(BFM Bourse) - Suivant la tendance de 2022, le marché mondial des introductions en Bourse a connu un trou d'air au premier trimestre de cette année. A fin mars, ces entreprises ont levé 60% de moins que sur les trois premiers mois de l'an passé.
Déjà en perte de vitesse l'an dernier, le marché des introductions en Bourse est loin d'être sorti de sa torpeur en ce début d'année 2023. A fin mars, moins de 300 entreprises - 299 exactement - se sont introduites en Bourse dans le monde contre 326 l'an passé, soit une baisse de 8%.
Mais c'est surtout les montants levés qui ont accusé le coup. L'ensemble de ces nouvelles sociétés n'ont levé que 21,5 milliards de dollars, soit 61% de moins qu'à la même période de 2022. Le contexte de marché n'est toujours pas propice à un renouvellement de la cote. Le manque de visibilité induit par les conditions actuelles de marché ont en effet limité les initiatives en la matière. "Le premier trimestre a été une nouvelle période de ralentissement dans un contexte de hausse des taux d'intérêt, d'inflation persistante et de turbulences inattendues dans le secteur bancaire mondial", rappelle Franck Sebag associé chez EY.
Une position toujours attentiste
En Asie-Pacifique, zone qui a représenté 59% des opérations dans le monde, les montants levés ont chuté de 70% au premier trimestre 2023. Là aussi, les opérateurs ont préféré adopter une posture attentiste avant d'entrevoir une éventuelle éclaircie pour lancer leur processus. "Hong Kong, qui est aussi habituellement une locomotive pour les nouvelles cotations, a été inhabituellement calme. Dans l'ensemble, la région Asie-Pacifique a adopté une attitude attentiste, les investisseurs restent prudents et attendant d'autres indicateurs de la reprise du marché", poursuit Franck Sebag.
Concernant la région EMEIA (Europe, Moyen Orient, Inde, Afrique), la situation n'est guère meilleure. La chute se poursuit avec des montants levés qui ont plongé de 36% dans un contexte où "de nombreuses sociétés ont retiré ou reporté leurs demandes d'introduction en Bourse en raison des conditions du marché".
Les piètres débuts boursiers des sociétés récemment arrivées sur la cote ont également de quoi refroidir à la fois les entreprises postulantes mais aussi les investisseurs de participer à ces levées de fonds. En France, Lepermislibre et Florentaise, les deux seules introductions en Bourse de l'année 2023, n'ont pas convaincu les investisseurs. Le spécialiste de l'apprentissage en ligne de la conduite a connu un parcours cahoteux, avec un titre qui avait chuté de plus de 40% en à peine un mois et demi de cotations avant de récemment reprendre le terrain concédé. Quant au spécialiste du terreau bas carbone, celui-ci a finalisé son opération non sans difficulté, pour faire ses premiers pas boursiers ce jeudi sur Euronext Growth, le compartiment dédié aux petites et moyennes entreprises.
L'étude trimestrielle du cabinet EY revient également sur l'effondrement des introductions en Bourse des SPAC, ces sociétés dites "chèque en blanc", qui sollicitent les marchés avec pour seul objectif de réaliser une ou des acquisitions. En vogue pendant les années 2020 et 2021, le nombre d'entrées en Bourse de ces sociétés si singulières s'est écroulé dès 2022. Le niveau élevé des liquidations et les mauvaises performances post-cotation des SPAC ont freiné l'appétit des investisseurs pour ce type de dossiers.
"Ce trimestre, l'activité des introductions en bourse de SPAC a atteint l'un de ses niveaux les plus bas de ces dernières années - elle a atteint son plus bas niveau depuis six ans en termes de volume, avec des valeurs également en baisse à des niveaux jamais vus depuis 2016", analyse Franck Sebag. "Comme les conditions de marché restent difficiles et que de nombreux promoteurs de SPAC cotées début 2021 doivent achever ou dénouer leurs transactions, l'activité d'introduction en bourse des SPAC devrait rester modérée à court terme" poursuit le spécialiste.
Des méga-introductions en Bourse malgré tout
Deux zones géographiques parviennent à s'extirper de cette morosité ambiante. Dans les Amériques, EY y relève une activité "conforme à celle du premier trimestre 2022", même "si elle est restée bien en deçà des niveaux observés au cours des périodes comparables de la dernière décennie. A fin mars, 40 opérations ont été réalisées dans la zone pour une valeur de 2,6 milliards de dollars, soit une hausse de 11% en volume et de 9% en valeur en glissement annuel. Les places américaines ont été le théâtre de l’essentiel des opérations avec 31 IPO, dont huit ont dépassé 50 millions de dollars. Par ailleurs, le Canada a connu sa plus importante introduction en bourse depuis mai 2022, avec une valeur de plus de 100 millions de dollars.
Si ce montant est déjà bien impressionnant, il reste toutefois modeste à comparer avec la méga-introduction en Bourse recensée ce trimestre au Moyen-Orient. Et c'est une société émiratie qui tient le record de la plus grosse opération depuis le début de l'année. La compagnie ADNOC Gas a levé plus de 2 milliards de dollars le mois dernier à la Bourse d'Abou Dhabi, dans un contexte favorable pour le secteur du gaz. L'offre a été sursouscrite 50 fois, suscitant une demande de plus de 116 milliards de dollars de la part des investisseurs.
Une lueur d'espoir
Faut-il dès à présent tirer un trait sur ce millésime 2023? Pour EY, une lueur d'espoir prend forme à l'horizon. Et celle-ci est annoncée pour la seconde partie de l'exercice en cours, avec le plafonnement de l'inflation, la baisse des prix de l'énergie et le rebond de l'économie de la Chine continentale. "Malgré l'incertitude persistante liée à l'environnement économique et géopolitique, le pipeline des introductions en Bourse continue de s'étoffer et l'espoir d'un retournement de situation dans le courant de l'année demeure" espère Franck Sebag.
Parmi les dossiers présents dans les tablettes, on peut citer la plateforme de médias sociaux Reddit qui vise une entrée en Bourse probablement au cours du second semestre. Un peu plus proche de nous, Renault par exemple a annoncé en novembre dernier vouloir introduire sur Euronext Paris Ampere, son entité dédiée à la production et à la commercialisation de véhicules électriques. Le communiqué de Renault évoque ainsi le second semestre 2023 "au plus tôt" comme date de l’introduction en Bourse. Thierry Piéton, de son côté, a même mentionné "la fin de l’année" 2023, en fonction des conditions de marché.
Rappelons également qu'Euronext a récemment dévoilé la liste des sociétés bénéficiant de son programme d'accompagnement dédié en vue d'une potentielle introduction en Bourse. En France, 39 sociétés ont rejoint ce programme. Parmi elles, des entreprises qui parlent au grand public dont Evaneos, le spécialiste des voyages sur mesure qui pourrait rejoindre Voyageurs du Monde, qui est lui coté en Bourse. On peut citer également Withings, le précurseur en matière de balances connectées et qui a étendu sa gamme de produits aux montres elles-aussi connectées.
Depuis début 2021, ce camp d'entrainement spécial jeunes pousses a permis l'éclosion en Bourse de plusieurs sociétés dont le spécialiste de la chimie verte Afyren ou de Broadpeak, le pro du streaming video.
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