par Matthieu Protard
PARIS (Reuters) - La Société générale s'est retrouvée lundi dans une nouvelle tourmente après la révélation par Libération de possibles nouvelles pertes dans ses activités de gestion d'actifs, que la banque française a toutefois démenties.
Les analystes étaient partagés sur ces informations. Si certains jugent les calculs de Libération exagérés voire erronés, d'autres s'interrogent sur l'ampleur des dépréciations que la banque, déjà ébranlée l'an dernier par l'affaire Kerviel, doit encore passer dans ses comptes.
Vers 13h40, le titre Socgen abandonnait 4,04% à 36,80 euros après avoir ouvert en baisse de 5,21%, dans un marché où les valeurs bancaires sont pour la plupart en recul.
Au même moment, l'indice sectoriel DJ Stoxx des banques européennes cédait 2,14%, avec un CAC 40 en repli de 1,43%.
Selon Libération, la Société générale pourrait perdre jusqu'à 10 milliards d'euros en raison des dépréciations passées dans le portefeuille de sa filiale de gestion alternative Sgam (Société générale Asset Management) Alternative Investments.
Le journal, qui consacre quatre pages à cette nouvelle affaire, estime que l'équipe de cette filiale a procédé à des "investissements hasardeux dans ce qu'on appelle des produits structurés".
La Société générale a "formellement" démenti dès dimanche soir les articles du quotidien, arguant d'une "confusion entre des pertes et le montant d'actifs transférés en 2008 des Opcvm de SGAM vers Société générale".
La banque explique que sa filiale de gestion d'actifs lui a transféré en 2008 un portefeuille d'actifs financiers de 11,2 milliards d'euros, sans toutefois préciser ce qu'est devenu ce portefeuille. Une porte-parole de la Socgen n'a pas été en mesure lundi d'apporter de plus amples informations.
INTERROGATIONS D'ANALYSTES SUR LES ACTIFS TOXIQUES
L'Autorité des marchés financiers (AMF), qui surveille les sociétés de gestion, a fait savoir qu'elle avait été informée de la décision de la Socgen de transférer des actifs de sa filiale.
"Dans le cadre des contrôles menés actuellement sur les sociétés de gestion, ce type d'opérations de soutien aux fonds est examiné de près par l'AMF", a fait savoir à Reuters une porte-parole de l'AMF.
La Banque de France, autorité de contrôle des banques, s'est en revanche abstenue de tout commentaire.
Ces révélations relancent les interrogations sur l'ampleur des actifs toxiques dans les bilans des banques.
"Il n'y a pas de fumée sans feu", estime néanmoins Arnaud Scarpaci, gérant de portefeuilles chez Agilis Gestion.
Selon Libération, qui se réfère aux états financiers de la banque, le portefeuille transféré, initialement valorisé à 11,2 milliards d'euros, ne valait plus que 5,3 milliards d'euros fin 2008 et le quotidien laisse entendre que les actifs restants "ne valent rien".
"Les montants de pertes passées indiqués par Libération sont erronés et les pertes futures évoquées (...) très exagérées et polémiques selon nous", estime de son côté Pierre Chédeville, analyste financier chez CM CIC Securities, dans une note.
"Ces révélations soulèvent des interrogations sur la valorisation des actifs toxiques du groupe. Nous pensons que la Socgen doit encore déprécier des actifs à hauteur de 5 milliards d'euros pour avoir des valorisations en ligne avec les prix du marché", estime l'analyste d'un courtier parisien qui a requis l'anonymat.
En janvier 2008, la Socgen avait défrayé la chronique en révélant une perte de trading lui ayant coûté 4,9 milliards d'euros, la plus importante de l'histoire de la finance mondiale, suite à des prises de positions imputées au trader Jérôme Kerviel.
ÉTAT-MAJOR DE LA GESTION D'ACTIFS REMANIÉ EN SEPTEMBRE 2008
Touchée dès 2007 par la crise sur les marchés du crédit, la gestion d'actifs de la Socgen a été placée courant 2008 sous revue stratégique, avant que la banque ne procède à une refonte complète de l'état-major de ces activités.
L'ancien patron de la banque de financement et d'investissement (BFI), Jean-Pierre Mustier, prend en septembre 2008 les commandes du pôle GIMS (gestion d'actifs et services aux investisseurs) et de Sgam, pour y remplacer les deux principaux dirigeants, Philippe Collas et Alain Clot.
Philippe Collas, ancien responsable du pôle GIMS, devient conseiller du directeur général Frédéric Oudéa tandis qu'Alain Clot, l'ancien président de Sgam, est nommé directeur général délégué de Crédit du Nord, filiale à 80% de la Société générale.
En janvier 2009, la Société générale franchit une nouvelle étape dans la restructuration de sa gestion en fusionnant une partie de ses activités avec celles du Crédit agricole au sein d'une entreprise commune détenue à 30% par la Socgen et 70% par la Banque verte.
Sa filiale de gestion alternative Sgam Alternative Investments est toutefois exclue du périmètre de ce rapprochement. Elle doit être fusionnée avec Lyxor, une autre filiale de gestion alternative de Société générale rattachée à la banque de financement et d'investissement.
Edité par Marc Angrand et Jacques Poznanski
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