(BFM Bourse) - La société danoise progresse après avoir livré des comptes légèrement au-dessus des attentes et ce malgré un abaissement de ses perspectives pour l'exercice en cours. Le marché s'attendait à cette dernière décision. La société va par ailleurs bénéficier dans les prochains mois de la fin des "copies" de ses médicaments anti-obésité.
Star européenne de la Bourse en 2023, le danois Novo Nordisk a perdu de sa superbe, récemment.
Son action chute de 27% depuis le début de l'année et même de 50% sur un an. Alors qu'il était encore solidement accroché à son siège de plus grande société européenne en Bourse (en capitalisation boursière), le groupe pharmaceutique a depuis cédé cette couronne à l'entreprise allemande de logiciels professionnels SAP. Ce dernier a depuis creusé l'écart et compte désormais une nette avance (environ 50 milliards d'euros) sur Novo Nordisk.
La société danoise a subi certains revers dans la spécialité à l'origine de son ascension boursière, à savoir les traitements anti-obésité et anti-diabète. En décembre, son cours de Bourse avait dévissé de plus de 20% après la communication de résultats d'essais de phase III (la dernière étape avant la commercialisation potentielle d'un médicament) décevants pour Cagrisema, un nouveau traitement anti-obésité.
D'autres résultats cliniques, survenus le 10 mars dernier, ont encore plombé l'action. Ces résultats concernaient encore Cagrisema, et portaient sur une population de patients différente (pas seulement des personnes en situation d'obésité et de surpoids mais aussi en situation de diabète de type 2). Les données communiquées par Novo Nordisk avaient fait état d'une perte de poids de 13,7% contre 3,4% pour les personnes traitées par placebo quand les investisseurs attendaient un taux de réduction d'environ 15%, selon Bank of America.
En parallèle de ces revers sur les essais cliniques, son concurrent américain, Eli Lilly, a lui obtenu un succès majeur. La société a publié, mi-avril, des résultats d'essais cliniques de phase III réussis pour l'oforglipron, un comprimé oral pour traiter le diabète et l'obésité.
Un médicament qualifié d'"Ozempic en pilule". Bank of America notait que tous les voyants étaient au vert, avec notamment une perte de poids de 8% en 40 jours. "La 'clé' de l'orforglipron est qu'il s'agit d'un médicament à 'petite molécule', ce qui signifie qu'il est facile à mettre à l'échelle et à produire", soulignait l'établissement.
Des copies de médicament anti-obésité
C'est dans ce contexte peu engageant que la société danoise a publié ses résultats du premier trimestre qui sont bien accueillis par le marché. L'action prend ainsi 2,3% à la Bourse de Copenhague en milieu d'après-midi.
Pourtant, Novo Nordisk a abaissé ses perspectives 2025 à l'occasion de cette publication. L'entreprise s'attendait auparavant à une croissance de son chiffre d'affaires (en couronnes danoises), de 16% à 24% hors effets de changes, et à une progression de son résultat opérationnel de 19% à 27%.
La société anticipe désormais une hausse située entre 13% et 21% pour le chiffre d'affaires et de 16% à 24% pour le résultat opérationnel.
Novo Nordisk a expliqué que l'abaissement de ces cibles était dû à "une pénétration plus faible" de ses traitements anti-obésité et anti-diabète aux États-Unis, en raison de l'impact des traitements GLP-1 dits "compounded", ce que l'on appelle en français "les préparations magistrales".
Le GLP-1 est une hormone qui joue un rôle important dans le traitement de la glycémie, et influe notamment le sentiment de satiété. Les "traitements GLP-1", contiennent des analogues du GLP-1 pour lutter contre le diabète et l'obésité. C'est le cas, par exemple, du Wegovy de Novo Nordisk qui contient du sémaglutide comme analogue.
Les traitements "compounded" sont, comme l'explique la Food and Drug Administration (FDA), l'autorité sanitaire américaine, des médicaments dont les ingrédients sont mélangés ou altérés de sorte à créer un nouveau traitement répondant à des besoins particuliers. Toutefois, ces médicaments ne sont pas reconnus par la FDA qui n'a évalué ni leur sécurité ni leur efficacité.
