(BFM Bourse) - Depuis mi-août, le rendement des bons du Trésor américain à dix ans est devenu inférieur à celui du deux ans. La courbe entre le rendement à trois mois et à dix ans s'était déjà inversée depuis le 22 mai. Historiquement, cette occurrence a toujours été suivi d'une récession économique.
Les inquiétudes liées à un ralentissement de la croissance mondiale provoquent une aversion au risque des investisseurs qui se répercute, à la baisse, sur les rendements obligataires. Vers 11h25 mercredi, le rendement des Treasuries à 10 ans recule ainsi de 2 points de base pour s'établir à 1,4777%, se rapprochant du creux de trois ans atteint lundi à 1,443%. Dans le même temps, les bons du Trésor américains à 2 ans rapportent 1,526%. L'écart de rendement entre ces deux maturités, l'un des plus surveillés par les marchés car traditionnellement annonciateur d'une récession économique, est le plus important depuis 2007 et la crise des subprimes. Le rendement des Treasuries à 30 ans est également tombé en séance à un plus bas historique de 1,906%, un taux en-deçà de celui des Bons du trésor américains à... 3 mois (!), de 1,995%.
Pour John Sharma, économiste chez National Australia Bank, "les gens commencent à se dire que l'économie ne va pas très bien et qu'il pourrait y avoir une récession, ou plus vraisemblablement un ralentissement économique, ce qui signifie que la Fed devra intervenir en baissant les taux". Selon le baromètre FedWatch, les marchés estiment à 100% la probabilité d'une baisse de taux lors de la prochaine réunion de l'institution monétaire américaine, en septembre.
Plus forte inversion du 3 mois - 10 ans depuis mars 2007
Plus inquiétant encore que l'inversion de la courbe des taux à deux et dix ans, qui s'est produite à plusieurs reprises au cours des deux dernières semaines, cela fait désormais plus de trois mois que l'inversion de la courbe des taux sur les bons du Trésor américains à dix ans et... trois mois est effective. Autrement dit, les investisseurs exigent actuellement des taux plus importants pour de l'argent immobilisé trois mois que dix ans, ce qui traduit un manque de confiance dans l'évolution de l'économie à court terme. L'écart de rendement entre ces deux maturités (10 ans contre 3 mois) est devenu négatif le 22 mai dernier, et le spread n'a cessé de se creuser depuis, atteignant plus de 50 points de base mercredi midi (1,995% pour les Treasuries à 3 mois contre 1,469% pour ceux à 10 ans).

Comme le montre le graphique ci-dessus, il s'agit seulement de la troisième inversion de la courbe des taux de ces deux maturités depuis 1995 et les deux premières -en 2000 puis en 2007- ont été suivies de périodes de récession économique. Celles-ci ont provoqué de lourdes chutes des marchés actions, comme on observe sur le S&P 500 (voir graphique). Selon Sven Henrich, si l'on se fie aux précédentes inversions de la courbe de ces taux, "le réel signal à surveiller est la brusque pentification de cette courbe", autrement dit lorsque la courbe des taux se raidit soudainement, donc quand le spread s'élargit. "Ce qui ne s'est pas encore produit puisque nous sommes encore en plein processus d'inversion" précise le trader.
Pour David Rosenberg, chef économiste et stratégiste chez Gluskin Sheff, l'inversion de cette courbe des taux à trois mois et dix ans constitue un indicateur fiable puisque, historiquement, à chaque fois que celle-ci a duré plus de trois mois, une récession économique est survenue dans la foulée.