par Mark Potter et James Regan
LONDRES/PARIS (Reuters) - Carrefour doit s'inspirer des plans de redressement réussis de concurrents tels qu'Ahold et Morrison et se concentrer sur les prix bas, les produits à sa propre marque et le marketing s'il veut rebondir après deux avertissements sur résultats en 2008.
Le nouveau directeur général, Lars Olofsson, qui fera sa première présentation jeudi à l'occasion de la publication des résultats annuels, doit également prendre en charge les problèmes particuliers du groupe liés à des hypermarchés sous-performants et à une surexposition à des marchés occidentaux matures.
Les résoudre pourrait conduire à réduire la surface des hypermarchés et de louer des espaces à des tiers, de se retirer de Belgique et d'Italie et se développer sur des marchés émergents tels que la Russie.
Mais en période de récession rien n'est simple et les analystes n'attendent rien de bien précis de la part de Carrefour sur ce point dans l'immédiat mais plutôt dans le courant de l'année.
Il se peut toutefois qu'Olofsson ait son petit succès s'il diagnostique bien les problèmes et définit ses priorités pour les traiter.
"Globalement, il faut qu'on ait confiance dans la direction, qu'on pense qu'elle comprend bien les problèmes et les menaces stratégiques auxquelles est elle exposée", observe Jaime Vasquez, analyste de JP Morgan.
Carrefour, qui emploie 490.000 personnes dans plus de 15.000 magasins dans 30 pays, a connu une année 2008 tourmentée, touché par la baisse de la consommation dans ses principaux marchés occidentaux, par son exposition aux produits non alimentaires où la baisse de la demande a été plus prononcée que dans l'épicerie, et par la concurrence des magasins discount.
LE MAUVAIS INTÉGRÉ
On s'attend à ce que le distributeur annonce une hausse de 2,1% de son bénéfice d'exploitation à 3,36 milliards d'euros en 2008, suivant le consensus Reuters Estimates établi à partir des estimations de 26 analystes.
C'est à comparer à une croissance de 12% chez le néerlandais Ahold et de 7,3% chez Casino.
Les mauvaises nouvelles sont peut-être déjà intégrées dans le cours Carrefour, qui a sous-performé l'indice DJ Stoxx de la distribution européenne de 23% durant l'année écoulée et dont le PER est de 9,1 contre 13,7 pour le numéro un mondial Wal-Mart et 11 pour le numéro trois Tesco, selon les données Reuters.
L'action Carrefour est en outre celle qui fait le plus l'objet de ventes à découvert de toute la distribution européenne, 10,1% de son flottant étant en prêt pour des traders qui la jouent à la baisse, selon Data Explorers, un cabinet new-yorkais spécialiste du suivi des ventes à découvert.
Donc, la marge de rebond de l'action Carrefour est ample, pour autant qu'Olofsson fasse passer le bon message.
Jose Luis Duran, son prédécesseur, avait bien avancé dans l'identification des problèmes de Carrefour et commençait à travailler à des solutions qui, de l'avis des analystes, fourniront une bonne base de départ pour le nouveau directeur général.
Le problème de Duran était la mise en application, à la fois en termes d'efficacité et de rapidité, et de ce point de vue Olofsson pourrait apprendre de la concurrence.
Par exemple, Duran a baissé les prix et augmenté les promotions mais on lui a reproché de ne pas toujours le faire de manière cohérente ou encore de mal communiquer ses intentions.
Des analystes de Natixis suggèrent que Carrefour pourrait prendre exemple sur Ahold qui, après avoir mis l'accent sur les prix bas dans son plan de redressement en 2003, s'est ensuite focalisé en permanence sur la valeur.
Duran s'est également employé à unifier les marques par exemple en convertissant l'enseigne Champion en Carrefour, une bonne idée pour les analystes car elle peut permettre de fidéliser la clientèle et de centraliser les processus.
HOMME DE MARKETING
Homme de marketing, Olofsson sera peut-être mieux à même de faire aboutir ce changement, font valoir les analystes, qui évoquent la réussite de Marc Bolland, issu du marketing lui aussi, dans la refonte du britannique Morrison après l'acquisition malencontreuse de Safeway.
Olofsson peut également tirer la leçon de la réussite des marques propriétaires en regardant du côté d'un autre britannique qui a réussi sa relance, J Sainsbury.
On associe Sainsbury, comme Carrefour, à des prix et une qualité plus élevés que certains concurrents mais le britannique a défié les prédictions voulant qu'il souffrirait de la conjoncture en conseillant aux consommateurs de faire des économies en adoptant les produits de sa propre marque, qui, souvent, ont des marges plus élevées.
Duran avait également étudié la possibilité de réduire la surface des hypermarchés Carrefour et les analystes disent qu'Olofsson doit passer à la vitesse supérieure sur ce point. Il sera peut-être difficile, toutefois, de trouver des locataires pour occuper les espaces dégagés.
Pareillement, Olofsson aura sans doute du mal à trouver preneur pour les magasins non performants de Belgique et d'Italie. En revanche, développer la présence du groupe dans les pays émergents serait plus facile, dans la mesure où le nombre de détaillants en difficulté y est croissant. Des sources bancaires ont dit à Reuters en février que Carrefour était intéressé par le russe Seventh Continent.
Même si des changements radicaux semblent peu vraisemblables à court terme, les analystes pensent que Carrefour peut s'aligner sur Tesco ou encore l'allemand Metro en accélérant les réductions de coûts et d'investissements. Des analystes de Deutsche Bank pensent ainsi que les dépenses d'investissement de 2009 pourraient être ramenées de trois à 2,3 milliards d'euros.
Des analystes d'UBS expliquent eux qu'avec une dette gérable et 15 milliards d'euros au moins de biens immobiliers en propre, il n'y a aucune raison que Carrefour ne revienne pas dans la course si la bonne stratégie est suivie.
Version française Wilfrid Exbrayat
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