par Andrew Hurst
ZURICH (Reuters) - L'énorme perte de 4,9 milliards d'euros révélée jeudi par la Société générale et attribuée aux agissements d'un seul employé vient rappeler que les banques, mêmes les plus grandes, ne sont pas à l'abri d'une violation de leurs systèmes de sécurité, si sophistiqués soient- ils, estiment les observateurs.
D'autres faits de ce genre se sont déjà produits - il y a 13 ans, un trader nommé Nick Leeson avait mis la vénérable banque Barings en faillite après avoir perdu 1,4 milliard de dollars sur des paris malheureux à la Bourse de Tokyo - et d'autres banques pourraient un jour révéler des faits analogues quelles que soient les sommes investies dans les systèmes de sécurité.
"Les banques gagnent beaucoup plus d'argent et prennent sur les marchés des positions beaucoup plus grosses, aussi peut-on s'attendre à ce que la taille des scandales soit plus importante", commente Simon Maughan chez MF Global.
Depuis l'affaire Nick Leeson qui a été suivie par d'autres, les spécialistes de la sécurité se sont précipités pour renforcer leurs systèmes et mettre à jour leurs techniques mais conserver une avance sur la technologie n'est pas aisé.
Pour le PDG de la banque d'affaires Lehman Brothers, Richard Fuld, la perte découverte à la Société générale est "le pire cauchemar" de tout banquier, admission tacite qu'aucune banque ne peut se considérer entièrement à l'abri.
Cette opinion est partagée à la Société générale. "Nous avons un système hyper-sophistiqué de vérifications et de contrôles. C'est très difficile à comprendre. Mais il y a toujours des trous dans tout système", déclare un cadre de la banque française sous le sceau de l'anonymat.
COMBINAISON INHABITUELLE
C'est la connaissance intime des systèmes de contrôle des risques de son employeur qui semble avoir permis à l'employé de la Société générale - il avait comme Nick Leeson parié sur l'orientation des indices boursiers - de ne pas être repéré.
"Quelqu'un qui a une connaissance approfondie de la façon de faire telle ou telle chose a le pouvoir de contourner ces systèmes", souligne Janine Dow, cadre chez Fitch.
Un expert des questions de sécurité estime pour sa part qu'il est inhabituel que quelqu'un ayant une connaissance très à jour des systèmes de contrôle des risques, comme cela semble avoir été le cas à la Société générale, soit ensuite allé directement à un poste lié au trading sur les marchés.
"Cela semble une combinaison inhabituelle de savoir-faire. La connaissance, quelle qu'elle soit, est un élément puissant entre de mauvaises mains et si vous savez de quoi les contrôles de sécurité sont faits, il est plus facile de les contourner", commente ce consultant en systèmes de sécurité basé à Londres et dont la Société générale figure parmi les clients.
"Un individu motivé qui comprend la sécurité va aller là où les contrôles sont les plus faibles" ajoute le consultant.
En outre, les techniques de contrôle des risques sont fondées sur l'expérience du passé, ce qui est une des raisons pour lesquelles elle ne peuvent jamais être complètement efficaces pour déceler les fraudes en raison de l'évolution rapide de la technologie et de la sophistication croissante des procédures de transactions sur les marchés.
Quand il était président de la puissante banque de Wall Street Goldman Sachs, Henry Paulson, aujourd'hui secrétaire américain au Trésor, avait estimé que la fraude ne pourrait jamais être totalement écartée dans la mesure où les grandes banques sont des géants de la taille de petites villes.
"On ne supprimera jamais les mauvais agissements. Dans une ville de 20.000 personnes, il y a une prison", avait-il indiqué.
Version française Danielle Rouquié
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