(BFM Bourse) - La banque américaine a relevé son conseil à l'achat sur l'action du constructeur automobile qui prend 5% et signe la plus forte progression du CAC 40 ce jeudi. Bank of America pense que le titre sera porté par une régulation moins exigeante en matière de Co2 et que la journée dédiée aux investisseurs de mars prochain peut constituer un catalyseur.
Comme à chaque mois décembre, les analystes établissent les perspectives de leur secteur pour l'année suivante. L'occasion pour les bureaux d'études de modifier ou confirmer leurs opinions sur les actions de leur couverture. Et de s'interroger sur le potentiel de chaque titre.
Concernant Renault, comme le dit la célèbre expression anglaise, "the jury is out" ("le débat est ouvert"). Mercredi, UBS, avait abaissé son conseil à "vendre" sur le titre, contre "neutre" précédemment, prévenant que la rentabilité du groupe s'effriterait dans les prochaines années en raison notamment de l'impact dilutif des ventes de véhicules électriques sur ses marges.
Ce jeudi, Bank of America prend le contre-pied total de sa consoeur. L'établissement américain a dressé ses perspectives pour le secteur automobile en 2026, profitant de l'occasion pour relever son opinion à "acheter" sur le titre contre "neutre" précédemment, tout en rehaussant son objectif de cours à 42 euros contre 38 euros.
Cette nouvelle cible accorde un potentiel de 20,7% à l'action Renault au cours de clôture de mercredi (34,8 euros).
Porté par ce relèvement d'opinion, Renault grimpe de 6,6% ce jeudi à la Bourse de Paris, signant la plus forte hausse du CAC 40.
Le marché a compris que les résultats baisseront
"Il ne faut pas grand-chose pour être plus optimiste à l'égard de Renault. La valorisation est très bon marché", résume Bank of America. Le titre ne s'échange que 4,3 fois les bénéfices attendus au cours des 12 prochains mois, soit 20% de moins que pour Stellantis. Et, en retraitant la position de trésorerie et la participation dans Nissan, le marché accorde une valorisation négative au groupe (plus exactement à ses activités automobiles et de financement), pointe Bank of America.
Renault a vu ses multiples boursiers se déprécier cette année, en raison notamment de plusieurs coups durs. Son sémillant directeur général, Luca de Meo , auteur d'un spectaculaire redressement chez le groupe au losange, a quitté la société pour prendre la direction de Kering. Le dirigeant a été remplacé par un de ses anciens lieutenants, François Provost. Renault a aussi émis en juillet un lourd avertissement sur résultats, en raison notamment de la faiblesse du marché des véhicules utilitaires en Europe. Le titre avait perdu 18,5% sur une seule séance.
Par ailleurs, les revenus du troisième trimestre, bien qu'en ligne avec les attentes, ont provoqué, en octobre, des inquiétudes sur une dégradation du "pricing" (l'environnement de prix) chez le groupe au losange.
Certes, Bank of America prévient qu'elle ne s'attend pas à une véritable amélioration des résultats de Renault en 2026. Au contraire même.
L'établissement table sur une baisse de la marge opérationnelle à 5,8% après 6,4% en 2025. Ce en raison notamment de la montée en puissance des revenus dégagés dans les pays émergents, en Inde particulièrement.
Si les ventes dans ces pays permettent de soigner la croissance, leur faible rentabilité dilue les marges de la société. Le raisonnement est le même avec la hausse de la part des véhicules électrique dans la répartition des ventes. Ce type de motorisation reste dilutive pour les marges des constructeurs.
"Cependant, étant donné que la direction a déjà signalé une baisse des résultats pour l'exercice 2026 lors de réunions avec les analystes, nous pensons que cela ne surprendra guère les investisseurs", nuance Bank of America.
Les assouplissements des normes Co2 comme moteur
L'établissement perçoit plusieurs autres moteurs pour déclencher une reprise du titre en Bourse. Bank of America cite le respect de l'objectif 2025 de marge opérationnelle de la société, soit 6,5%. L'établissement pense que cette cible sera difficile à tenir (il retient lui-même par prudence un taux de 6,4%). Mais la banque juge que l'entreprise y arrivera quand même.
