(BFM Bourse) - Le groupe de luxe grimpe à la Bourse de Paris ce vendredi après avoir pourtant publié une chute de 9% en données comparables des ventes de sa division mode et maroquinerie, la plus importante de la société. Mais la publication décèle quelques bons points, notamment une rentabilité meilleure qu'attendu.
Sur le papier, les résultats semestriels de LVMH n'ont rien de scintillants. Jeudi soir, le groupe propriétaire des marques Louis Vuitton, Céline et Dior a fait état d'une chute de 4% de ses ventes en données comparables au deuxième trimestre, ce qui marque une dégradation par rapport aux trois premiers mois de l'année (-3%). Sur l'ensemble du premier semestre, le résultat opérationnel courant a chuté de 15%, le bénéfice net de 22%.
Le gros point noir de la publication reste surtout la performance de la division "mode et maroquinerie" de la société, qui représente près de la moitié de ses ventes et plus des deux-tiers de son résultat opérationnel courant. Au deuxième trimestre, cette division a accusé une chute de 9% en données comparables, quand le consensus (la prévision moyenne des analystes) tablait sur un repli de 6,4%, selon Bernstein. Au premier trimestre 2025, la mode et maroquinerie avait vu ses revenus se replier de 5% en données comparables.
Dans une note rédigée jeudi soir, Royal Bank of Canada estime que la détérioration de la performance de cette division "décevra probablement" les investisseurs.
Pas vraiment. Certes, l'action LVMH a ouvert en baisse, ce vendredi 25 juillet, en réaction à cette publication. Mais le repli a été limité à un peu plus de 1%. Et le titre s'est très vite retourné à la hausse. Vers 14h20, l'action LVMH prenait 2,5%.
Dans son sillage, Hermès et Kering, prennent respectivement 1,2% et 3,7%.
>> Accédez à nos analyses graphiques exclusives, et entrez dans la confidence du Portefeuille Trading
Une amélioration observée en Chine
Plusieurs éléments méritent d'être nuancés. Pour revenir à la performance de la division mode et maroquinerie, elle s'est, certes dégradée. Mais la directrice financière, Cécile Cabanis, a expliqué que les les marchés domestiques en Europe et aux États-Unis avaient fait preuve de résilience.
Les dépenses des Américains en Europe se sont un peu affaissées en raison de la chute du dollar face à l'euro, qui rend moins intéressant les achats de produits de luxe pour eux sur le Vieux continent. Ce dernier phénomène a pu provoquer un phénomène de "rapatriement" des dépenses de luxe sur le sol américain. D'ailleurs, les ventes globales de LVMH aux États-Unis se sont améliorées au deuxième trimestre (0% en données comparables après -3% au premier).
Le "gros" de la détérioration de l'activité de la mode et maroquinerie vient en réalité de l'Asie, et plus spécifiquement des dépenses des touristes au Japon. Sur la première partie de 2024, la faiblesse du yen avait incité les voyageurs asiatiques à se déplacer dans l'archipel nippon pour acheter des biens de luxe, notamment dans la maroquinerie. Avec la remontée du yen "nous observons un renversement de ce qui s'était produit l'an dernier (au Japon, NDLR), ce qui est particulièrement vrai pour la clientèle chinoise", a détaillé Cécile Cabanis.
Ce qui explique à la fois la dégringolade des ventes globales au Japon de LVMH (-28% en données comparables au deuxième trimestre après -1% au premier) et l'amélioration de tendance en Asie hors Japon (-6% après -11%).
"La demande chinoise s'est améliorée (…), soutenue par le rapatriement (des achats de produits de luxe vers le sol chinois, NDLR) et le succès d'activations de marques telles que le bateau 'The Louis' à Shanghai", souligne Jie Zhang, analyste chez le bureau d'études indépendant Alphavalue.
Le fait que l'essentiel de la faiblesse des ventes soit dû à un tourisme en berne constitue un motif d'espoir pour Deutsche Bank.
"La ligne officielle est que les problèmes chez LVMH sont dus à une conjoncture macroéconomique faible et à l'absence de touristes. Mais les Chinois ne se rendaient pas au Japon pour acheter des produits de luxe parce qu'ils voulaient apercevoir le mont Fuji. C'était plutôt parce que les prix y étaient plus bas. Si ce n'est pas là une démonstration de l'élasticité des prix, qu'est-ce que c'est?", s'interroge toutefois, de son côté, Luca Solca, de Bernstein.
