(BFM Bourse) - L'entreprise de services numériques a annoncé le départ de son directeur général arrivé seulement en octobre, et a passé un avertissement sur sa génération de trésorerie. Par ailleurs, la vente de ses activités historiques à Daniel Krestinsky s'avère très incertaine.
Le bateau ivre Atos tangue de plus belle en 2024. Depuis le 1er janvier, soit en seulement dix séances, la valeur a déjà perdu près de 40%. Et après avoir abandonné 14,7% vendredi, l'action s'effondre encore de 10,5% ce lundi en vers 10h20.
L'entreprise de services numériques a livré un ensemble d'annonces qui soulignent à la fois l'instabilité régnante en son sein, ainsi que ses difficultés opérationnelles.
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Cinq directeurs généraux en moins de cinq ans
Arrivé en octobre au poste de directeur général en provenance d'Accenture, Yves Bernaert sera resté moins de quatre mois à la tête de l'entreprise. Atos a annoncé ce lundi son départ, Yves Bernaert évoquant lui-même dans le communiqué de l'entreprise une "différence de point de vue sur la gouvernance pour ajuster et exécuter la stratégie". Paul Saleh, jusqu'à présent directeur financier, lui succédera au poste de directeur général tandis que Jean-François Prest, jusqu'à présent directeur financier de Mobivia, rejoindra Atos pour devenir directeur financier.
Certes, Yves Bernaert avait été recruté par l'ancien président du conseil d'administration d'Atos, Bertrand Meunier, parti quelques jours après son arrivé. Depuis, le nouveau président, Jean-Pierre Mustier, ex-cadre de Société Générale, insuffle sa propre stratégie et vision au sein d'Atos, ce qui peut potentiellement expliquer les "différences" évoquées par Yves Bernaert.
Mais ce départ vient s'ajouter à une longue liste: depuis que Thierry Breton a lâché les rênes de l'entreprise à l'automne 2019, pas moins de cinq directeurs généraux se sont succédés: Elie Girard, Rodolphe Belmer, Nourdine Bihmane, Yves Bernaert et, donc, Paul Saleh.
Atos a, en même temps que l'annonce du départ d'Yves Bernaert, passé un avertissement sur résultats, et plus exactement sur son cash.
Le groupe a brûlé du cash au second semestre
La société confirme ses objectifs de croissance en données comparables (0% et 2%) et de marge opérationnelle (4% à 5%) pour 2023. En revanche, le groupe a annoncé que sa cible de trésorerie devrait être "légèrement inférieure" à l'objectif initial, à hauteur de 100 millions d'euros.
Atos comptait parvenir à l'équilibre au second semestre et ainsi limiter la consommation de trésorerie à environ 1 milliard d'euros sur l'ensemble de 2023, c'est-à-dire le décaissement du premier semestre. Le groupe devrait donc finalement brûler autour de 1,1 milliard d'euros de cash sur l'ensemble de l'exercice.
Ce qui fait évidemment mauvais genre à l'heure où le bilan du groupe, sa situation financière et le refinancement de sa dette suscitent des inquiétudes. Dimanche, Le Figaro a rapporté que Jean-Pierre Mustier préparait un recours auprès du tribunal de commerce de Nanterre pour renégocier son passif avec 22 banques créancières. Un prêt à terme de 1,5 milliard d'euros doit notamment être étendu de six mois deux fois, avec une première extension le 29 janvier prochain.
Ce lundi, Atos a réagi à cette information en déclarant," qu’il n’(avait) pas déposé de demande de désignation d’un mandataire ad hoc ou d’ouverture d’une procédure de conciliation". "Comme indiqué précédemment (le 3 janvier, NDLR) la société se réserve le droit d’utiliser les mécanismes juridiques disponibles", a ajouté le groupe.
Une visibilité "proche de zéro"
Tout ceci survient alors qu'Atos négocie la vente de son périmètre historique (appelé "Tech Foundations"), c'est-à-dire les activités d'infogérance, en décroissance structurelle, à Daniel Kretinsky.
Atos cherche à améliorer les conditions de cette cession annoncée l'été dernier pour un montant de seulement 100 millions d'euros de cash. Selon BFM Business, un compromis doit être trouvé en fin de semaine.
Vendredi, des informations de La Lettre et Les Echos rapportaient qu'Atos aurait demandé à Daniel Kretinsky de passer de 100 millions à 500 millions d'euros et que ces négociations étaient très mal embarquées. Ce qui avait alors précipité la chute de l'action Atos. Une source proche du dossier rapportait aux Echos que l'opération avait moins de 10% de chance d'aller à son terme.
"Si cette annonce n’est selon nous pas forcément négative (nous considérions aberrant le prix de cession de Tech Foundations), cette information vient ajouter de l’incertitude à un dossier qui n’en manquait pas", tacle Invest Securities. "La visibilité sur Atos est voisine de zéro, avec comme nous l’évoquions la semaine dernière, la possibilité de la restructuration financière d’Atos n’ait strictement rien à voir avec celle présentée à l’été dernier", ajoute le bureau d'études.
"Seule chose certaine, le temps presse, le groupe devant faire face à d’importantes échéances de dettes d’ici fin 2024/début 2025 (500 millions d'euros d’obligations en novembre 2024, 1,5 milliard d'euros de term loan en janvier 2025 et 750 millions d'euros d’obligations en mai 2025)", ajoute-t-il.
Croulant sous une dette qui dépassera les 3 milliards d'euros fin 2023, Atos doit assainir sa situation financière, avec une augmentation de capital qui devait atteindre un peu plus de 900 millions d'euros, dans les termes prévus cet été.
Mais les conditions de cet appel au marché, comme le montant, dépendront en réalité de nombreux autres paramètres, notamment l'issue des opérations de vente dans laquelle le groupe est impliqué. Outre la cession de Tech Foundations à Daniel Kretinsky, Atos discute actuellement avec Airbus d'une potentielle vente de BDS, segment qui regroupe la cybersécurité ainsi que les supercalculateurs et le big data, sur la base d'un prix indicatif de 1,5 milliard d'euros.
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