(BFM Bourse) - Certains créanciers obligataires ont refusé d'accepter les aménagements demandés par le groupe. En conséquence, la société va demander au président du tribunal de commerce des délais de grâce qui l'empêcheront de tomber en défaut durant la période de conciliation.
La restructuration financière de Casino n'est pas un long fleuve tranquille. Lourdement endetté, le groupe de distribution se trouve actuellement en procédure de conciliation pour renégocier sa lourde dette, qui représentait plus de 7,5 milliards d'euros (montant brut) au 28 juin. Cette procédure durera jusqu'à fin septembre voire fin octobre.
Pour se donner de l'oxygène et préserver ses liquidités, le groupe a dans le cadre de cette procédure pris un ensemble de décisions, nouant un accord avec l'Etat pour reporter des paiements de charges fiscales. Toujours dans l'optique de préserver le cash, les conciliateurs ont sollicité la suspension des paiements des intérêts et des échéances en principal sur la dette due par Casino auprès de ses créanciers. Ils leur ont également demandé de renoncer à "déclarer toute exigibilité anticipé sur le fondement d’éventuels cas de défaut au titre des covenants (les engagements en matière de ratio d'endettement d'un groupe auprès de ses créanciers, NDLR) financiers au 30 juin 2023 et 30 septembre 2023".
Problème: la société a annoncé ce lundi que certains créanciers, à savoir des porteurs d'obligations "high yield" (des obligations à haut rendement car mal notées par les agences de notations) de Casino ont refusé d'octroyé les aménagements demandés. Il en est de même pour les porteurs d'obligations émises par Monoprix Exploitation.
A la suite de ces refus, Casino a indiqué qu'il allait demander dans les prochains jours auprès du tribunal de commerce, l'application "de délais de grâce", ce qui concrètement lui permettra de ne pas tomber en défaut de paiement durant la période de conciliation.
Vers un bris de covenant?
Il y a effectivement matière à solliciter pareil mesure. Le refus des porteurs d'obligations "high yield" a plusieurs conséquences. Tout d'abord, cela signifie que Casino se retrouverait à payer des intérêts de 12 millions d'euros et 14 millions d'euros, venant à échéance les 15 juillet et 15 octobre prochains, respectivement.
De plus ce refus signifie que ces obligations (qui représentent un peu plus de 900 millions d'euros en principal, selon les indications de la société, le 28 juin dernier) pourraient se retrouver automatiquement exigibles (donc Casino devrait les rembourser immédiatement) "en cas de non-paiement au titre d’une autre dette financière significative (plus de 40 millions d'euros en principal) du groupe".
Or ce dernier risque existe. Casino explique avoir, à fin juin, intégralement tiré sa ligne de crédit renouvelable (RCF, "revolving credit facility"), ce qui devrait l'amener, selon ses prévisions, à ne pas respecter à fin juin un de ses "covenants", c'est-à-dire les engagements que la société prend auprès de ses créanciers en matière de ratio d'endettement. Et donc les obligations high yield deviendraient théoriquement exigibles.
La période de grâce, si elle est accordée, évitera néanmoins que des défauts surviennent pendant la durée de la conciliation, donc.
Une recapitalisation à plus d'1 milliard d'euros?
"Cette demande de grâce et le fait qu'ils ont tiré pleinement leur ligne de RCF (une ligne de crédit renouvelable, NDLR) montrent à quel point le groupe consomme du cash", souligne Clément Genelot, analyste chez Bryan Garnier & Co.
"Cela renforce l'idée qu'une injection de capital de 1 milliard d'euros risque de ne pas suffire vu là vitesse à laquelle le groupe brûle du cash. Car outre la restructuration, la société va devoir investir dans les prix et rénover des magasins", poursuit l'analyste.
"Il faudra voir les décisions des apporteurs en capital, s'ils décident de relever leurs offres ou, dans un premier de temps, d'identifier des actifs à céder. Il y a de très fortes chances pour que Monoprix soit mis en vente dans les prochains mois, d'autant que beaucoup de parties pourraient être intéressées", juge-t-il.
Deux propositions se sont déjà manifestées pour apporter des fonds au distributeur, la première émanant de l'homme d'affaires tchèque Daniel Kretinsky, et la seconde du trio Xavier Niel – Matthieu Pigasse – Moez-Alexandre Zouari. Ces deux propositions proposent des injections de fonds allant jusqu'à 1,1 milliard d'euros.
A la Bourse de Paris, l'action Casino a fortement reculé dans les premiers échanges (l'action perdait par exemple 11% vers 10h40) avant de remonter un peu la pente (-4,8% vers 14h05). En trois séance le titre a perdu près de 50%.
Casino avait prévenu qu'il comptait convertir en capital entre 4,5 milliards et 5,1 milliards d'euros de dettes. Mais la conversion de ces montants devrait probablement se faire avec une importante décote qui n'a pas encore été déterminée. A la dilution due à cette conversion s'ajoutera par ailleurs celle liée à l'injection de capital. Le groupe a fixé jusqu'à ce lundi soir l'échéance pour que des apporteurs en capital soumettent leurs offres.
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