(BFM Bourse) - L'action a perdu 26% depuis mardi après que se soit répandu un rapport anonyme mettant non seulement en cause la fiabilité des comptes, comme cela avait été le cas en 2019, mais accusant carrément Solutions 30 d'être lié au blanchiment d'argent. Le fonds Muddy Waters remue le couteau dans la plaie vendredi matin en affirmant qu'un partenaire d'affaires a bien été condamné en Italie pour des liens avec la mafia.
Rien ne va plus pour Solutions 30, qui n'a d'autre recours vendredi matin que de demander à Euronext de suspendre les cotations sur son action face à "de nouvelles tentatives pour déstabiliser l'entreprise et ses actions". Depuis mardi soir, son cours a perdu 26% en deux séances alors qu'un rapport anonyme, transmis par un intermédiaire britannique, a été adressé à différents acteurs de la finance et des médias (dont ZoneBourse, qui a choisi de mettre ce document en ligne) en renouvelant des accusations auxquelles le groupe avait déjà fait face l'an dernier vis-à-vis de la tenue de ses comptes, mais y ajoutant de nouvelles.
En 114 pages, ce document dont les auteurs ne se sont toujours pas identifiés entend démontrer que Solutions 30 a de multiples liens avec des personnes condamnées au pénal pour blanchiment d'argent, et que l'entreprise a été partie prenante à de nombreuses transactions s'apparentant à du blanchiment d'argent, et affirme que la comptabilité de l'entreprise présente de nombreuses erreurs et que la rentabilité et les cash-flows revendiqués par Solutions 30 ne correspondent pas à la nature de son activité.
Muddy Waters accentue la pression
Vendredi matin, le fonds du vendeur à découvert Carson Block, Muddy Waters (qui entre autres faits d'armes avait notamment pris l'endettement de Casino pour cible, plusieurs années avant la procédure de sauvegarde des holdings du distributeur) est venu accentuer la pression sur Solutions 30, au travers d'une lettre ouverte à son PDG Gianbeppi Fortis.
Muddy Waters Capital rappelle détenir une position vendeuse sur Solutions 30 depuis mai 2019, ainsi qu'il l'avait annoncé à l'époque, et indique avoir pris connaissance attentivement aussi bien du rapport anonyme que de la réfutation initialement publiée mercredi par l'entreprise, puis celle plus détaillée de jeudi. Et selon le fonds, les réponses de Solutions 30 sont inexactes et omettent "les faits qui, selon nous, devraient être divulgués pour éviter d'induire les investisseurs en erreur".
A noter que le fonds dit ne pas être à l'origine du rapport anonyme, et n'avoir pas été prévenu de sa publication.
Parmi les accusations portées contre la société, immatriculée depuis 2013 au Luxembourg, ses relations d'affaires avec Angelo Zito, que le rapport qualifie d' "associé de la mafia et blanchisseur d’argent connu". Dans sa réponse, Solutions 30 a assuré qu'Angelo Zito, expert comptable luxembourgeois et associé de la Fiduciaire du Kiem, présentait un casier vierge de tout acte criminel, en précisant qu'une recherche externe avait mis en avant le fait qu'il ait été impliqué dans des procédures judiciaires liées à des enquêtes sur des liens avec la mafia à Palerme, mais que les charges avaient été résolues en 2000 via un acquittement anticipé.
"Cependant, deux articles de presse que nous avons trouvés indiquent qu'Angelo Zito, né le 7 juin 1953, a été arrêté, condamné et a purgé une peine de prison pour des crimes liés à la mafia", indique Muddy Waters, citant un acte de justice officiel. "Il apparaît que M. Zito a purgé un an et quatre mois pour association avec la mafia", avant de bénéficier ensuite d'un effacement de la condamnation de son casier judicaire, "mais d'après tous les témoignages, M. Zito a été inculpé, condamné et a purgé une peine de prison".
Des relations embarrassantes
Le vendeur à découvert affirme également qu'en avril 2016, dans le sillage de la publication par L'Expresso d'un article désignant Angelo Zito comme trésorier d'un clan mafieux, le président de Solutions 30 a changé d'auditeur pour sa société holding GIAS International (où sont logées ses parts de l'entreprise), passant de la Fiduciaire Beaumanoir, de M. Zito, à Mahilux, une entité contrôlée par un ancien employé de la Fiduciaire du Kiem, également contrôlée par M. Zito. "Il nous semble que vous avez tenté de maquiller votre relations à M. Zito, mais sans rompre en réalité cette association"
Muddy Waters pointe également les liens supposés de Solutions 30 avec un couple d'employés de la Fiduciaire du Kiem, M. et Mme Léger, via un fonds baptisé Aurore Invest, par qui aurait transité 3% du capital de CPCP Telecom, l'une des principales filiales de Solutions 30, à des conditions financières jugées par le vendeur à découvert contradictoires avec les comptes présentés.
Solutions 30 a par ailleurs mentionné dans sa réponse avoir, en vue de créer de nouvelles entités juridiques Brand 30 et WW Brand, "acquis, pour une somme modique, des sociétés écrans vides ("empty shell companies") auprès de la Fiduciaire du Kiem, ce qui est une pratique de marché courante". Muddy Waters affirme que préalablement à leur rachat par Solutions 30, ces entités ont été momentanément détenues par un certain Paul Kythreotis, dont la probité est sujette à caution selon le fonds.
"Malgré les réponses de la société, le marché reste dubitatif et Muddy Waters soulève de nouveaux points", observe Oddo BHF dans une note publiée vendredi matin. Compte tenu des informations disponibles à ce stade, le bureau d'études préfère suspendre sa recommandation sur le titre Solutions 30. "Seul un audit indépendant pourra définitivement restaurer la confiance", estime Oddo BHF.
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