par Yann Le Guernigou
PARIS (Reuters) - La spéculation s'est calmée lundi autour de la Société générale en Bourse, le marché se concentrant sur l'augmentation de capital à venir qui doit permettre de consolider les fonds propres de la banque affaiblie par une perte de trading record et de nouvelles dépréciations liées à la crise des marchés du crédit.
L'action Société générale, qui affichait vendredi en clôture un rebond de plus de 30% par rapport à son plus bas de 66,80 euros enregistré lundi dernier en cours de séance, a ainsi été victime de prises de prises de bénéfice, cédant 4,77% dans un marché en hausse (+0,12% pour l'indice des banques européennes).
"Il vaut mieux prendre des bénéfices dans l'attente des détails de l'augmentation de capital, qui se fera avec une décote assez forte," a déclaré Frédéric Hamm, gérant chez Agilis Gestion.
Le président Daniel Bouton a laissé entendre lors d'un récent "chat" sur internet avec les salariés de la Société générale que l'opération, d'un montant de 5,5 milliards d'euros, pourrait être lancée cette semaine, une information que la banque n'a pas confirmée.
Le quotidien La Tribune, qui ne cite pas de source, évoque la fin de la semaine, voire le début de la suivante.
Son prix devrait être nettement inférieur au cours de Bourse du moment pour convaincre les actionnaires d'y souscrire mais aussi parce qu'elle fait l'objet d'un engagement de bonne fin de la part d'un syndicat bancaire dirigé par JP Morgan et Morgan Stanley, qui s'est engagé à acquérir tous les titres qui ne trouveraient pas preneurs dans des marchés qui restent très volatils.
FANTASME ?
Les analystes interrogés tablent en moyenne sur une décote comprise entre 20% et 30% par rapport au cours de la Société générale du 24 janvier (75,81 euros en clôture), juste après l'annonce de ses pertes.
Son rebond depuis une semaine tient en grande partie au retour des spéculations sur la capacité de la banque à rester indépendante après cette épreuve.
Elles ont été entretenues par les déclarations de plusieurs responsables politiques insistant sur la nécessité de la protéger contre des prédateurs ou de lui conserver son caractère français, ce qui a provoqué un rappel à l'ordre de Bruxelles sur l'obligation de neutralité de Paris vis-à-vis d'éventuelles offres étrangères.
BNP Paribas y a également contribué en indiquant qu'elle avait entamé une réflexion sur l'opportunité d'une offre sur sa vieille rivale, qu'elle avait tenté en vain de racheter en 1999, en faisant valoir que "toute l'Europe bancaire y réfléchit" aussi.
Un intérêt du Crédit agricole a aussi été évoqué dans la presse, notamment dans le cadre d'un dépeçage éventuel d'une Société générale durablement affaiblie.
"Tout ceci relève du fantasme pour l'instant", estime un analyste parisien, pour qui la Société générale est actuellement protégée parce que le marché n'est pas prêt, dans l'environnement actuel, à accepter des mariages entre banques ayant des positions fortes dans les activités de marché.
Un analyste d'une banque américaine à Londres juge quant à lui qu'il serait difficile de s'intéresser à la Société générale avant de connaître le résultat des enquêtes en cours sur l'origine de sa perte et des conséquences de celle-ci sur l'évolution de sa division banque de financement et d'investissement (BFI).
LA BFI MOINS VALORISÉE
La Société générale a déjà laissé entendre clairement qu'elle resserrerait ses limites de risque, ce qui aura un impact sur les activités de trading de sa BFI, qui contribuaient pour un tiers de ses revenus en rythme de croisière.
Les analystes accentuent en conséquence les révisions en baisse de la valorisation de celle-ci entamées dès l'automne dernier après le début de la crise des marchés du crédit.
Six analystes sondés par Reuters la situent aujourd'hui entre 8 et 9 milliards d'euros, soit près de la moitié des estimations les plus hautes (16 milliards) qui prévalaient encore à l'automne, tout en soulignant que, si elle était à vendre aujourd'hui, sa valeur serait proche du montant des fonds propres (près de six milliards d'euros) alloués par la Société générale à cette activité.
BNP Paribas ayant assuré à plusieurs reprises que la BFI de Société générale constituait le principal obstacle à une fusion, du fait des importants doublons sur les activités comme sur les clients, un affaiblissement de celle-ci jouerait en sa faveur.
"BNP Paribas est montée sur la colline et observe la situation", déclare une source proche du dossier, tout en soulignant qu'il n'y a pour la banque "aucune urgence et (que) rien ne presse".
"Avec la situation actuelle et une augmentation de capital qui la mettra hors de danger, la Société générale a sans doute gagné un peu de répit", déclare l'analyste londonien. "Après, tout dépendra de l'évolution de son cours de Bourse".
Dans une note publiée lundi, Crédit suisse estime que BNP Paribas peut se permettre une offre valorisant Société générale entre 89 et 96 euros par action, voire 93 à 100 euros si elle cède des actifs comme son portefeuille de participations, ou ses filiales Klépierre et BancWest, pour compenser la dilution.
Yann Le Guernigou
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