par Yann Le Guernigou
PARIS (Reuters) - Le président de la Société générale, Daniel Bouton, a entamé lundi à Londres une tournée des investisseurs pour les convaincre du potentiel de redressement de sa banque et de participer à l'appel au marché nécessaire à la consolidation de ses fonds propres après l'annonce d'une fraude record qui lui coûtera 4,9 milliards d'euros.
Il a débuté cet exercice alors que les marchés continuent de mettre le titre Société générale sous forte pression, les fonds spéculatifs jouant la baisse pour obtenir que l'augmentation de capital prévue, d'un montant de 5,5 milliards d'euros, se fasse au prix le plus bas possible.
Il a fini en baisse de 3,82%, à 71,05 euros, après être descendu en séance jusqu'à 66,80 euros, un nouveau plus bas depuis août 2004, alors que l'indice DJ Stoxx des banques a cédé 1,39%.
A ce cours, la capitalisation boursière de la Société générale (33,13 milliards d'euros) est passée pour la première fois sous celle de Crédit agricole SA (33,96 milliards) et ne représente plus que 55,7% de celle de BNP Paribas.
"Tous les hedge funds de la planète ont 'shorté' pour que l'augmentation de capital se fasse le plus bas possible. Ils mettent une grosse pression. La dilution, qui était estimée à 17% vendredi avec un cours autour de 75 euros, est maintenant à 23% à 68-70 euros", dit un vendeur actions d'une banque britannique.
Alain Dupuis, analyste chez Oddo Securities, parle de "processus itératif à la Fortis", allusion à la chute du cours de Bourse de la banque belgo-néerlandaise après l'annonce l'an passé de son augmentation de capital pour financer le rachat d'une partie d'ABN Amro.
COMPTES ESTIMÉS ?
"Dans des marchés violents comme aujourd'hui, la décote de l'augmentation de capital devra être forte", souligne-t-il, "et plus le cours de bourse baisse, plus le prix d'émission (des nouvelles actions) devra être bas", avec pour conséquence qu'un plus grand nombre de titres devra être créé pour arriver aux 5,5 milliards d'euros prévu.
Au bout du compte, "la dilution sera plus forte et cela pèse encore plus sur le cours de Bourse", explique l'analyste, pour qui la Société générale "doit aller très vite" pour enrayer cette spirale.
La banque, qui a conclu un accord avec les banques américaines JP Morgan et Morgan Stanley pour souscrire l'intégralité des titres qui ne trouveraient pas preneurs, pourrait, pensent certains intervenants, arrêter les termes de l'augmentation de capital lors d'un conseil d'administration prévu mercredi.
La Société générale s'est refusée à tout commentaire sur l'ordre du jour.
Le lancement de l'opération de marché devrait théoriquement obliger la banque à publier des comptes 2007 détaillés, ce qu'elle ne prévoit pas de faire avant le 21 février, la date prévue à l'origine.
A l'AMF, une porte-parole indique qu'elle pourrait se contenter de publier des comptes estimés.
BONNE OU MAUVAISE FOI
Mais elle n'a pas été en mesure de dire si le communiqué publié la semaine passé, donnant une fourchette de 600 à 800 millions d'euros pour le bénéfice net 2007 et les grandes tendances non chiffrées des différents métiers, suffiront.
"Pour une opération de cette taille et dans les circonstances actuelles, des comptes détaillés apparaissent nécessaires. Mais cela peut se négocier au cas par cas", dit un responsable d'un desk primaire actions à Paris, estimant lui aussi que la Société générale a besoin d'agir le plus rapidement possible "pour calmer la pression vendeuse".
Priée de dire si elle pourrait participer à l'augmentation de capital, Valérie Cazaban, gestionnaire à Stratège Finance, a déclaré : "Si l'émission avait lieu aujourd'hui, la réponse serait non.
"Il faut attendre de voir comment l'affaire évolue et de savoir si le management a agi de bonne ou mauvaise foi. Le management doit prouver son professionnalisme et assumer ses responsabilités", a dit la gestionnaire, qui a en portefeuille un "petit nombre" d'actions Société générale.
Interrogé sur Europe 1, Daniel Bouton a déclaré que sa démission était "toujours sur la table" bien qu'elle ait été refusée par le conseil d'administration qui a, selon lui, jugé plus utile de le maintenir en place dans les circonstances actuelles.
Chargé du redressement du Crédit lyonnais après la quasi-faillite de la banque au début des années 1990, Jean Peyrelevade a déclaré que le président de la Société générale avait raison de rester en place tant qu'elle ne sera pas définitivement tirée d'affaires mais que la question de son départ pourrait éventuellement se poser à terme. Avec les contributions de Juliette Rouillon et Sudip Kar-Gupta
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