(BFM Bourse) - Le concepteur du cœur artificiel Aeson a annoncé ce mercredi une nouvelle levée de fonds pour se donner un peu de répit. D'un montant initial de 10,3 millions d'euros pouvant être porté à près de 14 millions au maximum, Carmat compte avec cette opération prolonger sa visibilité financière jusqu'à la fin de l'année.

Le temps est compté pour Carmat qui joue une nouvelle fois sa survie financière. Début septembre, le concepteur du cœur artificiel avait estimé à 45 millions d'euros ses besoins de financement pour les douze prochains mois.

Or, à fin juin, la trésorerie du groupe s'établissait à 11,4 millions d'euros et ses ressources financières, qui incluent une partie d'un financement dilutif mis en place début juillet, n'assurent le financement de ses activités jusqu'à la fin septembre.

"Nous pensons toujours que trouver les 45 millions d'euros restants pour combler le fossé jusqu'à l'année prochaine ne sera pas une promenade de santé", avait jugé Degroof Petercam, il y a quelques jours.

Le groupe fondé en 2008, n'ayant donc que quelques semaines de visibilité financière, doit ainsi passer par la case augmentation de capital pour poursuivre son développement au-delà de cette échéance.

Une nouvelle levée de fonds

Carmat sollicite donc une nouvelle fois les marchés pour se donner un peu d'air financier à court terme. Dans le détail, cette levée de fonds annoncée ce mercredi prend la forme d'une augmentation de capital d'un montant initial de 10,3 millions d'euros. Ce montant peut être porté à un montant maximal de 13,6 millions d'euros en cas d'exercice intégral de la clause d’extension et de l’option de surallocation.

Carmat a fixé le prix de souscription à 1,66 euro, soit une décote de 24,5% par rapport à la moyenne des cours moyens pondérés par les volumes des cinq dernières séances de bourse précédant la fixation de ce prix. La période de souscription est ouverte depuis ce mercredi 18 septembre et court jusqu'au 26 septembre 2024 inclus.

Là où le bât blesse, c'est que cette opération est encore une fois réalisée avec la suppression du droit préférentiel de souscription. Mais les actionnaires pourront bénéficier en contrepartie, d'un délai de priorité de sept jours de bourse, à titre irréductible et réductible.

Cette opération a reçu des engagements de souscription et des engagements à titre de garantie à hauteur de 6,7 millions d'euros, représentant 65,2% du montant initial de l’opération. Dont ceux d'actionnaires historiques à savoir Lohas et Santé Holdings pour 4,5 millions d'euros.

A la Bourse de Paris l'action Carmat recule logiquement de 12,2% vers 10h10, à 1,79 euro après l'annonce de cette opération cruciale pour les finances de la medtech. Cette opération sera sans surprise dilutive pour les actionnaires existants, une dilution est évaluée à environ 15% par Degroof Petercam.

Reste que cet appel au marché ne va donner qu'une bouée d'oxygène assez modeste à la société. Les fonds levés devraient permettre à Carmat de tenir jusqu'à la fin de l'année. Or, le concepteur du cœur artificiel évalue ses besoins d'apports de fonds supplémentaires pour les douze prochains mois entre 36 millions d'euros et 38 millions d'euros, après réalisation de cette levée de fonds.

La société dit travailler à une extension progressive de son horizon de financement à 12 mois, en plusieurs étapes, et n'exclut pas une ou plusieurs augmentations de capital additionnelles à l'avenir.

Les analystes d'Oddo BHF avaient rappelé en juillet dernier que la thématique du financement ainsi que le momentum (rythme) commercial seront les deux principaux sujets à suivre sur le second semestre.

Des comptes décevants

Carmat annonce ce nouvel appel au marché crucial pour sa survie, un peu plus de 10 jours après avoir abaissé son objectif de chiffre d'affaires pour 2024.

L'entreprise ne table plus que sur des revenus de 8 millions à 12 millions d'euros pour 2024, contre une précédente cible de 14 millions d'euros. "Cette nouvelle orientation implique entre 15 et 35 implants commerciaux pour l'année, ce qui semble plus raisonnable étant donné qu'ils en ont déjà réalisé 7 au premier semestre", avait expliqué début septembre Degroof Petercam.

Dans sa note publiée ce mercredi, le bureau d'études rappelle tabler sur un pic annuel des ventes d'Aeson de 750 millions d'euros d'ici 2038, dont environ 30 % pour la transition vers la transplantation et environ 70% pour la thérapie de destination.

"Après avoir franchi les obstacles inhérents au développement des technologies médicales (c'est-à-dire les problèmes de qualité, les défis de la chaîne d'approvisionnement,...), Carmat est maintenant sur la bonne voie pour tenir ses promesses", avancent les experts de Degroof Petercam.

Mais avant qu'Aeson soit déployé massivement, Degroof Petercam rappelle que la société a encore besoin d'environ 150 millions d'euros pour atteindre son seuil de rentabilité d'ici à 2027.

"L'objectif est de combler le fossé jusqu'à ce que l'entreprise trouve un investisseur institutionnel qui pourrait l'aider à lever ce capital supplémentaire. Nous pensons que le succès commercial du cœur artificiel Aeson dans les années à venir sera crucial pour atteindre cet objectif. Les progrès réalisés jusqu'à présent en 2024 au niveau commercial sont encourageants", commentent Degroof Petercam. Ces derniers restent acheteurs du dossier jugeant que "les fondamentaux sont solides", et ce en dépit d'un "manque de visibilité en matière de financement".