(BFM Bourse) - Les transferts de sociétés cotés du marché réglementé d'Euronext Paris vers Euronext Growth sont devenus monnaie courante. Mais l'inverse est beaucoup plus rare. Sur les neuf dernières années seules 3 sociétés pensionnaires d'Euronext Growth ont demandé leur transfert en division supérieure. Quel est le bilan boursier de ces audacieuses sociétés?
Le week-end dernier, nous avons consacré un article sur les raisons qui poussent une entreprise à passer sur un compartiment plus modeste à la Bourse de Paris Depuis 2009, les sociétés cotées sur un marché réglementé peuvent en effet demander l’admission de leurs actions aux négociations sur Euronext Growth.
Si cet exode vers ce compartiment était encore confidentiel ces dernières années - puisque seulement 4 sociétés ont tenté l'expérience en 2018 - le phénomène est monté en puissance à partir de 2020. Depuis, le début de l'année, plus d'une dizaine de sociétés cotées ont fait le choix de quitter le marché réglementé d'Euronext Paris pour Euronext Growth et ses règles assouplies.
Mais l'inverse est-il possible? La réponse est oui. Une société cotée sur Euronext Growth peut jouer dans la cour des grands en demandant un transfert sur le compartiment réglementé d'Euronext Paris. Les cas sont rares mais ils existent. Sur les neuf dernières années, seules trois sociétés ont réussi une telle prouesse: Genfit en 2014, Figeac Aero en 2016 et Solutions 30 en 2020.
Pour rappel, voici du plus prestigieux au moins important les différents compartiments boursiers chez Euronext:
- Euronext compartiment A: plus d'un milliard d'euros de capitalisation
- Euronext compartiment B: de 150 millions à 1 milliard d’euros
- Euronext compartiment C: moins de 150 millions d’euros
- Euronext Growth (critères allégés)
- Euronext Access+ (critères très allégés)
- Euronext Access (marché libre)
Genfit, Figeac Aero et Solutions 30: une montée par étapes
En avril 2014, Genfit annonçait le transfert de ses actions sur le compartiment B du marché réglementé d'Euronext à Paris. La société biopharmaceutique spécialisée dans les maladies cardiométaboliques et des désordres associés était cotée depuis décembre 2006 sur Alternext d’Euronext Paris, l'ancêtre d'Euronext Growth.
"Ce transfert de cotation vers le compartiment B de Nyse Euronext Paris devrait offrir à l’action Genfit une visibilité renforcée à la faveur de son intégration dans de nombreux indices de référence. Par ailleurs, ce nouveau groupe de cotation devrait faciliter les opérations de renforcement des fonds propres nécessaires à l’accélération du développement de la société en 2014 ; certains investisseurs privilégiant le marché réglementé Euronext", expliquait alors Jean-François Mouney, l'ancien président du directoire de Genfit.
La société a fait ses premiers pas sur Euronext Paris à un cours de 21,15 euros avant de ne plus jamais se remettre de sa sanction boursière du 12 mai 2020. Le cours de la société de biotechnologies avait alors connu sa pire séance et s'était effondré de 65,71% après avoir été contraint d'enterrer son projet dans la NASH (la maladie du soda). Une chute encore supérieure à celle qu'avait enregistré le titre en mars 2015 après une première déception sur sa molécule phare élafibranor (initialement désignée GFT-505).
Le dossier évolue encore sous les 4 euros actuellement, la biotech lilloise a payé le prix fort de l'abandon de son projet de traitement de la NASH, maladie qui reflète les dégâts de la malbouffe au niveau du foie.
En mars 2016, c'est autour de Figeac Aero de s'envoler vers le compartiment B d'Euronext Paris à un prix de 21,50 euros par action. Ce passage d'Alternext vers le compartiment réglementé d'Euronext Paris était l'occasion pour l'équipementier aéronautique de financer son développement et de déployer son business model à l’international, notamment sur le continent américain.
Mais la pandémie de Covid-19 est passée par là, touchant durement l'ensemble de la filière aéronautique et l'entraînant dans une crise sans précédent. Dont Figeac Aero, qui était déjà en position de faiblesse avant le Covid-19. Après importante chute d'activité en 2020, le sous-traitant aéronautique a entrepris une restructuration financière en plus d'une remise à plat de sa stratégie industrielle. Le groupe a lancé Route 25, son plan qui devrait lui permettre de retrouver le chemin de la croissance à horizon 2025. Les efforts de Figeac Aero commencent à être visibles sur le terrain boursier, le titre cote actuellement un peu plus de 5,20 euros après avoir inscrit un plus bas de 2,42 euros à l'automne 2020.
