(BFM Bourse) - L'association internationale de transport aérien a mis à jour son analyse des répercussions financières de la crise sanitaire et prévoit désormais un manque à gagner compris entre 63 et 113 milliards de dollars (contre 29 milliards auparavant) pour le secteur. La compagnie franco-néerlandaise plonge encore.
Un chemin de croix. C'est ce à quoi s'apparente l'année 2020 pour Air France-KLM. Aux premières loges de la crise sanitaire liée au coronavirus, la compagnie franco-néerlandaise ne cesse de creuser ses pertes à la Bourse de Paris, enregistrant un nouveau recul de 10,3% (plus mauvaise performance sur le SRD à ce stade) à 5,58 euros vers 12h45 jeudi, dans un volume d'échanges encore fourni représentant 2,2% du tour de table. Depuis le 1er janvier, le cours a plongé de plus de 43,7%. La valorisation boursière du groupe dirigé par le canadien Ben Smith chute ainsi à 2,39 milliards d'euros.
Dans le contexte actuel, Air France-KLM a tenté de rassurer ses clients mercredi en indiquant qu'il leur permettrait de reporter ou d'annuler sans frais tous les voyages réservés avant le 31 mars 2020 et prévus entre le 3 mars et le 31 mai prochain. Mais le contexte sectoriel, marqué par la faillite de Flybe, l'abaissement des prévisions de Norwegian ou la révision drastique des projections de l'IATA ne joue pas en sa faveur.
Le nouveau plongeon de l'action Air France-KLM fait suite à deux mauvaises nouvelles supplémentaires dans le secteur du transport aérien -qui souffre déjà de la suspension des vols vers et en provenance de Chine ainsi que d'une baisse massive de la fréquentation touristique. D'une part, la propagation de l'épidémie a donné le coup de grâce à Flybe, la compagnie aérienne régionale britannique déjà à court de liquidités depuis plusieurs semaines. D'autre part, les compagnies aériennes mondiales pourraient enregistrer jusqu'à 113 milliards de dollars de pertes de revenus dues à l'impact du nouveau coronavirus, selon les estimations mises à jour de l'Association internationale du transport aérien (IATA).
"La situation qui résulte du Covid-19 est presque sans précédent", a souligné le directeur général de l'Iata Alexandre de Juniac (PDG d'Air France entre 2013 et 2016), dans un communiqué publié à l'issue d'une réunion à Singapour. "En un peu plus de deux mois, les perspectives du secteur dans la plupart des régions du monde se sont radicalement assombries", a-t-il observé.
L'analyse mise à jour par l'IATA comprend deux scénarios (une propagation limitée vs. extensive) et l'association prévoit donc désormais pour 2020 des pertes de recettes mondiales pour le secteur du transport de passagers comprises entre 63 milliards de dollars (dans un scénario où la propagation du Covid-19 reste contenue dans les pays qui recensent déjà plus de 100 cas au 2 mars) et 113 milliards de dollars (dans un scénario avec une propagation plus large du Covid-19). Aucune estimation n'est encore disponible concernant l'impact sur les opérations de fret.
L'analyse précédente (publiée le 20 février dernier) estimait le manque à gagner à 29,3 milliards de dollars sur la base d'un scénario qui verrait l'impact de COVID-19 largement confiné aux marchés associés à la Chine. Sauf que, depuis, le virus s'est propagé à plus de 80 pays, poussant l'association à revoir ses prévisions. Celle-ci note d'ailleurs que les marchés "ont fortement réagi" à la propagation, "les titres des compagnies aériennes ayant chuté de près de 25% depuis le début de l'épidémie, soit 21 points de pourcentage de plus que la baisse survenue à un moment similaire lors de la crise du SRAS en 2003".
Et pour tenir compte de l'évolution de la situation, l'IATA a estimé l'impact potentiel sur les revenus des passagers. Dans le premier scénario, les pays actuellement les plus touchés enregistrent une nette diminution du nombre de cas "suivie d'une courbe de guérison en forme de V" et les pertes de revenus associées seraient alors de 24% pour l'Italie, 23% pour la Chine, 16% pour l'Iran, 14% pour la Corée du Sud, 12% pour le Japon et 10% pour la France et l'Allemagne.
"À l'échelle mondiale, cette baisse de la demande se traduit par une perte de 11% des revenus-voyageurs à travers le monde, soit 63 milliards de dollars. La Chine représenterait quelque 22 milliards de dollars de ce total" précise l'IATA.
Dans l'autre scénario envisagé, qui applique une méthodologie similaire mais pour tous les marchés où plus de 10 cas Covid-19 ont été confirmés au 2 mars, "il en résulte une perte de 19% des recettes mondiales provenant du transport de passagers, ce qui équivaut à 113 milliards de dollars", un manque à gagner "d'une ampleur équivalente à celle que le secteur a connue lors de la crise financière mondiale". Deux régions économiques seraient particulièrement touchées, l'Asie du Sud-est et l'Australie (-23% de trafic pour des pertes qui s'élèveraient à 49,7 milliards de dollars) et l'Europe de l'ouest (-24%, soit -37,3 milliards de dollars).
L'IATA ne fournit en revanche pas d'estimations chiffrées pour un scénario dans lequel la propagation du coronavirus accélérerait à travers le globe. On peut donc juger cette mise à jour plutôt optimiste.
Économies d'urgence
Si Lufthansa a été, mercredi, la première compagnie à annoncer publiquement des mesures de réductions des coûts destinées "à contrer les effets économiques du coronavirus", Air France et KLM ont également fait part en interne de mesures d'économies semblables, allant de la réduction des dépenses au gel des embauches.Le directeur financier du groupe franco-néerlandais Steven Zaat, a en effet annoncé un resserrement des dépenses, notamment sur les voyages, les réceptions et le recours à des consultants, ainsi qu'une poursuite du gel des embauches pour tous les services non directement liés aux opérations. Les campagnes de promotion et de marketing "non liées à la stimulation des ventes à court terme", sont également reportées, tout comme les services, invités à réduire leurs dépenses de fonctionnement "au niveau minimum".
Pour rappel, Air France-KLM avait avancé une première estimation du manque à gagner lié à la suspension des vols vers la Chine lors de sa présentation des résultats annuels, chiffré "entre 150 et 200 millions d'euros". La situation ayant nettement empiré depuis, ce chiffre est très certainement en-deçà de la réalité.
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