(BFM Bourse) - Le numéro un du luxe a dégagé des croissances supérieures aux attentes dans l'intégralité de ses divisions, en particulier dans la mode et la maroquinerie. Les volumes et le trafic ont repris, notamment en Chine où les achats locaux des consommateurs ont enregistré une nette hausse.
L'heure de la rébellion boursière semble avoir sonné pour LVMH. Depuis plusieurs trimestres, le groupe aux quelque 75 maisons avait vu son statut écorné par des ventes en berne. La société avait notamment accusé au deuxième trimestre une baisse de 9% en données comparables dans la mode et maroquinerie, sa division la plus importante (et la plus suivie).
Son action a lourdement plongé. Fin juin, le titre du numéro un du luxe, accusait une chute d'environ 30% sur l'ensemble de 2025. La société a même, un temps, perdu sa couronne de première capitalisation de la Bourse de Paris au bénéfice d'Hermès, un titre qu'elle a depuis reconquis.
Toutefois, ces dernières semaines, un vent d'optimisme a gagné les bureaux d'études, plusieurs analystes repassant à l'achat (ou équivalent) sur le titre.
Mardi soir, LVMH a conforté leur confiance. Le groupe a livré une activité très nettement supérieure aux attentes au troisième trimestre.
La Bourse applaudit. Ce mercredi, l'action LVMH prend 12,2% en début de séance, signant de loin la plus forte hausse du CAC 40. Souvent considéré comme un baromètre du secteur en raison de ses nombreux métiers (maroquinerie, vêtements, vins, joaillerie, montres, distribution sélective, horlogerie, parfums, cosmétiques), LVMH entraîne dans son sillage l'ensemble du luxe. Hermès prend 6,5% et Kering 8%.
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Une base de comparaison clémente mais pas seulement
"LVMH a enregistré des résultats supérieurs aux attentes dans toutes ses divisions, la mode et maroquinerie bénéficiant d'une amélioration séquentielle des dépenses locales des consommateurs chinois (….), américains, d'Asie du Sud-Est et du Moyen-Orient", résume Bernstein.
L'entreprise présidée et dirigée par Bernard Arnault a livré une copie bien plus en phase avec son rang que ses précédentes publications.
De juillet à fin septembre, la société a enregistré une croissance en données comparables de 1%, alors que le consensus (la prévision moyenne des analystes) anticipait un repli de 0,6%. La mode et maroquinerie a limité la baisse de son chiffre d'affaires à 2% en données comparables alors que le consensus se situait à -3,9% sur ces mêmes bases. D'après Jefferies, les "buy-sides", c'est-à-dire pour simplifier le marché, généralement plus exigeants que le consensus, retenaient eux une baisse de 3%.
LVMH a enregistré une importante amélioration séquentielle (d'un trimestre sur l'autre) dans cette division après donc avoir essuyé une chute de 9% au deuxième trimestre, en données comparables.
Certes, le groupe a été aidé par une base de comparaison clémente. Au troisième trimestre 2024, LVMH avait été pénalisé par un certain attentisme économique en amont de la présidentielle américaine (qui s'était tenue en novembre). Cet effet s'était ensuite "renversé" au quatrième trimestre.
UBS estimait que, mécaniquement, cette base de comparaison favorable aurait un impact positif de six points de pourcentage sur les ventes au troisième trimestre par rapport au deuxième.
Mais l'amélioration affichée par la mode et maroquinerie (sept points de pourcentage) va au-delà de ce simple effet de base. Royal Bank of Canada note d'ailleurs que, sur deux ans, la tendance des revenus s'améliore aussi (une baisse de 7% contre un repli de 8% au deuxième trimestre), "ce qui est encourageant", apprécie la banque canadienne.
La Chine et les volumes se redressent
La directrice financière, Cécile Cabanis, a livré plusieurs indications cruciales, lors de la conférence téléphonique avec les analystes, dont le ton a été qualifié par Jefferies de "plus réjouissant" que précédemment.
La dirigeante a expliqué que le "cluster" chinois, c'est-à-dire les achats de luxe des consommateurs chinois en Chine mais aussi à l'étranger, était proche de la stabilisation. Les dépenses de tourisme à l'étranger des Chinois ont affiché une baisse à deux chiffres, a-t-elle indiqué, en raison notamment de l'appréciation du yen au Japon qui rend moins intéressant les achats de produits de luxe dans ce pays (d'ailleurs les ventes globales de LVMH ont encore chuté de 13% au Japon sur le trimestre).
Mais les dépenses locales des consommateurs chinois, c'est-à-dire donc en Chine, sont désormais en hausse "mid to high single digit", ce que l'on peut grosso modo traduire par allant de 4% à 9%, a-t-elle ajouté.
Cécile Cabanis a noté le succès du "Louis", une impressionnante boutique-flagship en forme de paquebot lancée fin juin à Shanghai. Qualifié de "fun" par la dirigeante, "The Louis" a surtout généré des visites, de l'intérêt pour la marque, au point que les enseignes voisines de LVMH à Shanghai ont été très "contentes" du trafic généré par le bateau, a expliqué la directrice financière. À l'intérieur du bateau, le visiteur "est lancé dans un voyage à travers l'histoire de la marque" Louis Vuitton, avant de sortir par une boutique "d'une surface petite mais avec une forte productivité" et vendant des cadeaux, ou encore des bagages, a poursuivi Cécile Cabanis.
