par Foo Yun Chee
BRUXELLES/WASHINGTON (Reuters) - La Commission européenne a infligé vendredi une amende de 2,95 milliards d'euros à Google pour pratiques anticoncurrentielles dans le cadre de l'usage de ses technologies publicitaires ("adtech").
Il s'agit de la quatrième amende infligée par la Commission européenne en dix ans au géant de la technologie, filiale du groupe Alphabet.
Cette amende fait suite à une plainte du Conseil des éditeurs européens et intervient alors que le président américain Donald Trump menace de prendre des mesures de rétorsion contre l'Union européenne (UE) en cas de pression contre les entreprises technologiques américaines.
Le locataire de la Maison blanche n'a d'ailleurs pas tardé à réagir, évoquant une décision "très injuste" et "discriminatoire".
"Nous ne pouvons pas laisser un telle chose arriver à l'Ingéniosité brillante et sans précédent des Américains et, si cela se produit, je serai obligé d'entamer une procédure en vertu de l'article 301 pour annuler les pénalités injustes imposées à ces sociétés américaines qui paient des impôts", a écrit Donald Trump sur son réseau social Truth, évoquant également les sanctions de l'UE à l'encontre d'Apple.
La section 301 de la loi sur le commerce extérieur des États-Unis de 1974 lui permet de pénaliser des pays étrangers se livrant à des actes "injustifiables", "déraisonnables", ou pesant sur le commerce américain.
Bien que Google ait l'intention de faire appel, la Commission a mis en garde contre des mesures plus sévères - y compris des cessions potentielles - si l'entreprise ne parvient pas à résoudre ses conflits d'intérêts.
L'autorité européenne de la concurrence avait initialement prévu d'annoncer l'amende contre Google lundi, mais la décision a été reportée en raison de l'opposition du commissaire européen au Commerce, Maros Sefcovic, qui s'inquiétait de l'impact des droits de douane américains sur le secteur automobile européen.
Selon la Commission, Google favorise depuis 2014 ses propres services de technologie de publicité en ligne au détriment de ses rivaux.
Elle a ordonné à Google de mettre fin à ses pratiques d'autoréférencement et de prendre des mesures pour mettre fin aux conflits d'intérêts inhérents. L'entreprise dispose de 60 jours pour informer la Commission de la manière dont elle entend se conformer à cette injonction.
La Commission a réitéré son avis préliminaire selon lequel Google devrait céder une partie de ses services, mais a déclaré qu'elle souhaitait d'abord entendre et évaluer les efforts déployés par la société pour se conformer à l'injonction.
"Google doit maintenant proposer une solution sérieuse pour résoudre ses conflits d'intérêts, et s'il ne le fait pas, nous n'hésiterons pas à imposer des mesures correctives sévères", a déclaré la commissaire à la Concurrence, Teresa Ribera, dans un communiqué.
Google a critiqué la décision de l'UE et entend la contester devant les tribunaux.
"La décision de la Commission européenne concernant nos services adtech est erronée et nous ferons appel. Elle impose une amende injustifiée et exige des changements qui nuiront à des milliers d'entreprises européennes en leur rendant la tâche plus difficile", a déclaré Lee-Anne Mulholland, vice-présidente des affaires réglementaires de Google, dans un communiqué.
"Il n'y a rien d'anticoncurrentiel dans le fait de fournir des services aux acheteurs et aux vendeurs de publicité, et il y a plus d'alternatives à nos services que jamais auparavant."
Google s'était déjà vu infliger par l'UE une amende record de 4,3 milliards d'euros en 2018, de 2,42 milliards d'euros en 2017 et de 1,49 milliard d'euros en 2019.
(Rédigé par Foo Yun Chee, avec Jasper Ward à Washington, version française Kate Entringer et Benjamin Mallet)
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