(BFM Bourse) - Le groupe a donné le coup d'envoi de son service de taxi sans chauffeur, dimanche 23 juin. Sans provoquer un enthousiasme débordant, l'évènement est relativement bien reçu par le marché. Selon UBS, ce service de robotaxis pourrait générer 200 milliards de dollars de revenus à l'horizon 2040.

Tesla a donné le go à son service de robotaxis. Le spécialiste des véhicules électriques a tenu un évènement dimanche, invitant des personnes triées sur le volet pour leur présenter les débuts de cette offre cruciale pour son avenir.

Une dizaine de véhicules ont été déployés dans la ville d'Austin, au Texas. Elon Musk avait prévenu, ces derniers mois, que les premiers pas de ce service seraient prudents, avant une montée en puissance. Les robotaxis doivent être déployés dans d'autres villes américaines plus tard dans l'année. Le développement du service à grande échelle est lui prévu en 2026.

Sur X (ex-Twitter), Elon Musk a estimé dimanche que le lancement des robotaxis représentait "le point culminant d'une décennie de travail".

Le directeur général de Tesla a relayé pléthore de messages sur X d'utilisateurs qui ont signalé que la virée à bord des robotaxis s'était déroulée sans souci.

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Wall Street ne s'emballe pas

Dan Ives, analyste chez Wedbush connu pour son enthousiasme prononcé sur la tech, a été convaincu. Le spécialiste de marché a été invité et a eu l'opportunité d'effectuer plusieurs trajets à bord de ces véhicules autonomes.

"Un opérateur Tesla était assis sur le siège passager avant du robotaxi, mais il n'a pas été autorisé à commenter quoi que ce soit et n'a pas non plus influencé la voiture de quelque manière que ce soit. Nous nous attendions à être impressionnés, mais en repartant, tout ce qu'il y a à dire, c'est qu'il s'agit de l'avenir", a -t-il écrit dans une note

"Nous avons fait deux trajets d'environ 15 minutes autour d'Austin et ce qu'il faut retenir, c'est que l'expérience a été confortable, sûre et personnalisée. Le trajet lui-même s'est déroulé en douceur et il était impossible de distinguer que la voiture était sans conducteur, car à aucun moment nous n'avons eu l'impression qu'elle avait fait quelque chose d'irrationnel", a-t-il assuré.

Le marché, lui, fait montre de prudence. Dans les échanges de préouverture, ce lundi 23 juin, l'action Tesla limite sa progression à 1%. C'est toujours mieux que le "robotaxi day" que Tesla avait organisé à l'automne dernier. Le titre avait alors chuté de 8,8% lors de la séance suivant cette conférence, les investisseurs jugeant alors que cette présentation avait manqué de substance.

1.000 milliards de dollars de valorisation pour les services d'autonomie?

Les premiers pas du service de robotaxis se sont donc déroulés à priori sans encombre, dimanche. Pour autant, ce lancement prudent et très contrôlé ne présage pas du succès du déploiement à grande échelle. Tenir compte des spécificités des États américains et des villes où le service sera implémentés constitue l'un des défis auquel le groupe fait face.

Selon Philip Koopman, professeur d'ingénierie informatique à l'université Carnegie Mellon interrogé par Reuters, spécialisé dans la technologie des véhicules autonomes, il faudra des années, voire des décennies, pour que Tesla et ses rivaux en matière de conduite autonome développent pleinement une industrie du robotaxi. Un essai réussi à Austin pour Tesla, a-t-il dit à l'agence, serait "la fin du début - et non le début de la fin".

La réglementation peut constituer un point d'écueil. Comme le remarque CNBC, Tesla lance ce service au moment où le gouverneur républicain du Texas, Greg Abbott, a signé une législation permettant d'opérer des véhicules autonomes avec l'accord de l'État. Cette mesure ne doit toutefois entrer en vigueur que le 1er septembre et un groupe de parlementaires démocrates de l'État avaient demandé à Tesla de décaler les essais sur son service de robotaxis.

CNBC note également que dans certains États, comme la Californie, les autorités demandent de nombreuses données pour donner le feu vert à des essais de voitures autonomes. Au Texas, selon le média américain, l'opérateur doit simplement attester qu'il est en mesure d'assurer ce service "en toute sécurité". Il doit également fournir à la police des informations pour gérer les situation critiques en cas d'urgence.

Pour Tesla, l'enjeu s'avère évidemment crucial. La valorisation actuelle du groupe, autour de 1.000 milliards de dollars, ne repose pas tant sur les activités actuelles de la société que sur ses futurs revenus tirés de ses promesses en matière d'avancée technologiques et d'autonomie.

Elon Musk avait lui-même jugé par le passé que la conduite autonome constituait le facteur essentiel dans la capitalisation boursière de Tesla. "Les valorisations sont parfois étranges. (…) Je pense que la valeur de l'entreprise dépend avant tout de l'autonomie", avait-il estimé en 2023 à Paris.

Dan Ives considère que les différentes technologies de véhicule autonome et d'intelligence artificielle de Tesla pourraient, à terme, représenter 1.000 milliards de valeur en Bourse pour Tesla, soit autant que la capitalisation boursière de la société actuellement.

Une valorisation tendue pour Tesla?

"Les robotsaxis sont critiques dans la thèse d'investissement de Tesla", a écrit Tom Narayan, analyste chez Royal Bank of Canada Capital dans une note citée par Bloomberg. Environ 60% de la valorisation de la capitalisation boursière par l'analyste est attribuable aux véhicules autonomes.

Dans une note très détaillée et publiée ce lundi, la banque UBS, elle, estime que Tesla est "bien positionnée" sur le marché de services de Robotaxi, notamment en raison de son modèle vertical, avec des technologies propres, comme les logiciels.

Sur la base d'un certain nombre d'hypothèses, notamment l'absence de problèmes réglementaires, technologiques ou d'acceptabilité de la part des consommateurs, l'établissement suisse calcule une opportunité "significative". UBS arrive à une flotte totale de 2,3 millions de véhicules Tesla mis en services d'ici à 2040 pour des revenus totaux à cet horizon de 200 milliards de dollars.

Mais, dans cette même note, UBS pose une question pertinente. Aussi grande soit cette opportunité, n'est-elle pas déjà intégrée dans le cours de Bourse de Tesla? Pour la banque, oui, clairement.

UBS estime que les services de robotaxis peuvent représenter 350 milliards de dollars de capitalisation, ou 99 dollars par action à l'heure actuelle. La banque suisse évalue l'activité "énergie" de la société à 19 dollars par action et la division automobile pure à 25 dollars par action.

L'établissement ajoute une prime pour les savoir-faire annexes du groupe, telle que l'intelligence artificielle ou les futurs robots humanoïdes Optimus, dévoilés par la société à l'automne. UBS calcule cette prime autour de 71 dollars par action, ce qui donne un cours total (théorique) dans ses estimations de 215 dollars alors que l'action Tesla s'échange actuellement autour de 325-326 dollars.

Conclusion d'UBS: il y a de de quoi se montrer "prudent" sur la valorisation actuelle de Tesla.