(BFM Bourse) - Les deux constructeurs automobiles ont nettement progressé sur la place tokyoïte, ce mardi 24 décembre. Le titre Honda a surtout bénéficié de l'annonce de rachats d'actions colossaux, qui doivent envoyer un message de confiance.
Le marché semble accorder, pour le moment, le bénéfice du doute à la fusion entre Nissan et Honda. Les deux constructeurs japonais ont annoncé lundi entrer en discussions en vue d'une fusion qui se ferait via une holding commune. Cette opération, qui vise à créer un nouveau géant automobile suffisamment puissant pour résister à la concurrence des acteurs chinois et de Tesla, doit être finalisée d'ici à août 2026.
Les deux groupes avaient officialisé leurs fiançailles après la clôture de la Bourse de Tokyo, lundi. De sorte que la réaction de marché ne s'est observée que ce mardi 24 décembre.
Nissan a gagné 6% à la clôture de Tokyo. Une hausse remarquable dans la mesure où le titre, qui évoluait certes à la casse auparavant, avant déjà pris 23,7% le 18 décembre dernier, lorsque le quotidien japonais Nikkei avait rapporté l'existence de discussions entre les deux sociétés.
Depuis que ces informations de presse sont parues, l'action Nissan a bondi de plus de 40%. À la Bourse de Paris, Renault, qui détient 35,7% du capital de son allié japonais, prend 1,7% en début de séance, et signe la plus forte hausse du CAC 40.
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Nissan, grand bénéficiaire d'un sauvetage
La fusion entre les deux sociétés a pu être perçue comme une bouée de sauvetage lancée à Nissan, dont les résultats se sont dégradés, ces derniers trimestres. Le groupe a deux fois de suite abaissé ses prévisions de résultat opérationnel et de bénéfice net pour l'exercice actuel, et est parvenu de justesse à dégager une marge opérationnelle positive sur le premier semestre de son exercice (0,5%).
En novembre, la presse japonaise avait rapporté qu'un actionnaire activiste basé Hong Kong, Oasis Management, avait acquis des actions. Ce type de mouvement se produit lorsque des investisseurs cherchent des sociétés sous-valorisées qui ont besoin d'un électrochoc (un changement de stratégie ou de gouvernance, par exemple) pour se réveiller.
"Les deux constructeurs automobiles sont en difficulté en Chine (il est intéressant de noter qu'ils ont le même partenaire chinois, Dongfeng), mais Nissan est également confronté à des difficultés majeures aux États-Unis, où il a perdu des parts de marché, notamment parce qu'il a raté la vague hybride (Honda a eu plus de succès dans ce pays)", expliquait la semaine dernière Oddo BHF.
Les rachats d'actions massifs d'Honda
Lundi, le directeur général d'Honda Motors, Toshihiro Mibe, a dû répondre à plusieurs questions des journalistes japonais qui décrivaient la fusion comme un moyen de sauver Nissan. Le dirigeant a assuré que cette opération ne visait pas à "secourir" le groupe de Yokohama et a souligné que le lancement d'un plan de redressement par Nissan constituait une condition sine qua non à cette fusion. Le directeur général de Nissan, Makoto Uchida, a lui affirmé que ces fiançailles ne signifiaient pas que Nissan ne se remettrait pas en selle par ses propres moyens.
Honda a de son côté gagné 12,2% à la Bourse de Tokyo, ce mardi. Ce qui peut paraître paradoxal dans la mesure où Honda est perçu comme le consolidateur, et celui qui porte le plus de risques dans ce mariage. D'ailleurs l'action avait reculé de plus de 3% la semaine dernière, après les informations de Nikkei.
"Je ne sais pas pourquoi Honda a décidé de faire cela maintenant, avant que Nissan n'ait annoncé les détails de son plan de restructuration", a déclaré à Bloomberg Seiji Sugiura, analyste au Tokai Tokyo Intelligence Labotary ."Si l'on pense à tout ce que Honda devra gérer, c'est un peu inquiétant", a-t-il ajouté.
Concomitamment à l'annonce de ses fiançailles avec Nissan, Honda a réservé une bonne surprise à ses actionnaires, lundi.
Le constructeur automobile a indiqué qu'il rachèterait jusqu'à 1.100 milliards de yen, soit 6,7 milliards d'euros environ, de ses propres actions.
Bien que les rachats d'actions ne reviennent fondamentalement qu'à redistribuer du cash aux actionnaires (et en quelque sorte à leur redonner ce qu'ils possèdent déjà), ces opérations sont généralement bien perçues par le marché. Car elles entraînent mécaniquement une relution (un bénéfice par action plus élevé) et envoient un signal de confiance de la part de la direction.
"Le plan de rachat massif d'actions montre que Honda essaie de faire passer la pilule de la fusion avec Nissan pour les actionnaires", a écrit Julie Boote, analyste à la société Pelham Smithers, basée au Royaume-Uni, dans une note citée par Bloomberg.
Risques politiques
Pour rappel, les deux groupes ont indiqué dans une présentation viser des synergies annuelles liées à cette fusion de plus de 1.000 milliards de yens, soit environ 6,1 milliard d'euros, en rythme de croisière. Les actionnaires d'Honda, qui pèse quatre fois plus en Bourse que Nissan, devraient par ailleurs devenir largement majoritaire au sein de la holding qui réunira les deux sociétés.
Il faudra toutefois que la fusion aille au bout du processus, alors que les sociétés sont présentes sur les mêmes marchés. Ce qui laisse augurer de mesures de restructuration voire de suppressions de postes. Et donc d'une potentielle immixtion politique.
"Toute transaction pourrait s'avérer compliquée en raison de la possibilité pour les politiciens japonais de s'impliquer dans la perspective de suppressions d'emplois et parce que Nissan pourrait avoir besoin de se dégager de son lien avec Renault", soulignait la semaine dernière Russ Mould d'AJ Bell.
Renault détient 35,7% du capital de Nissan qui de son côté possède environ 15% de celui de Renault. Lundi, le groupe au losange a déclaré "prendre acte" des annonces de Nissan et Honda. La société basée à Boulogne-Billancourt a ajouté envisager, en tant qu'actionnaire principal de Nissan "toutes les options dans le meilleur intérêt du groupe et de ses parties prenantes".
La fusion entre les deux sociétés devraient être favorables au constructeur français, car elle lui donnera davantage d'options pour céder et donc monétiser sa participation dans Nissan. Elle lui permettra également, si Renault conserve tout ou partie de sa participation dans le nouvel ensemble, de bénéficier des meilleurs résultats attendus du nouvel ensemble, notamment des synergies permises par l'opération.
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