(BFM Bourse) - Le directeur général de Tesla a assuré sur X que les surtaxes douanières annoncées par l'administration Trump auraient des impacts "significatifs" sur le groupe automobile. Plusieurs bureaux d'étude, a contrario, estiment que le spécialiste des véhicules électriques a de bonnes chances de tirer son épingle du jeu, car sa production et ses approvisionnements sont extrêmement locaux.
À quel saint faut-il se vouer ? Elon Musk ou les analystes financiers? L'action Tesla a en tout cas chuté de 5,6% mercredi soir alors que des informations de presse très vite officialisées ont rapporté que les États-Unis instaureraient des droits de douanes supplémentaires de 25% sur l'ensemble des importations automobiles à compter du 3 avril. La taxation globale passera à 27,5%. Ce taux s'appliquera également aux camions et aux pièces clefs des voitures, comme les moteurs, ou les composants électriques.
Toutefois, le titre semble stabiliser son plongeon. En préouverture ce jeudi 27 mars, Tesla gagne 0,2% à Wall Street. Ce n'est pas du tout le cas des autres constructeurs automobiles américains. General Motors perd 6,5% en préouverture après avoir reculé de 3,1% mercredi. Ford de son côté abandonne 2,6% après avoir gagné 0,1% mercredi. Stellantis abandonne 1,8% après avoir chuté de 3,6%.
>> Accédez à nos analyses graphiques exclusives, et entrez dans la confidence du Portefeuille Trading
Des exemptions limitées
Sur son réseau social X (ex-Twitter), Elon Musk a lancé un avertissement, écrivant qu' "il est important de noter que Tesla n'est pas indemne". "L'impact des droits de douane sur Tesla reste important", a-t-il ajouté.
"Pour être clair, cela affectera les prix des pièces dans les automobiles Tesla qui proviennent d'autres pays (que les États-Unis, NDLR). L'impact en termes de coûts n'est pas trivial", a-t-il également écrit.
Comme le note Oddo BHF, des exemptions, certes limitées, existent pour les importations de pièces respectant les termes de l'accord de libre-échange USMCA (US-Mexico-Canada), accord de libre-échange qui a remplacé l'Alena. Mais ces exceptions ne dureront que le temps que l'administration Trump établisse un procédé pour appliquer des surtaxes sur les composants non états-uniens.
"Très peu d’acteurs semblent en mesure d’échapper à des répercussions négatives, avant même de possibles contremesures d’autres pays qui pourraient encore augmenter les impacts à l’échelle mondiale", souligne Oddo BHF. "Avec un prix de vente moyen de 50.000 dollars, le surcoût pourrait atteindre 5.000 à 10.000 dollars pour les véhicules importés et 5.000 dollars pour les véhicules assemblés aux États-Unis", chiffre le bureau d'études. Bernstein calcule un coût global total de 110 milliards de dollars.
Une forte coloration locale
Pourtant les analystes s'accordent à dire que Tesla est le groupe qui devrait le mieux s'en tirer. Tout simplement parce que la société produit localement. "Tesla serait moins exposée aux droits de douane car sa production et son assemblage se font entièrement aux États-Unis", expose Dan Ives de Wedbush.
Daniel Röska de Bernstein va plus loin qualifiant Tesla de "gagnant structurel clair" , grâce à sa production "localisée, sa forte part de marché et du fait que le groupe est davantage isolé que ses concurrents des risques commerciaux".
Selon l'analyste, plus de 60% de la valeur de ses pièces manufacturées équipant ses automobiles proviennent des États-Unis, le niveau le plus élevé de tous les constructeurs, 22% du Mexique et 7% du Canada et 10% dans le reste du monde. Ce taux, appelé RVC (pour "regional value content") est le grand paramètre à surveiller, car il va au-delà de la simple localisation de l'assemblage de l'automobile.
Avec cette base de production bien plus locale que ses concurrents "l'entreprise n'évite pas seulement la douleur, mais elle peut aussi gagner de la marge lorsque les concurrents augmentent leurs prix", poursuit Daniel Röska.
Tom Narayan de Royal Bank of Canada juge également que Tesla pourrait bénéficier de ces surtaxes douanières en raison de sa production totalement domestique mais aussi "de la concurrence des importations aux États-Unis". En clair, beaucoup de véhicule électrique vendus aux États-Unis sont importés et les surtaxes donneraient ainsi un avantage compétitif à Tesla.
Une vraie menace?
"Elon Musk est l'un des rares gagnants des tarifs douaniers de Trump sur l'auto", va jusqu'à titrer Bloomberg dans une analyse.
"Le fabricant de véhicules électriques possède de grandes usines en Californie et au Texas qui produisent toutes les voitures qu'il vend aux États-Unis, ce qui l'isole dans une plus large mesure des nouvelles taxes imposées par Trump sur les importations d'automobiles et les composants clés", rappelle l'agence. "Ses principaux rivaux, du sud-coréen Hyundai Motor Co. à l'allemand Volkswagen AG en passant par l'américain General Motors Co. seront bientôt confrontés à des coûts nettement plus élevés", ajoute-t-elle.
Reste à savoir également si ces tarifs douaniers seront réellement appliqués par Trump. "Nous continuons à penser qu'il s'agit d'une forme de négociation et que ces tarifs pourraient changer d'ici à la fin de la semaine", juge Dan Ives.
Si Tesla pourrait donc être bien plus immune que ses concurrents aux tarifs douaniers, la société a d'autres problèmes dans sa besace. Ses ventes chutent dans des régions, comme l'Europe (-40% sur un an en février ) et la Chine (87% en février selon Royal Bank of Canada). Tesla est pénalisée par une gamme de produits vieillissante. Le groupe a promis que de nouveaux modèles "plus abordables" seraient lancés cette année.
Depuis le début de l'année, l'action Tesla a également pu être plombée par les ambitions politiques d'Elon Musk, qui a décidé de piloter un département non officiel à Washington pour tailler à la hache dans les dépenses de l’État fédéral américain, ont pu inquiéter les investisseurs. Ce département est appelé "DOGE" pour "Department of governement efficiency". "En bref, le mot 'équilibre' a manqué à Elon Musk et à sa capacité à diriger Tesla en tant que directeur général....Au lieu de concentrer toute son énergie et son temps à conduire son initiative DOGE au sein de l'administration Trump", a déploré dans une récente note Dan Ives de Wedbush dans la note.
"Nous pensons qu'il s'agit d'un "moment de vérité" pour Musk et Tesla.... Si Musk continue à suivre la voie de DOGE à 110% et à ne pas s'occuper de Tesla pendant cette période de turbulences, les dommages causés à la marque deviendront de plus en plus importants, car actuellement notre travail sur le terrain montre que moins de 5% (très limité) des propriétaires de Tesla hésiteraient à acheter à nouveau une Tesla à cause de Musk", décortiquait l'analyste.
Recevez toutes les infos sur TESLA INC. en temps réel :
Par « push » sur votre mobile grâce à l’application BFM Bourse
Par email