(BFM Bourse) - Le groupe de défense et d'aérospatial a publié des résultats supérieurs aux attentes à tous les étages, en particulier pour les commandes et le cash, ce lundi 4 mars. La société a décidé de verser un dividende plus élevé que le consensus.
C'est peu dire que les résultats annuels de Thales, publiés ce mardi 4 mars, s'inscrivent dans un contexte particulier.
Les dirigeants européens ont pris conscience qu'avec l'administration Trump, ils devaient moins compter sur les États-Unis et davantage sur eux-mêmes pour assurer leur sécurité. "Les récentes interactions entre le président ukrainien Zelensky et Donald Trump ont déclenché des alarmes sur les vulnérabilités de l'Europe en matière de défense", notait Alphavalue, lundi.
Les Européens ont multiplié les déclarations augurant d'un bond des dépenses militaires en Europe. Le président français, Emmanuel Macron, a évoqué une cible représentant 3% à 3,5% du PIB (contre une cible autour de 2% à l'heure actuelle pour l'Otan), le Royaume-Uni a passé une commande de 5.000 missiles de défense aérienne à Thales pour l'Ukraine. Précédemment, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen avait, elle, évoqué la possibilité de desserrer l'étau budgétaire européen pour augmenter les dépenses militaires. Et un consensus politique en Allemagne émerge pour allouer beaucoup plus de moyens à la défense.
Cet environnement favorable a entraîné un bond des valeurs de la défense, notamment de Thales. La société présidée et dirigée par Patrice Caine a gagné 16% lundi et 60% (à la clôture de lundi) depuis le début de l'année, la plus forte hausse du CAC 40.
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Forte croissance dans la défense fin 2024
L'envolée du titre se poursuit ce mardi après que la société a livré ses résultats. Thales grimpe de 9% vers 11h30, signant de très loin la plus forte hausse du CAC 40 et portant sa hausse depuis le début de l'année à 80%. Dassault Aviation, qui possède 29,9% du capital de Thales, avance de 3,5%.
Les autres sociétés de défense européennes progressent plus modestement (Rheinmetall gagne 3,5%, BAE Systems 1,6%, Leonardo 1,4%), ce qui suggère que la hausse de Thales a beaucoup à voir avec les résultats communiqués ce mardi.
Thales a battu les attentes à tous les étages, que ce soient les prises de commandes, la croissance du quatrième trimestre, la rentabilité, le cash-flow et même le dividende.
Sur l'ensemble de 2024, Thales a pris pour 25,3 milliards d'euros de commandes, traduisant une hausse de 6% en données comparables sur un an, et a dégagé des revenus de 20,58 milliards d'euros, en hausse de 8,3% en données comparables. Ce qui dépasse nettement les attentes des analystes, logées à 23,8 milliards d'euros pour les commandes et 20,14 milliards d'euros pour les revenus, selon un consensus compilé par l'entreprise.
Thales a fini l'année en trombe. Les prises de commandes ont, certes, reculé de 12% en données comparables mais elles se comparent à un quatrième trimestre 2023 qui avaient été exceptionnel (la croissance avait alors atteint 36%), avec notamment un méga-contrat de 1,8 milliard de livres au Royaume-Uni. Sur les trois derniers mois de 2024, Thales a engrangé 16 grandes commandes, notamment dans l'espace.
Les revenus ont, eux, affiché une croissance vigoureuse au quatrième trimestre, de 12,9% en données comparables. Thales a surtout bénéficié d'une progression stratosphérique de ses revenus dans la division défense (qui représente 58% du total) de 23,9% en données comparables.
Le directeur financier, Pascal Bouchiat, a prévenu que la performance dans la défense au quatrième trimestre n'était pas transposable aux prochains trimestres pour un certain nombre de raisons.
D'abord la société a bénéficié de livraisons de radios aux États-Unis qui étaient déjà prêtes mais attendaient un feu vert du client pour être remises à ce même client. Ensuite, Thales a été porté par une amélioration inattendue de la chaîne logistique sur la production d'un de ses produits phares à savoir les radars "ground master". Thales avait auparavant été pénalisé par des "stop and go" dans cette chaîne de production, si bien que la montée en puissance des livraisons au quatrième trimestre a été brutale, a expliqué Pascal Bouchiat.
