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Le sévère tour de vis de Trump sur les visas pour les employés étrangers change-t-il la donne pour la tech en Bourse?

Aujourd'hui à 07:00
Les géants de la tech fragilisés?

(BFM Bourse) - Le président américain a décidé d'appliquer des frais de 100.000 dollars aux visas dits "H1-B" qui permettent surtout aux employeurs américains de recruter de la main d'œuvre dans la tech, notamment indienne. Ces surcoûts risquent de peser sur les marges des sociétés de la Silicon Valley.

Depuis sa prise de fonction, mi-janvier, Donald Trump a soufflé le chaud et (surtout) le froid avec la tech américaine. Le locataire de la Maison Blanche a annoncé des investissements massifs dans l'IA et les data centers (le fameux projet "Stargate") mais aussi des surtaxes douanières qui renchérissent les coûts (notamment pour Apple avec l'iPhone) ou encore, dans lez cas de Nvidia et AMD, des contraintes à l'exportation de puces vers la Chine.

La semaine dernière, le président américain a sorti de son chapeau une autre mesure de nature à peser sur la Silicon Vallley. Donald Trump a sévèrement alourdi le coût des visas dits "H1-B", en décidant d'appliquer des frais de 100.000 dollars pour les nouvelles applications.

Ces visas H1-B permettent aux entreprises américaines de recruter des employés en dehors des ֤États-Unis dans des métiers spécialisés où une pénurie de main d'œuvre peut s'observer. Cela peut concerner des chercheurs dans les activités de défense mais aussi des top-models.

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Des visas surtout utilisés par la tech

Ces visas ont une durée de trois ans et peuvent être renouvelés pour trois années supplémentaires. Selon UBS, le coût actuel de ces visas va d'un minimum de 1.700 dollars à un maximum de 34,900 dollars, tous frais compris et en incluant l'extension de trois années supplémentaires.

Dans les faits, les visas H1-B sont surtout utilisés par les groupes américains pour recruter des salariés dans la tech.

Le document signé par Donald Trump affirme que la proportion des employés dans ce secteur bénéficiant de visas H-1B serait passée de 32% en 2003 à plus 65% "ces récentes années".

Selon des données officielles citées par le SHRM, une association de professionnels américains des ressources humaines, 71% des bénéficiaires de visas H1-B provenaient d'Inde en 2024, et 12% de Chine.

"Les plus gros employeurs de détenteurs de H-1B sont sans surprise les géants de la technologie. Amazon, Microsoft, Google, Apple, Meta ou encore Tesla comptent chacun plusieurs milliers de collaborateurs sous ce régime", explique John Plassard, conseiller en investissement chez Cité Gestion.

D'après des données officielles citées par Quartz , Amazon, Microsoft, Meta, Apple, Alphabet et Oracle compteraient chacun entre 12.391 (pour Amazon) et 2.092 (Oracle) salariés bénéficiant de ce visa.

L'idée de l'administration Trump reste simple. En renchérissant le coût de ces visas, l'exécutif américain veut pousser les grands groupes technologiques à davantage embaucher et former des salariés américains plutôt que de recruter à l'étranger. Il s'agit donc d'une mesure de préférence nationale.

"Le coût pour les entreprises est colossal: à 100.000 dollars par dossier, la facture annuelle pourrait dépasser 14 milliards de dollars pour les employeurs américains. Autant dire que la compétitivité américaine pourrait sortir affaiblie plutôt que renforcée", a écrit John Plassard dans une note publiée mardi.

Le secrétaire américain au Commerce, Howard Lutnick, a délibérément admis que le dispositif visait à "arrêter de faire venir des gens pour prendre nos emplois". Ce qui, au passage, n'a rien d'évident, les groupes américains pouvant tout simplement renforcer la charge de travail au Canada ou en "off-shore", c'est-à-dire en Inde directement.

Un impact à long terme?

Est-ce que, pour autant, ces surcoûts peuvent pénaliser les groupes de tech en Bourse et les faire dérailler de leur bonne marche, le Nasdaq Composite prenant 16% (*) depuis le début de l'année (et 25% sur six mois)?

Les investisseurs ont déjà apporté une forme de réponse. Lundi, première séance où le marché pouvait réagir à l'annonce de Trump, les groupes de tech n'ont pas connu de nette baisse. Le Nasdaq a même terminé en hausse de 0,7%, largement aidé par l'annonce d'un investissement massif de Nvidia dans OpenAI, qui pourrait aller jusqu'à 100 milliards de dollars.

Reuters rapporte que les analystes estiment que l'impact pour les groupes de tech devrait être "modéré" car la Maison Blanche a assuré que les frais de 100.000 dollars ne s'appliqueraient qu'aux nouvelles demandes et non pas aux renouvellements de visas H-1B.

À long terme toutefois, ces mêmes analystes préviennent que "la pénurie de main-d'œuvre qualifiée aux États-Unis pourrait entraîner une hausse des salaires et réduire les marges bénéficiaires" des groupes de tech, ajoute l'agence.

Interrogé par Quartz, Michael Kelly, de Reach Strategic, ne s'attend pas à ce que les actions du secteur souffrent à cout terme.

"À plus long terme, si la pénurie de talents entraîne des retards dans la production ou une pression sur les marges, cela pourrait peser sur les multiples de valorisation (des groupes de tech, NDLR). Les investisseurs suivront de près les informations relatives au recrutement", avertit néanmoins cet expert de marché.

Des grands groupes renforcés?

"La décision de relever à 100.000 dollars les frais liés au visa H-1B soulève des interrogations, mais elle ne signe pas forcément un tournant négatif pour la tech américaine", explique de son côté John Plassard.

"Certes, les grandes plateformes comme Google, Meta, Apple ou Microsoft devront ajuster leur politique de recrutement, mais leur puissance financière leur permettra d’absorber ce coût bien plus facilement que les petites structures ou les sociétés étrangères d’outsourcing. À court terme, la mesure pourrait donc renforcer leur position dominante, en réduisant la concurrence de prestataires indiens comme TCS, Infosys ou Wipro, dont le modèle repose sur l’envoi de talents aux États -Unis", décortique-t-il.

Selon Bloomberg, les entreprises technologiques indiennes ont effacé environ 10 milliards de dollars de capitalisation boursière, lundi.

"Pour les portefeuilles, ce contexte plaide pour distinguer les leaders capables de transformer la contrainte en avantage stratégique, des acteurs fragilisés par ce choc réglementaire", conclut John Plassard.

En dehors des groupes américains, la valeur française la plus susceptible d'être concernée par cette mesure reste Capgemini. Lundi, l'action de l'entreprise française de services numériques a reculé de 1,9%.

Dans une note publiée le même jour, UBS souligne que Capgemini n'avait que 349 nouvelles demandes de visas H-1B approuvées au titre de l'année 2025, contre environ 1.000 sur la moyenne des cinq années précédentes.

"Même s'il semble que Capgemini réduise déjà son recours au programme H-1B, si l'entreprise continuait à embaucher en moyenne 800 nouveaux employés titulaires d'un visa H-1B par an pendant trois ans, le coût supplémentaire avoisinerait les 80 millions de dollars, même si l'impact sur le compte de résultat serait d'un tiers de ce montant la première année, pour atteindre le montant total la troisième année", écrivait UBS.

Conclusion: "la réforme du visa H-1B du président Trump n'est pas importante pour Capgemini, mais elle peut changer la nature de l'industrie américaine des services informatiques et la concurrence pour les talents locaux", juge la banque suisse.

(*) Les variations ont été arrêtées peu après la clôture européenne de vendredi.

Julien Marion - ©2025 BFM Bourse
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