(BFM Bourse) - L'Autorité de la concurrence a rendu un avis au gouvernement dans lequel elle estime qu'un plafonnement de ces commissions ne constitue pas la réponse "la plus adaptée". L'action Edenred progresse nettement à la Bourse de Paris en réaction à ces informations. Mais la mesure pourrait être prise par Bercy d'ici à la fin de l'année.
Une épée de Damoclès qui planait sur le marché des titres-restaurant ainsi que sur l'action Edenred (et dans une moindre mesure celle de Sodexo) semble s'évaporer.
Il y a deux semaines, le groupe spécialiste des solutions de paiement dans le monde du travail avait été malmené en Bourse, après qu'Olivia Grégoire, ministre déléguée en charge des PME, du commerce de l'artisanat, et du tourisme, avait menacé d'instaurer un plafond sur les commissions perçues par les émetteurs de titres-restaurant (Edenred, Sodexo mais aussi Up ou encore Swile).
La ministre avait indiqué que l'exécution de cette menace dépendrait du contenu d'un rapport demandé par ses services auprès de l'Autorité de la concurrence. Ces commissions "sont entre 3% et 5%, j'attends de voir très précisément ce que dit l'Autorité de la concurrence, mais s'il y a dysfonctionnement, nous les plafonnerons plutôt au plancher qu'au plafond", expliquait la ministre. L'action Edenred avait alors perdu près de 11% sur une séance.
Un plafonnement n'est pas la panacée
L'Autorité de la concurrence a justement remis son rapport ce mardi 17 octobre. "Si la question de l’instauration d’un plafonnement tarifaire peut légitimement être posée dans la mesure où elle peut constituer une réponse aux défaillances de certains marchés biface, elle ne constitue pas en l’espèce la réponse la plus adaptée en ce qu’elle ne corrigerait pas les dysfonctionnements constatés sur le marché des titres-restaurant et entraînerait des effets incertains", explique l'Autorité dans cet avis. Elle estime même qu'une telle mesure serait susceptible d'engendrer "des effets contre-productifs".
"L’expérience montre que généralement un 'plafond' devient en pratique un 'point focal', c’est-à-dire un prix vers lequel convergent les tarifs pratiqués par les entreprises concernées. Ainsi, tout émetteur dont les taux de commission acceptation étaient habituellement fixés en-deçà d’un tel plafond règlementaire aura tendance à aligner ses tarifs sur ce plafond, au détriment des consommateurs concernés", développe l'Autorité.
"De plus, les émetteurs pourraient chercher à compenser la perte encourue, soit en contournant la réglementation (augmentation de leurs marges face acceptation sur les prestations dont les tarifs resteraient libres), soit en augmentant leurs tarifs face émission (effet de compensation), avec in fine un risque de baisse de la demande pour les titres-restaurant", poursuit-elle.
"Par ailleurs, la définition du niveau de ce plafond, ainsi que le contrôle de son effectivité, soulèvent des questions délicates de mise en œuvre", estime également l'Autorité de la concurrence.
Elle préconise d'autres mesures au gouvernement, telles qu'une "régulation adaptée du marché des titres-restaurant, notamment par la mise en place d’un agrément des émetteurs et d’une publicité exhaustive des entreprises agréées". Autre piste évoquée par l'Autorité: "la recherche d’une solution structurelle visant à rééquilibrer le rapport de force sur le marché en mettant un terme au monopole exercé par chaque émetteur sur ses titres vis-à-vis des commerçants afin que ces derniers puissent disposer d’un véritable pouvoir de négociation".
Débouclage d'investisseurs 'shorts'
En conséquence, le gouvernement pourrait éviter d'instaurer un plafond, du moins dans l'immédiat. Contacté, Bercy a néanmoins expliqué à BFM Bourse qu'une concertation aura lieu avec les acteurs du secteur d'ici à la fin du mois. Une réforme du marché des titres-restaurant devra être mis en oeuvre d'ici à la fin de l'année, indique cette même source. Et d'ici là "toutes les options sont sur la table", indique Bercy, dont un plafonnement. Ce plafonnement pourrait servir de mesure transitoire en attendant que le marché des titres-restaurant soit totalement dématérialisé, soit en 2025-2026. D'autant que selon Bercy, l'Autorité de la concurrence a expliqué que légalement cette mesure était possible.
Pour l'heure le marché semble pousser un "ouf" de soulagement. Vers 10h10, l'action Edenred s'adjuge 4,8%, soit la plus forte hausse du CAC 40, après avoir ouvert en hausse de plus de 6,5%.
"Des fonds avait pris des positions 'short' (pour spéculer sur une baisse du titre, NDLR) et se retrouvent désormais obligés de défaire leur position (en rachetant l'action, NDLR) à la suite du rapport de l'Autorité de la concurrence", explique un analyste financier.
"Toutefois je pense que s'ils ont gagné une bataille ils n'ont pas gagné la guerre", poursuit-il. Car des mesures pour renforcer la concurrence pourraient être prises.
Le PDG d'Edenred, Bertrand Dumazy a néanmoins tendance à souligner régulièrement que son groupe aime la concurrence. "Vive la concurrence !", avait-il par exemple déclaré à propos de l'émergence de la fintech Swile, qui a un temps inquiété les investisseurs.
Rappelons que le directeur général France d'Edendred, Ilan Ouanounou, avait lui déclaré sur BFM Business qu'un plafonnement des commissions des titres restaurant n'avait "aucun sens" car ces commissions "sont très raisonnables". Le dirigeant jugeait également que le marché du titre-restaurant était "parfaitement concurrentiel" avec 13 émetteurs dont cinq gros. "Combien de marchés contiennent cinq gros émetteurs en France?", s'exclamait-il.
Recevez toutes les infos sur EDENRED en temps réel :
Par « push » sur votre mobile grâce à l’application BFM Bourse
Par email