Le cash surprend
Au-delà du chiffre d'affaires et des commandes, le résultat opérationnel ajusté de Thales a augmenté de 5,7% en données comparables, à 2,42 milliards d'euros, tandis que la marge correspondante s'est établie à 11,8% contre 11,6% en 2023. Ce qui est un peu supérieur aux attentes (2,35 milliards d'euros pour le montant et 11,7% pour le taux de marge).
Le bénéfice net a bondi de 39% à 1,42 milliard d'euros. Le flux de trésorerie opérationnel est resté stable à 2,03 milliards d'euros, mais a largement dépassé les attentes, qui étaient de 1,7 milliard d'euros.
Pour Oddo BHF, cette performance sur le cash constitue "la surprise principale de la publication". Cette génération de cash a été soutenue par "70 millions d'euros d'acomptes pour les commandes de Rafale en Serbie (les équipements de Thales représentent environ 20% à 25% de la valeur de l'avion de chasse, NDLR)" et reflète "l'excellente dynamique des commandes, l'effet de phasage sur les entrées de trésorerie liées à l'exécution des contrats, et la mobilisation du plan de trésorerie", développe Oddo BHF.
Fort de ces résultats, Thales a annoncé qu'il proposerait un dividende de 3,7 euros par action au titre de 2024, surpassant les attentes du consensus, qui étaient de 3,47 euros, selon Jefferies.
Concernant ses perspectives pour 2025, la société a indiqué tabler sur des prises de commandes supérieures au chiffre d'affaires, sur une croissance en données comparables située entre 5% et 6%, correspondant à des revenus compris entre 21,7 milliards et 21,9 milliards d'euros. La direction a précisé lors d'une conférence téléphonique avec des analystes attendre pour sa seule division défense une croissance comprise entre 6% et 7%. Thales table par ailleurs sur une marge opérationnelle ajustée comprise entre 12,2% et 12,4%.
Ces perspectives sont en ligne voire un peu supérieures aux attentes, les analystes tablant pour 2025 sur un chiffre d'affaires de 21,55 milliards d'euros et sur une marge opérationnelle de 12,3%.
Dans l'attente des contrats
Oddo BHF juge toutefois que les perspectives sur les revenus sont "encore plus conservatrices (prudentes, NDLR) qu'attendu". Jefferies souligne que ces cibles de revenus ne "reflètent probablement pas les derniers développements sur la défense".
Lors de la conférence téléphonique avec les analystes, la direction de Thales a, sans surprise, été assaillie de questions sur les déclarations des Européens sur les dépenses militaires.
Pascal Bouchiat a souligné que les perspectives communiquées par l'entreprise à moyen terme, à savoir une croissance de 6% à 7% par an sur la période 2024-2028, étaient basées sur l'environnement de l'époque (novembre 2024). Ces cibles n'intègrent donc pas une potentielle accélération des dépenses militaires telle que formulée récemment par les dirigeants européens.
Le directeur financier a expliqué que cette accélération potentielle n'aurait "probablement pas" d'impact majeur pour 2025, année durant laquelle le chiffre d'affaires dans la défense sera "essentiellement" réalisé à partir du carnet de commandes de l'entreprise. Mais pour la suite, la société accélérera à condition que les déclarations des dirigeants se traduisent effectivement par des commandes.
Patrice Caine, le PDG de Thales, a beaucoup insisté sur ce point. Thales a démontré par le passé sa capacité à augmenter ses capacités de production avec une hausse de la demande.
Mais l'entreprise ne continuera d'augmenter ces mêmes capacités qui si les "déclarations ambitieuses" des dirigeants se traduisent par des "contrats supplémentaires", a-t-il prévenu.
"C'est probablement là où il y a un écart entre les déclarations politiques qui assurent qu'il y a une volonté forte de dépenser plus", a-t-il affirmé. "Quand les contrats viendront nous serons prêts mais c'est inutile d'être prêt trop en avance", a ajouté Patrice Caine.
"The proof is in the pudding", a déclaré le dirigeant en anglais, ce que l'on peut traduire grossièrement par "on attend de juger sur pièces".
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