"Nous pensons que certains investisseurs s'inquiètent encore d'un éventuel raté sur cette cible. Si les prévisions sont atteintes, un rallye de soulagement est même possible", juge Bank of America.
L'établissement estime également que la présentation du nouveau plan stratégique du groupe, prévue au premier trimestre 2026, pourrait constituer un catalyseur. La banque s'attend à ce que le directeur général, François Provost, prévienne que la rentabilité reculera en 2026 mais se redressera ensuite les années suivantes. Dans la mesure où les attentes sur l'évènement sont faibles, le marché pourrait réagir positivement à de telles annonces.
La banque avance par ailleurs un point important: la régulation en matière d'émissions de Co2. L’administration Trump entend largement desserrer la vis en la matière dans l'automobile en supprimant les amendes pour les constructeurs qui ne respecteraient pas les seuils.
Renault n'est pas présent aux États-Unis, mais son partenaire Nissan, dont il détient toujours un peu moins de 36% du capital demeure un acteur relativement important de ce marché (50% des revenus de Nissan proviennent de l'Amérique du Nord). Cette régulation plus favorable aux États-Unis devrait porter les résultats du groupe japonais, faire grimper son action à Tokyo et ainsi soutenir celle de Renault.
"Si ces facteurs conduisent à une reprise du cours de l'action Nissan, Renault devrait également en bénéficier, selon nous", explique la banque.
Bank of America s'attend aussi à des assouplissements du côté de l'Europe avec notamment un report de l'interdiction des véhicules à motorisation thermique ("ICE" pour "internal combustion engine") au-delà de 2040 (contre une date actuellement prévue en 2035).
"Dans un scénario extrême, les objectifs de CO₂ pour 2035 (qui exigent actuellement une réduction de 100%) pourraient être réduits de 50%", souligne Bank of America.
"Cela est particulièrement pertinent pour un secteur où les cours de nombreuses entreprises intègrent une disruption totale. Nous pensons que les actions les moins chères bénéficieront le plus de l'assouplissement réglementaire", comme celle de Renault, poursuit Bank of America.
Ces assouplissements devraient permettre aux ventes des véhicules thermiques de résister mieux que prévu et de porter la rentabilité des groupes.
D'où le fait que la banque intitule une partie de sa note consacrée au secteur "ICE, ICE, baby" en référence à la célèbre chanson du rappeur américain Vanilla Ice de 1990.
Pour revenir à Renault, "aucun autre constructeur ne devrait tirer davantage profit d'un assouplissement des réglementations européennes en matière d'émissions: Renault réalise environ 70% de ses ventes et 80% de son chiffre d'affaires en Europe", explique la banque.
"Par exemple, l'assouplissement des règles relatives au CO₂ pour les véhicules utilitaires légers contribuerait à préserver une source de profits essentielle, tandis que des ajustements similaires pour les voitures particulières, en particulier pour la marque Dacia, apporteraient un soulagement supplémentaire", poursuit-elle.
"Un assouplissement des réglementations en matière de sécurité serait également favorable à la gamme de petites voitures de Renault. De plus, Renault est bien placé pour bénéficier des nouvelles subventions allemandes pour les véhicules électriques, car ses véhicules électriques à batterie (R4, R5, Dacia Spring), proposés à des prix abordables, entrent parfaitement dans le cadre du programme", développe-t-il encore.
À noter que Bank of America peut également porter en Bourse Stellantis qui prend 3,5%. Certes, la banque a réaffirmé son opinion à "neutre" sur l'action. Mais elle se dit "optimiste" sur le redressement des activités de la société en Amérique du Nord, un élément qui demeure la clef de la revalorisation du constructeur franco-italo-américain.
Stellantis peut aussi être soutenu par l'administration Trump qui a décidé d'assouplir les normes en matière d'économies de carburant pour les modèles des années 2022 à 2031, selon Reuters. "Les gens veulent des voitures à essence", a déclaré Donald Trump, cité par l'agence.
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