"Nous ne prévoyons pas de très grosse acquisition en 2008 puisque nous venons de finir Rosbank", a dit Daniel Bouton, soulignant que la priorité de son groupe n'était pas de devenir plus gros mais d'afficher "une croissance et une rentabilité qui permettent de satisfaire nos actionnaires de manière convenable."
Prié de dire si la Société générale pensait en avoir fini avec les dépréciations liées à la crise des marchés du crédit, il a répondu que celles de deux milliards d'euros qui ont impacté les comptes du quatrième trimestre 2007 avaient été calculées sur la base d'une estimation de pertes totales pour le secteur immobilier résidentiel américain de 350 milliards de dollars. "C'est l'une des plus conservatrices que l'on connaisse", a-t-il fait valoir.
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