(BFM Bourse) - La banque est passée d'"acheter" à "conserver" sur le titre du groupe au losange ce mardi 25 octobre. Jefferies considère que le redressement de Renault a désormais franchi les étapes les plus "traditionnelles" et que la dernière phase sera la plus difficile. Car elle dépend de beaucoup d'éléments externes.
Renault a constitué l'une des grandes sources de satisfaction de la place parisienne en 2024. L'an dernier, le constructeur au losange a signé une hausse de 27,5%, la sixième plus importante du CAC 40, et, surtout la plus forte parmi les constructeurs automobiles européens.
Toutefois, depuis le début de l'année, Renault fatigue quelque peu en Bourse. Son titre s'apprécie de seulement 2,5% depuis le 1er janvier, sous-performant nettement le CAC 40, qui s'adjuge 9,4% sur la même période.
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L'échec des discussions entre Nissan et Honda, qui aurait offert à Renault davantage d'options pour monétiser sa participation de 35,7% au capital de Nissan, a pesé. De même que ses résultats annuels, publiés la semaine dernière. Si le groupe au losange a globalement livré des chiffres meilleurs qu'attendu, les marges, en particulier la marge opérationnelle de l'automobile, très suivie, "se sont avérées un peu juste", remarquait Deutsche Bank.
En outre, Renault a communiqué des perspectives prudentes au titre de 2025, tablant sur une marge opérationnelle d'au moins 7%, après un taux de 7,6% en 2024. Cette prudence est due aux incertitudes autour de la régulation dite "CAFE" sur les émissions de Co2 en Europe. Un tour de vis sévère s'est opéré en 2025 sur cette régulation avec des seuils d'émissions exigeants. Des amendes ou à minima des surcoûts sont attendus, les constructeurs risquant de ne pas vendre assez de véhicules électriques ou thermiques pour rentrer dans les clous.
Renault a intégré un impact d'1 point de pourcentage lié à la régulation CAFE dans sa prévision de marge opérationnelle. "Nous pensons que le rappel des risques de non-conformité (sur la régulation CAFE) auxquels sont confrontés la plupart des constructeurs européens a été la principale raison de la chute de 4% du cours de l'action" qui a suivi la publication des résultats, a expliqué Bernstein.
La fin d'un ère, celle du redressement "traditionnel"
Le constructeur a-t-il désormais mangé son pain blanc en Bourse? Une pause doit-elle s'opérer sur l'action? Jefferies répond par l'affirmative.
La banque a abaissé ce mardi 25 février sa recommandation sur le titre du constructeur au losange, passant d'"acheter" à "conserver" tout en ajustant son objectif de cours à 52 euros, contre 55 euros précédemment.
Ce changement de conseil pèse un peu sur le titre Renault qui abandonne 1% vers 15h20 alors que le CAC 40 grignote du terrain (-0,18%) au même moment.
Jefferies voit dans les comptes 2024 du constructeur la fin d'un cycle pour Renault. Celui où le constructeur au losange a pu redresser sa rentabilité et rattraper ses concurrents grâce à des hausses de prix (notamment en ciblant davantage le canal des particuliers au détriment des loueurs et des flottes professionnelles) et à des effets "mix" (l'orientation des ventes vers des produits mieux margés) positifs.
Jefferies estime au passage que les perspectives de Renault pour 2025, bien que prudentes, ne sont pas si loin du consensus (7,4% pour la marge opérationnelle et 2,3 milliards d'euros pour le flux de trésorerie, contre "au moins" 2 milliards visés par la société). Ce qui veut dire que le constructeur n'a que très peu de champ pour surprendre le marché et donc permettre à son action de remonter.
"Le marché s'attend d'ores et déjà à une bonne résistance" de Renault "notamment grâce au passage de Dacia dans le segment C (segment des monospaces compacts, plus rentable que le B, celui des citadines, NDLR) et à la réduction des pertes d'Ampere", la filiale de la société dédiée aux technologies électriques et aux logiciels embarqués.
Plus largement, Jefferies estime que le redressement de Renault a désormais passé les étapes "classiques", c'est-à-dire celles centrées sur l'élévation de la gamme, la rationalisation industrielle ou encore l'efficacité en termes de coûts.
"Selon nous, la partie 'traditionnelle' du remarquable redressement de Renault est arrivée à son terme, laissant le dossier d'investissement dépendre davantage de la capacité à être 'futé' sur la stratégie, de la façon de monétiser la participation dans Nissan, de la faculté à naviguer dans la transition industrielle ainsi que des moyens de travailler avec Geely sans diluer davantage les actionnaires", développe Jefferies.
Futurama, un chapitre précoce?
Or, Renault n'a pas vraiment la main sur ces défis. Céder davantage d'actions Nissan voire vendre l'intégralité de la participation dépendra "d'opportunités échappant au contrôle" de l'entreprise française, pointe Jefferies.
La coopération avec le constructeur chinois Geely a ses mérites et ses vertus. Les deux groupes sont notamment associés à 45/45 (les 10% restants sont détenus par Saudi Aramco) au capital de Horse, une société spécialisée dans les groupes motopropulseurs thermiques et hybrides.
Les deux groupes possèdent également une coentreprise en Corée et ont annoncé mi-février un accord-cadre de coopération au Brésil. Selon cet accord, Geely deviendra un actionnaire minoritaire de Renault do Brasil, filiale brésilienne du groupe au losange.
La collaboration entre les deux groupes crée "des opportunités de croissance et de synergies, mais soulèvent également des questions sur la rétention de valeur et la présence d'intérêts minoritaires, compte tenu de la longue histoire de Renault (Volvo AB, Nissan, le projet d'introduction en bourse d'Ampere discutable)", tranche Jefferies.
En clair, le bureau d'études rappelle que Renault n'a pas toujours été très bon par le passé quand il a tenté de cristalliser de la valeur sur des filiales dont il partageait le capital.
Par ailleurs, Jefferies se montre un peu sceptique sur le prochain plan stratégique de Renault, baptisé "Futurama". La semaine dernière, Luca de Meo, le directeur général de la société, a annoncé aux analystes que cette future feuille de route serait présentée cette année.
Cette nouvelle étape visera à rendre les résultats de Renault moins cycliques et à investir davantage pour renforcer les atouts technologiques du groupe et le ramener ainsi dans "la Ligue des champions de l'automobile", avait-il ajouté.
"Nous restons constructifs quant aux efforts de Renault pour améliorer les temps de développement des produits, simplifier la conception à la fabrication et optimiser les temps d'assemblage (moins de 10 heures), mais Futurama, le prochain plan stratégique, visera probablement des mesures de profit hors normes qui semblent prématurées compte tenu de la pression sur le secteur automobile", prévient Jefferies.
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