(BFM Bourse) - Avec le rachat des magasins Cora et Match, le distributeur français réalise sa plus grande acquisition depuis 20 ans. L'enjeu : renforcer sa précieuse position de numéro deux du secteur, derrière Leclerc.
Alors que Casino lutte pour sa survie et vient d'émettre un avertissement sur ses résultats 2023, Carrefour annonce, pour sa part, sa première acquisition majeure depuis 20 ans. Mercredi soir, le groupe dirigé par Alexandre Bompard basé à Massy annonce avoir mis dans son panier les enseignes Cora et Match, propriétés du distributeur belge Louis Delhaize.
Un total de 60 hypermarchés et 115 supermarchés, respectivement sous enseignes Cora et Match seront bientôt entre les mains de Carrefour. La transaction valorise les actifs acquis sur la base d'une valeur d'entreprise de 1,05 milliard d'euros. La finalisation du rachat de Match et Cora est attendue "à l'été 2024", après consultation de l'Autorité de la concurrence.
Le rachat de ce parc de magasins va permettre à Carrefour de renforcer ses positions en France avec la conquête de nouveaux territoires. Le distributeur basé à Massy est en effet "peu présent dans le Nord et l'Est de la France", explique Stifel dans sa note consacrée à cette importante opération pour Carrefour.
Au coude-à-coude avec Leclerc
L'apport de Cora et de Match au périmètre de Carrefour se traduit par un chiffre d'affaires supplémentaire de 5,2 milliards d'euros hors taxes quand le distributeur a réalisé l'an dernier 42 milliards d'euros de ventes dans le pays, cette fois-ci taxes incluses.
Surtout, Carrefour doit multiplier les initiatives pour se renforcer en France afin de ne pas se laisser distancer par E.Leclerc, qui reste à ce jour le numéro un dans l'Hexagone.
"Tous les acteurs de la distribution alimentaire sont en train de réaliser qu'il faut réagir pour grossir et ne pas se laisser distancer par E.Leclerc qui est sur une tendance impressionnante et par Intermarché", expliquait lundi auprès de l'AFP Clément Genelot, spécialiste de la distribution chez Bryan Garnier & Co.
Ce que confirme un analyste interrogé par BFM Bourse. Cette opération "a également du sens sur le plan stratégique car elle renforce la part de marché de Carrefour face à Leclerc en France. Post-opération, cette part de marché augmenterait à de 2,5 points de pourcentage à 22,3% alors que Leclerc est à 23,5%. Ce qui est intéressant en terme d'efficience dans les achats", explique-t-il
Carrefour doit également faire face à la montée en puissance d'Intermarché, qui va racheter à Casino 119 magasins dans les trois années à venir, dont 57 changeront de bannière dès la fin de l'année.
Mais selon l'analyste anonyme, le rachat de Match et Cora devrait aider Carrefour dans la mesure où les deux enseignes "faisaient partie de la centrale d'achat d'Intermarché. Ils vont probablement quitter cette centrale ce qui sera négatif pour Intermarché". Et dans le rapport de force avec les industriels de l'agroalimentaire, plus le poids du distributeur est important, plus ses fournisseurs sont enclins à lui consentir des ristournes pour être référencés dans leurs linéaires.
Sur le volet financier, les magasins Cora et Match affichent un EBITDA (un résultat brut d'exploitation) de 189 millions d'euros. Carrefour estime que ce rachat "offre un potentiel de synergies significatif, estimé à 110 millions d'euros d’EBITDA en base annuelle 3 ans après la réalisation effective de la transaction". A côté, l'intégration de ces deux enseignes coûtera 200 millions d'euros (investissements et charges d’exploitation), sur deux ans.
Le rachat des enseignes Match et de Cora est jugé "bon marché" pour Stifel, avec un prix de la transaction "à 5,5 fois l'EBITDA (2022) en valeur d'entreprise avant les synergies et de 4,2 fois après les synergies ciblées dans l'année", avance le bureau d'études. Cette opération a donc du sens du point de vue financier, car elle généra "une relution (une amélioration, NDLR) immédiate du bénéfice par action de 2% hors synergies et de 6% en intégrant les synergies", abonde, pour sa part l'analyste anonyme.
"La taille de l'opération ne devrait pas empêcher de nouveaux rachats d'actions", ajoute Stifel.
Pour autant, les observateurs relèvent des points noirs à ce rachat de Cora et de Match. L'ajout d'hypermarchés peut être perçu comme négatif par le marché car "il renforce le 'mix' des hypermarchés au sein de Carrefour qui représentaient 49% du total avant le deal contre 52% après le deal. Or le marché aime à penser que les hypermarchés ne constituent pas le modèle du futur pour Carrefour", ajoute l'analyste parisien.
Une position partagée par Stifel qui estime que les gains de parts de marché ne "font pas tout". le bureau d'études préfère de son côté, "les gains organiques, avec l'ajout de nouveaux services pour capter plus de clients et améliorer la fidélité de la clientèle".
A la Bourse de Paris, Carrefour progresse de 1,10% à 17,475 euros, vers 11h00 après l'annonce du rachat des enseignes Cora et Match. De son côté, Carmila bondit de 6,2%, la filiale à 36% de Carrefour va reprendre 52 galeries commerciales adjacentes à des magasins Cora qui étaient détenues à 93% par le groupe Louis Delhaize.
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