(BFM Bourse) - Le suisse Richemont a livré une performance terne au premier semestre de son exercice clos fin mars 2025, en raison de la détérioration de la demande en Chine. Des annonces qui placent les valeurs du luxe à Paris dans le dur, ce vendredi
La saison des résultats s'avère contrastée voire décevante pour le luxe. A Paris, Hermès a une nouvelle fois défié les lois de la gravité en livrant une croissance à deux chiffres au titre du troisième trimestre quand LVMH a dévoilé une baisse de ses revenus sur la même période (-3% en données comparables) et Kering a carrément vu ses ventes plonger (-16%).
Le suisse Richemont n'échappe pas à la morosité ambiante observée sur ce marché, touché de plein fouet par l'affaiblissement de la demande chinoise.
Sur son premier semestre clos à fin septembre, Richemont a dégagé des revenus de 10,1 milliards d'euros, en baisse de 1% en données publiées, et stables à changes constants. Le propriétaire de la marque Cartier a énormément souffert en Asie-Pacifique (APAC) où il a vu ses ventes chuter de 18% sur un an, hors effets de change.
L'ombre chinoise
Dans les autres régions, Richemont a enregistré de bonnes performances dans la zone "Amériques" (+11% à taux de changes constants) ainsi qu'en Europe (+5%), quand le Japon a connu une croissance tonique de 42% toujours à taux de changes constatants.
"L’exposition géographique équilibrée du groupe, bénéficiant de ses différents moteurs de croissance, permet ainsi de compenser la baisse des ventes de 19 % (à taux de changes courants) observée en Asie-Pacifique, dont la performance a été particulièrement affectée par la Chine", a indiqué Johann Rupert président du conseil d'administration dans un communiqué.
Par métiers, les ventes dans joaillerie sont en croissance de 4% hors effets de changes, quand celles de la division horlogerie ont chuté de 16% sur un an sur ces mêmes bases.
"Quand on regarde le segment bijouterie de Richemont, il affiche une croissance de 4% contre une baisse de 3% pour la division "horlogerie et bijoutier de LVMH. On voit que Cartier est clairement au-dessus et performe mieux que les marques de LVMH, Tiffany", souligne Jie Zhang, analyste chez le bureau d'études indépendant Alphavalue.
Un peu plus bas dans les comptes, le résultat d’exploitation courant ressort en baisse de 17% à taux de change réels ou de 12 % à taux de change constants, à 2,20 milliards d'euros. La marge opérationnelle correspondante s'effrite logiquement, de 410 points de base, soit 4,1 points de pourcentage sur un an à 21,9 %, contre 26% au premier semestre de l'année précédente.
Du côté du résultat net, celui-ci tombe à 457 millions d'euros, après 1,505 milliard d'euros l'an passé. Le propriétaire de la marque Cartier a été contraint de passer une perte de 1,3 milliard d’euros, principalement due à la dépréciation des actifs de Yoox-Net-A-Porter Group (Ynap), dont il a annoncé la cession à la société Mytheresa début octobre. .
"Dans l'ensemble, les résultats de Richemont ont été inférieurs aux attentes du consensus, tant au niveau du niveau du chiffre d'affaires (...) qu'au niveau du bas du compte de résultats (EBIT inférieur de 8,6% au premier semestre par rapport au consensus VisibleAlpha)", avance Morgan Stanley. "L'écart, à ces deux niveaux, est principalement dû à la division 'horlogerie spécialisée' dont les ventes ont baissé de -19% en glissement annuel au deuxième trimestre (contre -9% attendu), en raison de son exposition significative à l'Asie-Pacifique-Chine, ainsi que, selon le bureau d'études, de pertes probables de parts de marché".
Des prises de bénéfices
Sans surprise, ces comptes sont fraîchement accueillis puisque le titre du propriétaire des marques Cartier, Van Cleef & Arpels cède 5% à la Bourse de Zurich en fin de matinée ce vendredi.
Richemont entraine dans son sillage les valeurs du luxe à Paris. Lanterne rouge du CAC 40, Kering lâche près de 6% quand LVMH et Hermès perdent plus de 3%, vers 12h40.
Ces titres peuvent pâtir d'une lecture croisée négative des chiffres du groupe suisse. "L'ensemble du secteur du luxe peut chuter en Bourse, ce vendredi, sur les commentaires de la direction de Richemont. Johann Rupert, le président, a expliqué qu'il était confiant dans la capacité du groupe à naviguer dans le cycle actuel tout en étant toutefois 'prudent'. La bonne nouvelle, au vu de ses déclarations, c'est que le ralentissement reste cyclique. Mais la mauvaise c'est qu'il confirme qu'on est dans le bas de cycle. Or, comme l'a expliqué la direction, on a aucune visibilité sur le redressement de ce cycle", explique Jie Zhang.
"Le nouveau directeur général, Nicolas Bos, a aussi souligné le manque de visibilité en Chine, notamment sur la partie immobilière qui reste une pièce importante du puzzle de la richesse des Chinois", ajoute-t-elle.
Un autre analyste avance une autre explication possible: des prises de bénéfices. "Les valeurs du luxe avaient bien progressé ces dernières séances, notamment jeudi. Or il y a actuellement beaucoup d'éléments défavorables", indique-t-il.
"En Chine, la situation semble assez catastrophique, et on se demande si un changement structurel de la consommation des biens de luxe par les chinois n'est pas en train de s'opérer. Les taxes douanières aux Etats-Unis, voulues par Donald Trump, risquent de mettre les marges sous pression, si les groupes de luxe ne répercutent pas aux consommateurs ces surtaxes. Et l'Europe, elle, alourdit la fiscalité", développe cet analyste.
Par Sabrina Sadgui (avec Julien Marion)
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