(BFM Bourse) - Réminiscence de l'affaire Kerviel en 2008, un employé de Mitsubishi UFJ à Singapour a pris des paris risqués en dissimulant ses prises de positions parmi des opérations de simple contrepartie. Le mastodonte financier nippon a découvert le pot aux roses et mis fin au manège cet été... Manquant au passage le rebond des cours ce mois-ci.
À plus de dix ans d'écart, et à l'autre bout du monde, l'affaire rappelle en tous points celle qui en janvier 2008 avait coûté à la Société Générale 4,9 milliards d'euros - et une partie de sa réputation. Mitsubishi UFJ a reconnu vendredi dans un communiqué avoir enregistré pour 320 millions de dollars de pertes à cause de paris pris en marge de sa hiérarchie par un opérateur sur le marché du pétrole. Ce "rogue trader" a réussi à dissimuler la réalité de ses prises de positions depuis le début de l'année, avant d'être découvert cet été.
L'affaire vient mettre en lumière la vulnérabilité persistante des grandes institutions financières aux agissements d'un seul individu à la fois assez téméraire pour prendre des risques inconsidérés et suffisamment habile pour masquer ses paris pendant une période prolongée. Avant Jérôme Kerviel, l'exemple le plus célèbre est celui du britannique Nick Leeson au début des années 1990, qui opérait d'ailleurs lui aussi à Singapour, à la tête du bureau local de la Barings. Leeson perdit 860 millions de livres sterling, un montant alors bien supérieur au capital de la banque, provoquant sa faillite.
L'assise de Mitsubishi UFJ, heureusement pour la banque japonaise, autrement plus importante. La perte ne devrait occasionner qu'un accroc dans les profits du groupe (plus de 5 milliards de dollars lors du dernier exercice). Mais si elle ne menace pas son existence, cette histoire est néanmoins fort embarrassante.
L'opérateur à l'origine de ce trou de 320 millions de dollars avait été engagé au sein d'une filiale singapourienne, baptisée Petro-Diamond Singapore, en charge du négoce de brut avec la Chine. Selon Mitsubishi, il a pris de façon répétée des paris directionnels (spéculant sur l'évolution des cours) tout en les camouflant comme des opérations de couverture sur des transactions avec des clients. Autrement dit, il faisait passer ses ordres comme s'ils répondaient à une transaction réalisée avec un client.
Ayant conçu des soupçons, ses responsables ont passé ses positions au peigne fin cet été en profitant des congés de l'opérateur incriminé, dont l'identité n'a pas été rendue publique.
Pour comble de malchance, les prises de positions en question ont dû être soldées en phase baissière (le cours du baril a perdu jusqu'à 15% courant août) alors que par la suite, le pétrole a rebondi de près de 20% notamment à la suite des attaques menées sur des installations de production saoudiennes, qui ont ponctuellement diminué de moitié la production du pays.
