(BFM Bourse) - Les groupes pétroliers et parapétroliers reculent à la Bourse de Paris après la décision des pays de l'Opep+ d'accélérer la hausse de leur production d'or noir.
C'est une décision qui vient encore plus perturber un marché du pétrole déjà très fragilisé. Les pays de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole et leurs alliés (l'Opep+) ont décidé ce week-end d'augmenter fortement la production de pétrole pour le mois de juin.
Samedi 3 mai, huit membres du cartel (l'Arabie saoudite, la Russie, l'Irak, les Émirats arabes unis, le Koweït, le Kazakhstan, l'Algérie et Oman), ont ainsi convenu d'accélérer leur production à 411.000 barils par jour pour le mois de juin, soit le même niveau qu'en mai. Ce niveau équivaut à "trois augmentations mensuelles", précise l'Opep dans un communiqué.
Lundi 5 mai, l'or noir a fortement baissé en réaction à ces annonces. Le contrat de juillet sur le Brent de mer du Nord abandonne 1,9% et celui de même échéance sur le WTI coté à New York lâche 2%. Les deux références de l'or noir évoluent à des plus bas de février 2021.
Les parapétrolières en souffrance
Comme souvent, lorsque les cours du pétrole varient fortement, plusieurs secteurs réagissent. Les groupes pétroliers et parapétroliers, dont l'activité dépend des prix du brut, commencent la semaine sous pression. Sur le SBF 120, Viridien redonne 5,80%, Technip Energies rend 3,90%, Maurel & Prom se replie de 2,7% quand Vallourec perd 2,40%. Valeur phare du CAC 40, Totalenergies contient son repli à 0,55%.
La major pétrolière avait déjà prévenu que le contexte de marché serait plus exigeant en 2025, à l'occasion de la publication de ses résultats trimestriels, le mercredi 30 avril.
"Les perspectives d'évolution de la demande de pétrole sur l'année 2025 sont en baisse alors que les pays de l’Opep+ (Organisation des pays exportateurs de pétrole et leurs alliés), ont indiqué vouloir poursuivre la trajectoire de remise sur le marché de certaines réductions volontaires de production au deuxième trimestre 2025", avait expliqué Totalenergies.
"En conséquence, les marchés du pétrole demeurent volatils entre 60 et 70 dollars le baril et les marges de raffinage et pétrochimiques devraient rester déprimées", avait alors poursuivi la société. totalenergies.com/fr/actualites/communiques-de-presse/totalenergies-publie-son-document-denregistrement-universel-2024">Dans son document d'enregistrement universel 2024, la société a aussi fait état d'un point-mort cash organique de 25,4 dollars par baril de Brent en 2024, avant dividende.
Le point mort cash organique avant dividende est défini comme le prix du Brent pour lequel la marge brute d’autofinancement couvre les investissements organiques, et mesure la capacité de la compagnie à résister à des variations de prix du baril de Brent, rappelle Totalenergies.
En revanche, les compagnies aériennes évoluent en hausse. À la Bourse de Paris, Air France-KLM progresse de 2,1%, quand Lufthansa gagne 1,8% à Francfort. Les groupes de transport aérien sont eux aussi sensibles à l'évolution des cours du pétrole car la facture carburant demeure l'un des principaux postes de dépenses des compagnies.
Selon le document d'enregistrement universel d'Air France-KLM, cette facture a représenté en 2024 un montant total de 6,73 milliards d'euros, en baisse de 5,6% par rapport à 2023. Au 10 janvier dernier, le groupe de transport aérien chiffrait qu'une hausse moyenne de 10 dollars du prix du baril de Brent conduirait à un alourdissement de cette facture de 487 millions de dollars (après couverture) et une baisse de même ampleur à une économie de 432 millions de dollars.
"Une bombe sur le marché pétrolier"
"L'Opep+ vient de lancer une bombe sur le marché pétrolier", a commenté Jorge Leon, de Rystad Energy auprès de l'AFP.
La décision du cartel surprend les marchés puisqu'en avril le groupe n'avait en effet ajouté que 138.000 barils quotidiens sur le marché, conformément à sa stratégie de réintroduction progressive de la production d'or noir, votée en décembre 2024. L'Opep+ "a décidé de procéder à une augmentation tout aussi agressive de l'offre pour le mois de juin", remarquent les économistes d'ING .
Le cartel élargi accélère donc la cadence, affirmant que "les fondamentaux du marché pétrolier étaient sains" pour justifier cette décision surprise.
"Après le signal du mois dernier, la décision (de samedi) envoie un message clair: le groupe change de stratégie et cherche à regagner des parts de marché après des années de coupes", ajoute le spécialiste de Rystad Energy. Jusqu'à la fin de l'année 2024, les pays producteurs, notamment l'Arabie saoudite, avaient mis en place des réductions de production pour soutenir les cours du pétrole et stabiliser ainsi le marché.
"Cette décision intervient dans un contexte d'incertitude accrue concernant les perspectives économiques américaines et mondiales, notamment en raison du manque de clarté quant à la trajectoire de la guerre commerciale en cours", rappelle Samer Hasn, analyste senior de marché chez XS.com.
Goldman Sachs s'attend de son côté à ce que l'Opep+ continue à inonder le marché de ses barils de pétrole en juillet. "Nous nous attendons toujours à ce que l'Opep+ mette en œuvre une augmentation finale de la production en juillet, mais nous prévoyons maintenant une augmentation de 0,41 million de barils par jour (mb/j) (contre 0,14 mb/j auparavant)", estiment-ils.
Goldman Sachs se dit convaincu que le "risque de récession fait peser des risques à la baisse sur les prix du pétrole, en dépit de fondamentaux relativement étroits sur le marché".
Les deux références de l'or noir sont sous pression, lestées par les craintes d'une récession mondiale provoquée par la guerre commerciale initiée par Donald Trump. Depuis le début de l'année, le prix du baril WTI et celui du Brent ont rendu près de 20%.
Un prix du baril au tapis favorisera-t-il de grandes manœuvres dans l'industrie pétrolière? Selon des informations rapportées par Bloomberg dans le week-end, l'anglo-néerlandais Shell lorgnerait son rival britannique BP.
"Shell travaille avec des conseillers pour évaluer une éventuelle acquisition de BP, bien qu'elle attende de nouvelles baisses des cours du pétrole avant de décider de poursuivre ou non une offre", a indiqué deux sources proches du dossier au média financier.
"La décision finale dépendra probablement de la poursuite de la chute du cours de l'action BP", ont ajouté ces mêmes sources à Bloomberg. Cette rumeur de rapprochement intervient au moment où BP est dans une situation délicate. Le géant pétrolier a en effet dévoilé la semaine passée, des résultats fortement dégradés.
Recevez toutes les infos sur VALLOUREC en temps réel :
Par « push » sur votre mobile grâce à l’application BFM Bourse
Par email