(BFM Bourse) - L'établissement est passé à l'achat sur le groupe de construction et de concessions, appréciant notamment son exposition à la transition énergétique, sa valorisation et un dividende qu'elle voit croître.
Parfois cité comme un prétendant à l'accession au CAC 40, Eiffage connaît une hausse très modérée en Bourse ces derniers mois. Le spécialiste de la construction et des concessions autoroutières et aéroportuaires s'adjuge à peine 3,7% sur un an contre 10% pour le SBF 120.
Néanmoins, Goldman Sachs juge que le rival de Vinci a les moyens d'accélérer ses gains au cours des prochains mois. La banque américaine est passée de "neutre" à "acheter" sur la valeur ce lundi, tout en réhaussant son objectif de cours à 132 euros contre 106 euros précédemment. Ce qui accorde un potentiel de plus d'environ 30% au titre, à la clôture de vendredi soir.
Ce changement d'opinion porte le groupe en Bourse, l'action Eiffage s'adjugeant 2,8% en fin de matinée, ce lundi.
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La transition énergétique prend corps
La banque américaine est notamment encouragée par l'exposition du groupe à la transition énergétique, qui a porté le carnet de commandes de ses divisions "énergie systèmes" (conception, exploitation et maintenance de systèmes et équipements en génies électriques, industriel, climatique et énergétique) et "infrastructures" (infrastructures terrestres et maritimes, travaux routiers). Le carnet de commandes de la division énergie est passé de 3 milliards d'euros en 2018-2019 à 6,5 milliards en 2023 et Goldman Sachs s'attend à ce qu'il dépasse 7 milliards d'euros cette année. Dans la division infrastructure, ce carnet d'ordres est passé de 6 milliards d'euros en 2018-2019 à 14 milliards en 2023.
"La majeure partie de cette croissance est due à des domaines tels que l'énergie nucléaire (contrat de 4 milliards d'euros en 2023 pour la construction des deux premiers réacteurs EPR2 en France), le rail (HS2, Rail Baltica, Grand Paris Express) et l'énergie éolienne en mer", souligne la banque.
Goldman Sachs estime que les revenus de ces deux divisions afficheront une croissance "mid to high single digit", soit entre 5% et 9% dans les années à venir avec "un niveau de visibilité sans précédent" lié aux grands gains de contrats. En conséquence, les résultats du groupe devraient progressivement s'améliorer, avec un impact qui deviendra plus évident sur la période 2026-2028, et des marges qui devraient s'améliorer.
La transition énergétique devrait représenter environ les deux-tiers du résultat opérationnel des activités "contracting" (pour simplifier les activités hors concessions) d'Eiffage en 2025-2026, estime Goldman Sachs. "Nous pensons que cela se traduira par une croissance des bénéfices plus élevée que celle attendue par le consensus dans les années à venir", souligne la banque.
Par ailleurs, Goldman Sachs juge le groupe fera progresser le retour à l'actionnaire, en se reposant sur une génération de trésorerie moins cyclique que par le passé, avec l'essor de sa branche énergie. De 4,1 euros par action en 2023 (versé en 2024), la banque retient un dividende de 6 euros par action en 2026, avec une croissance annuelle de 14%.
Remplacer les concessions, le grand défi
Alternativement, Eiffage pourrait utiliser son cash pour effectuer des acquisitions dans les infrastructures, renouveler son portefeuille d'actifs et ainsi "remplacer" sa participation dans APRR. "En supposant que cela se fasse conformément aux exigences de rendement normales de l'entreprise, nous nous attendons à ce que cela crée de la valeur toutes choses égales par ailleurs, tout en éliminant l'incertitude sur la stratégie l'allocation du capital et le profil des bénéfices du groupe à plus long terme", écrit Goldman Sachs.
Eiffage détient 52% d'APRR, son principal actif, dans les concessions autoroutières, une participation qui représente environ la moitié de la génération de trésorerie de la société, selon la banque américaine. Or la concession autoroutières d'APPRR vient à expiration en 2035, une échéance relativement proche dans le domaine des infrastructures (la concession du tunnel sous la Manche à Getlink expire, elle, en 2086, à titre de comparaison).
Depuis plusieurs années, le marché s'interroge sur la stratégie d'Eiffage pour faire face à la future fin de cette concession, se questionnant sur l'allocation du capital et le développement de nouvelles activités et concessions pour compenser cette expiration. Pour allonger la durée globale de son portefeuille de concession, Eiffage a par exemple acquis, à partir de 2018, une participation de 18,8% dans l'exploitant du tunnel sous la Manche, Getlink.
"'Remplacer APRR est le défi principal" d'Eiffage, écrit Goldman Sachs. En dehors de la croissance externe, la banque juge que la société pourrait aussi allonger la durée de la concession d'APRR en échange d'un plan d'investissement décarboné proposé qui sera décidé avec les pouvoirs publics français.
"Machine à cash oubliée"
In fine, Goldman Sachs juge qu'Eiffage devrait mettre fin à sa sous-performance. Le groupe évolue peu ou prou au même cours en Bourse qu'en 2018-2019, alors que son bénéfice par action a quasiment doublé depuis. Ce qui traduit donc une dépréciation des multiples boursiers de la société.
"Nous avons généralement été plus prudents sur l'action Eiffage ces dernières années, (..) étant donné le déclin naturel du multiple de valorisation que le marché est prêt à attribuer à la concession APRR à mesure qu'elle approche de l'échéance, et l'incertitude stratégique/le défi de réinvestissement posé par l'expiration imminente de l'APRR", rappelle Goldman Sachs.
"Cependant, à sa valorisation actuelle, nous pensons que ces éléments sont plus que pris en compte, alors que le mix des résultats s'est considérablement amélioré, avec la croissance des bénéfices liés à l'énergie, la participation de 20% dans Getlink et l'ajout de nouvelles concessions", conclut la banque
Les arguments formulés par Goldman Sachs avaient déjà été mis en avant par d'autres banques, ces derniers mois.
En mars, Bank of America jugeait que les inquiétudes du marché sur le portefeuille de concessions d'Eiffage étaient "exagérées", alors que le groupe parvient à augmenter la maturité de ce portefeuille, tout en gagnant d'importants contrats dans ses activités "contracting". Eiffage est "une machine à cash oubliée", soulignait la banque.
Le même mois, UBS dressait un constat similaire, notant également que son segment "construction" avait réussi à encaisser une récession importante dans la construction immobilière. L'action "est trop bon marché pour être ignorée", jugeait l'établissement helvétique.
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