(BFM Bourse) - Le groupe au losange signe la plus forte hausse du CAC 40 depuis le début de l'année, grâce à de bons résultats mais aussi à son absence du marché chinois. Plusieurs intermédiaires financiers jugent que la marque a les moyens de progresser.
Pendant de longues années, Renault a évolué à des niveaux de valorisation aberrants en Bourse, plombé par un enchaînement de tempêtes (affaires Ghosn, crise sanitaire, pénurie des semi-conducteurs, échec de la fusion avec Fiat Chrysler…). Mais aussi par des résultats ternes. Le groupe avait par exemple émis un avertissement retentissant sur ses comptes à l'automne 2019. A l'époque son cours de Bourse retraité du cash, de sa participation dans Nissan, et de ses services financiers était nul voire négatif.
Le redressement du groupe sous la houlette de Luca de Meo, avec l'accent mis sur la maîtrise des coûts et sur la valeur plutôt que les volumes, a changé la donne.
Renault s'échange, certes, toujours à des multiples moins généreux que Volkswagen et Stellantis, c'est-à-dire 3,7 fois les bénéfices attendus en 2024, contre 4,6 pour l'allemand et 4,5 pour le groupe franco-italo-américain.
Mais l'action a clairement retrouvé de l'allant cette année. Depuis le 1er janvier, Renault prend 34,6%, ce qui constitue tout simplement la plus forte progression du CAC 40. Le groupe au losange est passé devant Safran jeudi, séance où le constructeur automobile a gagné 3,2%.
"Le marché est peut-être en train de se dire que Stellantis a bien progressé depuis plusieurs trimestres (+50% sur un an, NDLR) et il se met ainsi en recherche d'actions plus "value", avec plus de potentiel, comme Renault", estime un intermédiaire financier basé à Londres.
HSBC note, de son côté, que Renault signe la meilleure performance des constructeurs automobiles européens de sa couverture. La banque sino-britannique estime qu'il est difficile d'isoler une seule raison expliquant la progression du titre mais voit plutôt une conjonction de facteurs.
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Stop ou encore?
L'établissement évoque pêle-mêle l'absence du groupe en Chine où les perspectives sont moroses, l'environnement de prix et de volumes plutôt clément en Europe ou encore la plus grande confiance du marché dans la génération de cash du groupe. Renault avait d'ailleurs surpris les investisseurs, en publiant un flux de trésorerie nettement supérieur aux attentes au titre de 2023.
Deux autres points sont mentionnés par HSBC: l'annulation du projet d'introduction en Bourse d'Ampere (la filiale dédiée à l'électrique et aux logiciels) qui a simplifié la structure du groupe, et la confiance de la direction dans la capacité d'Ampere à nouer des collaborations avec d'autres constructeurs.
Comme pour tout rallye boursier, la question du potentiel boursier de Renault se pose. Et, sur ce point, les derniers avis d'analystes s'avèrent positifs.
Berenberg a réitéré la semaine dernière son opinion à l'achat et relevé son objectif de cours à 52 euros contre 47 euros auparavant (contre un cours de 49,7 euros actuellement).
La banque allemande apprécie les qualités défensives offertes par Renault sur ses marges. La rentabilité du groupe devrait, en effet, être soutenue cette année par une vague de lancements de nouveaux véhicules, plus rentables. Pas moins de dix sont prévus en 2024, avec parmi eux le Scenic E-Tech, le Rafale, la Renault 5, ou encore un nouveau Dacia Duster.
Certes, le marché des véhicules électriques connaît un coup de frein en Europe. Mais Renault peut tirer son épingle du jeudi."Bien que le marché des véhicules électriques à moteur reste difficile à court terme, nous pensons que Renault est relativement bien placé", avance Berenberg. "Sa Scenic EV est bien positionnée, moins cher que ses principaux concurrents" et la R5 qui doit être lancée plus tard dans l'année, "a reçu un accueil robuste de la part de la presse et des réseaux sociaux", poursuit la banque allemande.
Une note bientôt relevée?
En outre, Berenberg perçoit un catalyseur: le relèvement de la note de crédit du groupe par les agences de notation. Actuellement le constructeur est noté "Ba1" par Moody's et "BB+" par S&P, soit le dernier cran dans l'échelle de chaque agence avant la catégorie non spéculative ("investment grade"). La banque allemande estime qu'avec une meilleure génération de cash du groupe et une position de trésorerie plus élevée, Renault remplit désormais les critères pour revenir dans cette catégorie non spéculative. Un relèvement de note devrait permettre au groupe de se rapprocher de ses objectifs de distribution de dividende aux actionnaires. Le coupon de 1,85 euro par action proposé au titre de l'exercice 2023 représente un taux de distribution de 17,5% alors que la société cible 35% à moyen terme.
HSBC, de son côté, a remonté encore plus haut sa cible jeudi, passant de 47 euros 57 euros. La banque sino-britannique apprécie elle aussi la volonté du groupe de rendre davantage de cash à ses actionnaires et fait le même constat que Berenberg sur le potentiel relèvement de la note de crédit de la société.
"Une plus grande confiance dans la génération de cash et le retour (à l'actionnaire, NDLR) pourrait se traduire par une nouvelle amélioration des multiples boursiers" de Renault, explique-t-elle. HSBC s'attend à ce que Renault dégage régulièrement un flux de trésorerie de l'automobile de plus de 2,5 milliards d'euros par an. Ce que le marché n'a, d'après elle, pas intégré.
Au passage, HSBC vient tordre le cou à un cliché entourant le constructeur, trop facilement perçu comme un perdant de l'électrification et de la numérisation de l'automobile, selon la banque. Ce en raison de ses volumes limités ainsi que de son exposition au marché européen (70% de ses revenus) et à la concurrence chinoise.
Moins de pièces par voiture
"La réalité semble être tout à fait contraire. Grâce à Ampere, Renault a construit une base de fournisseurs largement européenne. C'est important car la logistique représente une part considérable des coûts, en particulier pour les véhicules électriques", avance la banque.
De plus, en matière de coûts dans l'électrique, "Renault semble s'en sortir assez bien, à égalité avec ses pairs, voire mieux", juge-t-elle. HSBC souligne que le groupe a nettement réduit le cycle de développement de ses véhicules, passant de quatre-cinq années à trois ans pour les derniers modèles (Renault 5, Scenic électrique) voire deux ans pour la Twingo électrique dont la sortie est attendue en 2026. Ces temps de développement sont comparables à ceux des constructeurs chinois, avance l'établissement.
HSBC apprécie aussi le fait que le groupe a réduit le nombre moyen de pièces par véhicules d'environ 2.400 à 1.100 pour la Megane E-tech et 700 pour la prochaine génération d'automobiles.
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