Après 4 années sans transfert vers le compartiment réglementé d'Euronext Paris, Solutions 30 s'est offert le luxe de rejoindre 23 juillet 2020 le compartiment A d'Euronext Paris, 15 ans après sa première cotation sur le Marché Libre - qui ne s'appelait pas encore Euronext Access à l'époque. Le leader européen pour l'installation de la fibre et des compteurs, est entré sur Euronext Access en 2005 avec une capitalisation de 4,5 millions d’euros, pour être ensuite valorisé 56 millions d’euros en 2009 lors du transfert de ses titres sur Alternext désormais Euronext Growth. Onze ans plus tard, Solutions 30 est arrivé sur le Compartiment A d’Euronext Paris avec une capitalisation boursière de 1,5 milliard d’euros.
La société souhaitait aussi concrétiser aux yeux du grand public son "développement rapide, associant croissance organique et externe". Après une lune de miel boursière avec ses actionnaires, Solutions 30 a réellement amorcé sa descente aux enfers en décembre 2020 depuis son zénith historique à 19,85 euros. Un rapport anonyme a mis en doute la fiabilité des comptes, comme cela avait été le cas en 2019, et accusait carrément Solutions 30 d'être lié au blanchiment d'argent. La crédibilité de Solutions 30, qui a toujours démenti ces accusations, a été entachée, alors que l'activité du groupe est en parallèle en plein ralentissement. Et cela se traduit également sur le cours de Bourse de Solutions 30. Le titre figure en quatrième position des plus fortes baisses du SBF 120 depuis le début de l'année (-71,73%).
Orège et Voltalia : d'Euronext Access au marché réglementé d'Euronext
De leur côté, Orège et Voltalia ont directement pris l’ascenseur, laissant la cage d'escalier à leurs homologues cités ci-dessus.
En juin 2014, Voltalia a rejoint le compartiment B d'Euronext Paris sans passer par la case intermédiaire du compartiment Alternext. Après une première cotation sur le Marché Libre d’Euronext Paris en mai 2006, le producteur d’électricité à base d’énergies renouvelables a profité de son transfert vers le compartiment réglementé pour boucler une importante augmentation de capital de près de 120 millions d'euros. Cette levée de fonds d'envergure était alors principalement destinée au financement de la construction de centrales éoliennes au Brésil et en France. Entrée dans la cour des grands à 8,60 euros, la société Voltalia a depuis le vent en poupe avec un titre multiplié par près de deux. Le dossier a tiré profit de l'accélération de la croissance du marché des énergies renouvelables sur fond de crise énergétique.
Pour rester dans la course, le producteur d'énergies renouvelables de la galaxie Mulliez a levé mi-novembre, près de 500 millions d'euros en vue de financer son plan de développement à l'horizon 2027. A cette échéance, la société espère multiplier par deux son volume de projets en portefeuille et par trois son excédent brut d'exploitation.
En juillet 2013, Orège quittait le Marché Libre pour le compartiment C du marché réglementé d'Euronext Paris. Ce transfert a été l'occasion pour le spécialiste dans le traitement des eaux usées de lever autour de 20 millions d'euros pour étendre son expertise vers les marchés émergents (pétrole et gaz non conventionnels) et renforcer ses fonds propres. Arrivé à 3,24 euros sur le compartiment C, Orège ne cote plus que 0,45 euro à ses plus bas historiques, effaçant au passage 90% de sa valeur. L'entreprise fondée en 2005 a longtemps peiné à commercialiser sa technologie sur le marché français, l'amenant à se tourner vers les USA et la Grande-Bretagne.
Hormis Voltalia qui est sur un créneau porteur, le passage à l'échelon supérieur s'avère beaucoup plus compliqué pour Orège, Figeac Aero, Solutions 30 ou Genfit. Une situation qui est loin de contredire la troisième fable du Livre I des Fables de La Fontaine "la Grenouille qui se veut faire aussi grosse que le bœuf".
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