(BFM Bourse) - Le spécialiste des analyses médicales et alimentaires a réfuté treize allégations du vendeur à découvert dans un communiqué détaillé et songe à ester en justice. L'action gagne un peu de terrain ce mercredi.
Eurofins avait prévenu. Attaqué la semaine dernière par le spécialiste de la vente à découvert Muddy Waters, le groupe d'analyses médicales et alimentaires avait fermement rejeté ses accusations, les jugeant "inexactes, non pertinentes, trompeuses ou partiales".
Le groupe avait indiqué qu'il publierait une réponse plus longue et détaillée face aux allégations de Muddy Waters. Pour rappel, le vendeur à découvert soupçonnait la société d'être "taillée pour la malversation". Muddy Waters estimait que le fondateur, directeur général et actionnaire de contrôle d'Eurofins, Gilles Martin, se constituait un patrimoine immobilier en "siphonnant" l'argent de la société. Le vendeur à découvert mettait également en cause la sincérité du cash de la société, s'étonnait de voir un revenu par employé aussi élevé chez Eurofins par rapport aux autres sociétés des TIC (tests, inspections, certifications) et soulevait également des doutes sur la politique d'acquisitions de la société.
Dans un long communiqué ce mardi, Eurofins bat en brèche les différentes accusations, en réfutant pas moins de treize points.
>> Accédez à nos analyses graphiques exclusives, et entrez dans la confidence du Portefeuille Trading
Un nouvel audit sur le cash?
Concernant l'allégation comme quoi Gilles Martin se serait constitué un patrimoine immobilier aux dépens d'Eurofins, la société la qualifie de "sans fondement", "diffamatoire" et qui néglige la gouvernance de la société.
Muddy Waters affirmait que Gilles Martin avait acquis nombre de propriétés immobilières auprès de sociétés qui avaient vendu des activités à Eurofins. Le dirigeant aurait ensuite loué les locaux à Eurofins avec un loyer "au-dessus du marché".
Eurofins répond en mettant en avant plusieurs points. En moyenne, le loyer payé par mètre carré par Eurofins auprès de bailleurs qui lui sont liés (ce que l'on appelle des "parties liées", comme Gilles Martin donc) s'élevait à 146 euros en 2023, en ligne avec celui payé à des bailleurs externes, de 144 euros. L'entreprise souligne aussi que toutes ces transactions de locations immobilières ont été évaluée par un comité de gouvernance spécifique depuis juin 2017, composé exclusivement d'administrateurs indépendants. Parmi les autres arguments soulevés par la société, Eurofins explique également ne pas avoir effectué d'acquisitions au cours des dix dernières années qui impliquaient que Gilles Martin rachète les locaux pour le relouer ensuite à Eurofins.
Au sujet de la comptabilité du cash de la société, Muddy Waters la jugeait "conçue pour maximiser la confusion et l'inexactitude". Eurofins répond que cela est "faux et diffamatoire", rappelant que la société d'audit Deloitte certifie ses comptes chaque année. Bien que cela ne soit "pas nécessaire", Eurofins envisage de "mandater une société d'audit à la réputation internationale pour réaliser un audit supplémentaire indépendant" sur la comptabilité de son cash pour l'exercice 2023.
Comparaison n'est pas toujours raison
Muddy Waters s'étonnait aussi des indicateurs de performance "trop beaux pour être vrai" d'Eurofins, citant le revenu par employé. Le vendeur à découvert le jugeait élevé par rapport aux autres sociétés du secteur des TIC (test, inspections et certifications), univers auquel appartient par exemple un groupe comme Bureau Veritas.
Eurofins pointe un biais dans l'analyse du vendeur à découvert, à savoir que Muddy Waters ne prend pas les bons comparables, avec des sociétés de TIC qui ne sont pas spécialisées dans l'analyse scientifiques. Le groupe français explique que ses revenus par employé (115.000 euros) se situent dans la moyenne d'autres entreprises qui sont bien plus proches de son modèle comme Charles River (175.000 euros), Labcorp (168.000 euros) et Synlab (98.000 euros).
Vers une augmentation des rachats d'actions
Outre ses contre-arguments, Eurofins souligne que le rapport de Muddy Waters avait été publié la semaine dernière lors du premier jour de la "quiet period" précédant ses résultats semestriels. "Cela n'a certainement pas été constructif pour le bon fonctionnement du marché, car cela a empêché Eurofins et sa direction de modifier ou d'émettre de nouvelles instructions de rachat d'actions", explique Eurofins.
En conséquence, la société songe à potentiellement augmenter "de manière significative" ses programmes actuels de rachats d'actions après la publication de ses résultats semestriels (le 24 juillet).
En creux, l'entreprise semble aussi ouvrir la voie à une action en justice contre les attaques de Muddy Waters.
"Eurofins sera également en contact étroit avec ses auditeurs dont le travail a été injustement remis en cause, ainsi qu'avec ses conseillers juridiques et les autorités de régulation compétentes pour répondre à toutes les allégations infondées et mettre en place toutes les actions nécessaires pour protéger les investisseurs et empêcher de nouvelles manipulations de marché", écrit l'entreprise.
A la Bourse de Paris l'action reprend 1% vers 17h20, signant la plus forte hausse du CAC 40. Elle évolue toutefois plus de 14% en dessous du cours qui avait précédé l'attaque d'Eurofins, le 24 juin dernier.
De son côté, Muddy Waters a publié un deuxième volet de son étude à charge contre le groupe dans le courant de mercredi après-midi, émettant notamment de nouveaux doutes sur sa comptabilité et soupçonnant la société de générer des "ventes fictives".
Dans une note publiée la semaine dernière, Oddo BHF, jugeait que deux conditions clés devront être remplies pour restaurer la confiance auprès du marché.
"Premièrement, l’histoire autour de l’immobilier des parties liées doit être résolue, sans quoi nous pensons que des controverses risqueront toujours de revenir, malgré les audits indépendants, ce qui est compréhensible pour une PME ou une ETI ne l’étant pas pour une large cap du CAC 40 selon nous. Deuxièmement, la performance opérationnelle doit s’améliorer, en particulier sur les marges et le FCF (flux de trésorerie libre, NDLR)", développait le courtier.
Recevez toutes les infos sur EUROFINS SCIENT. en temps réel :
Par « push » sur votre mobile grâce à l’application BFM Bourse
Par email