Le cluster américain dans la division progressé et, plus globalement, les ventes de LVMH, ont augmenté de 3% en données comparables sur le trimestre aux États-Unis après s'être stabilisés au deuxième.
Cécile Cabanis a expliqué que le "gros" de cette amélioration dans la mode et maroquinerie était lié à "une hausse du trafic et des volumes", les prix et le "mix-produits" (l'orientation des ventes vers des articles plus chers et plus rentables) ayant peu bougé par rapport au deuxième trimestre.
Par marques, la directrice financière a indiqué que Louis Vuitton et Dior avait connu une évolution à peu près en phase avec celle de la division sur le trimestre, le premier était "un peu au-dessus" et le second "un peu en dessous". Dior a par ailleurs enregistré une amélioration dans toutes les régions clef, a-t-elle ajouté.
De l'innovation pour 2026
Outre, la mode et la maroquinerie, les autres divisions ont également surpris les analystes. "LVMH constate également que le redressement de Tiffany continue de porter ses fruits, que les tendances sont positives pour le champagne chez les vins et spiritueux, que les parfums et cosmétiques affichent de solides performances grâce à l'innovation et que Sephora enregistre une augmentation du trafic et du panier moyen", résume Bernstein.
La joaillerie et l'horlogerie a affiché une croissance de 2% au troisième trimestre en données comparables, alors que le consensus tablait sur une hausse de 0,7%. Cette croissance a été portée par les marques de joaillerie Tiffany et Bulgari, Cécile Cabanis précisant que l'horlogerie est restée en territoire négatif sur le trimestre.
Les "vins ont spiritueux ont dégagé une croissance de 1% (alors que le consensus anticipait un repli de 3,4%), les parfums et cosmétiques ont progressé de 2% (contre 1,7% attendu) et la "distribution sélective" (Séphora, les ventes dans les aéroports) continue d'être la division avec la plus forte croissance, avec une hausse de 7%, contre un consensus situé à 5,2%.
Pour l'avenir, Cécile Cabanis a rappelé que LVMH ferait cette fois face à une base de comparaison défavorable au quatrième trimestre dans toutes ses régions à l'exception du Japon. La directrice financière a chiffré l'impact négatif à 4 points de pourcentage (par rapport au troisième trimestre). Évoquant cette fois 2026, la dirigeante a estimé que "l'environnement macroéconomique difficile et assez volatile" risquait de persister.
Pour autant, Cécile Cabanis a assuré que le groupe se montrait "confiant" pour les prochains mois et pour l'année prochaine. D'abord parce que la base de comparaison du premier semestre 2026 sera clémente. Mais aussi parce que LVMH a mise en place des mesures de "self-help", avec les renouvellements de collections qui arriveront progressivement en magasins dans les prochains mois ainsi que des initiatives dans ses magasins, avec des flagships à New York, Macau ou Séoul (Café Louis Vuitton).
"Le groupe a mis en place de multiples initiatives, dont une direction créative renouvelée chez Dior, Céline et Fendi", apprécie Jie Zhang du bureau d'études Alphavalue. "Cette nouvelle ambition dans le domaine de la mode devrait dynamiser la marque jusqu'en 2026. Nous continuons de considérer LVMH comme le mieux placé pour bénéficier d'une reprise complète du secteur, tout en reconnaissant que celle-ci prendra du temps", ajoute-t-elle.
Jefferies, de son côté, garde en tête, la macroéconomie difficile. Mais la banque reconnaît que la publication du groupe montre "les premiers signes tangibles d'une innovation favorisant une amélioration relative de l'attrait auprès des consommateurs. La banque a maintenu son conseil à "conserver" et a relevé son objectif de cours à 530 euros contre 470 euros.
Pour Deutsche Bank, l'amélioration de l'activité va au-delà de la "base de comparaison" au troisième trimestre.
"Les investisseurs espèrent que LVMH, et potentiellement l'ensemble du secteur du luxe, a pris un tournant décisif en matière de croissance des ventes en devises étrangères sur deux ans, grâce à un renforcement de la Chine continentale. L'opinion négative de nombreux investisseurs sera remise en question", cingle l'établissement.
"L’amélioration constatée au troisième trimestre et les effets progressifs à venir sur 2026 du renouveau créatif désormais effectif sur la quasi-totalité des marques mode crédibilisent le retour à une croissance raffermie" en 2026, juge de son côté Oddo BHF.
Interrogé sur un possible rachat d'Armani par LVMH, Cécile Cabanis a botté en touche. Le testament de Giorgio Armani, mort le 4 septembre dernier, demande à ce qu'Armani cède 15% de son capital à un acquéreur qui pourrait ensuite éventuellement racheter Armani. Le créateur italien a expressément désigné trois sociétés: LVMH, Essilorluxottica et L'Oréal.
"Concernant Armani, nous sommes évidemment très honorés d'avoir été désignés comme partenaires, mais je n'ai rien d'autre à ajouter à ce sujet", a déclaré Cécile Cabanis.
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