Un contrôle "impressionnant des coûts"
Au-delà des ventes de la division mode et maroquinerie, le reste des résultats de LVMH comporte plusieurs éléments encourageants. "À l'exception du chiffre d'affaires de la mode et maroquinerie, presque tout le reste semble meilleur que prévu, ces résultats ne sont certes pas excellents, mais ils ne sont pas non plus catastrophiques", résume Luca Solca.
"LVMH a publié des résultats légèrement meilleurs que prévu au premier semestre 2025, avec un chiffre d'affaires globalement conforme aux prévisions et un résultat opérationnel courant supérieur aux attentes du marché", souligne de son côté Jie Zhang.
L'analyste note que, en dehors de la mode et maroquinerie, toutes les autres divisions de la société (vins et spiritueux, joaillerie et horlogerie, distribution sélective, parfums et cosmétiques) ont montré amélioration de leur activité au deuxième trimestre par rapport au premier. À titre d'exemple, la division "distribution sélective", qui rassemble notamment Séphora et la société de distribution DFS, a affiché une croissance de 4% en données comparables contre un repli de 1% au premier trimestre.
Du côté de la rentabilité, le résultat opérationnel courant a certes chuté. Mais en s'établissant à 9 milliards d'euros au premier semestre pour une marge de 22,6%, cette ligne de compte a nettement dépassé les attentes du consensus, logées à 8,87 milliards d'euros pour un taux de 22,2%. Luca Solca remarque que la société a fait preuve de maîtrise de ses coûts face à "un environnement difficile sur la demande".
"La relative bonne tenue des marges dans la plupart des divisions met en évidence les efforts entrepris sur les coûts", abonde Oddo BHF. UBS va jusqu'à évoquer "un contrôle des coûts impressionnant".
Lors de la conférence téléphonique avec les analystes, Cécile Cabanis a indiqué que la marge opérationnelle courante de la division mode et maroquinerie s'était maintenue à un niveau élevé au premier semestre, à 34,7% "ce qui est très bon au vu de la décélération des ventes".
La directrice financière a également indiqué que la période actuelle était propice pour que la société soit "plus efficace structurellement" sans pour autant faire du "cost-cutting" qui ne serait pas soutenable. Cécile Cabanis a évoqué "différentes conversations" avec des réflexions sur les coûts des magasins au mètre carré, l'articulation avec les agences lors d'évènement ou encore les relations avec les fournisseurs. Ces initiatives "prendront du temps", a-t-elle toutefois prévenu.
Des "lueurs d'espoirs"
In fine, Deutsche Bank voit "des lueurs d'espoir", anticipant une amélioration des ventes à partir du troisième trimestre.
"Les investisseurs attendaient une occasion de revenir sur ce titre et la conférence téléphonique a mis en évidence un certain nombre de facteurs susceptibles de les y encourager, notamment une reprise 'tangible' en Chine, des gains de parts de marché pour les marques clés et un potentiel d'efficacité structurelle, ainsi qu'une gestion rigoureuse des coûts", fait valoir la banque allemande.
Oddo BHF note de son côté qu'une amélioration de la base de comparaison en Chine devrait s'observer sur les prochains trimestres et qu'"il est permis de penser que les efforts sur les coûts vont continuer".
"Ces éléments suggèrent qu’un point bas de perception paraît désormais en vue et nous gardons confiance dans la capacité des marques du groupe en 'soft luxury' (les vêtements et la maroquinerie, NDLR) à retrouver un élan commercial", juge le courtier qui confirme sa recommandation à "superformance". "Il faudra tout de même être patient au vu d’un contexte secteur qui ne nous paraît pas devoir devenir rapidement favorable", nuance-t-il.
"Les résultats du premier semestre montrent une mise en œuvre rapide des mesures d'efficacité et laissent entrevoir une lueur d'espoir quant à la fin du déclin des ventes", juge de son côté HSBC.
"Nous sommes encouragés par la solide protection des marges, même si nous pensons qu'une reprise significative des ventes ne se produira pas avant 2026", ajoute la banque sino-britannique. HSBC reste à "conserver" sur le titre car l'établissement n'attend une reprise que modérée sur la deuxième partie de l'année, avec des revenus globaux stables au troisième trimestre et en légère hausse au quatrième.
Recevez toutes les infos sur LVMH en temps réel :
Par « push » sur votre mobile grâce à l’application BFM Bourse
Par email