Ce type de médication est autorisé lorsqu'un traitement figure sur la liste des médicaments en pénurie de la FDA. Ce qui a été un temps le cas du Wegovy de Novo Nordisk et du Zepbound d'Eli Lilly, explique ABC News.
Dans les faits, ces "copies" de médicaments anti-obésité ont surtout été produites pour proposer des versions de ces traitements à moindre coût et attirer des Américains qui ne sont pas en mesure d'avoir accès à ces médicaments, en raison, notamment, de leur assurance-santé, note le New York Times.
La FDA avait d'ailleurs exprimé récemment des préoccupations sur les versions "compounded" des médicaments anti-obésité.
"La FDA est consciente que certains patients et professionnels de la santé peuvent se tourner vers des versions non approuvées de médicaments GLP-1 (…), comme option pour la perte de poids. Cela peut être risqué pour les patients, car les versions non approuvées ne sont pas soumises à l'examen de la FDA en termes de sécurité, d'efficacité et de qualité avant d'être commercialisées", écrivait-elle en mars.
Novo Nordisk évoque de son côté des traitements "illégaux", que le groupe entend, sans surprise combattre.
Un tiers du marché capté
C'est donc l'expansion de ces espèces de copies de médicaments anti-obésité qui plombent les perspectives de Novo Nordisk et a limité les prescriptions aux États-Unis pour Wegovy.
Cité par Reuters, le directeur général de Novo Nordisk , Lars Fruergaard Jorgensen, a estimé qu'environ un tiers du marché américain des médicaments avait été "capturé" par les médicaments dits "compounded".
Toutefois la FDA a sonné la fin de la récréation, les médicaments anti-obésité n'étant plus en rupture d'approvisionnement. L'autorité a donné jusqu'au 22 mai aux pharmacies qui produisaient ces versions "compounded" pour arrêter leur fabrication.
En conséquence, Novo Nordisk devrait retrouver la croissance dans ses prescriptions aux États-Unis, anticipe Jorgensen.
Le groupe bénéficiera aussi d'une récente décision de la société de la chaîne américaine de pharmacies CVS Health. Cette dernière a accepté de davantage distribuer Wegovy et de retirer le médicament concurrent, le Zepbound d'Eli Lilly, de sa liste de médicaments favorisés.
Pour revenir aux résultats de Novo Nordisk , la publication de ce mercredi est, in fine positive, juge, UBS.
La banque suisse s'attend à ce que les annonces de Novo Nordisk provoquent "un soulagement" chez les investisseurs.
Ces derniers avaient, selon elle, "largement" anticipé les abaissements d'objectifs de la société danoise. Les nouvelles prévisions de la société sont même plus élevées que ses propres projections, à savoir une croissance de 16% des revenus et de 19% pour le résultat opérationnel . Autrement dit, le mal est moins fort que redouté.
"Nous pensons que le débat principal (du marché, NDLR) portera sur la manière dont Novo Nordisk peut réaccélérer la dynamique commerciale sur le marché américain de l'obésité et sur le prix net de Wegovy aux États-Unis", commente la banque suisse "Le retrait progressif des préparations 'coumpounded' de sémaglutide aux États-Unis devrait également aider, mais les investisseurs s'interrogent toujours sur la rapidité avec laquelle (ces médicaments) quitteront effectivement le marché", explique UBS.
Les résultats de Novo Nordisk ont par ailleurs globalement battu les attentes au premier trimestre, avec un résultat opérationnel supérieur de 4,3% au consensus et un bénéfice par action qui a dépassé de 4,8% les attentes, selon Oddo BHF. De leur côté, les revenus ont été en ligne avec les attentes, portés par la croissance de 15% des ventes d'Ozempic, le médicament anti-diabète.
Au niveau de Wegovy, les revenus ont certes progressé de 83% hors effets de changes, mais ils ont été inférieurs de 7% aux attentes, en raison, justement de l'impact des médicaments "compounded", note Oddo BHF.