(BFM Bourse) - Dans une crise sanitaire, il faut plus que jamais soigner, traiter les patients, équiper les praticiens et les hôpitaux. De là à y voir une opportunité pour les labos, les biotechs et les medtechs, il est tout de même un pas à ne pas franchir à la légère. Toutes ne voient pas forcément leur activité s'accélérer en réponse au coronavirus.
Alors que les questions de santé focalisent l’attention mondiale, la courbe de l'évolution du nombre de nouveaux cas faisant office de nouveau baromètre pour les investisseurs, les secteurs des biotechnologies et des dispositifs médicaux ne tirent pas pour autant leur épingle du jeu.
"Certaines communiquent sur le fait qu'elles sont positionnées dans la lutte contre le Covid 19... mais c'est parfois un peu spéculatif", observe Augustin Lecoq, gérant chez Mandarine Gestion en charge de la stratégie "Microcaps" (capitalisations inférieures à 500 millions d'euros), avec une poche biotech/pharma de l'ordre de 7 à 8% de ses fonds.
Les mieux placées sur la thématique du coronavirus voient certes leurs actions s'envoler. C’est le cas de BioNTech, une société allemande qui développe un potentiel vaccin, qui intéresserait Pfizer, de Moderna et de CureVac, énumère le gérant. Mais "pour d'autres qui avaient aussi communiqué sur le sujet, l'élan est retombé, à l'image d'Innovio Pharmaceuticals dont le cours est passé rapidement de 4 à 20 dollars, avant de retomber aux alentours de 7 dollars". "Comme pour tout développement pharmaceutique, il y aura très peu d'élus par rapport aux candidats de départ. Pour ma part, je ne prétends pas savoir qui va gagner la course, donc j'évite de me positionner avec peu de visibilité".
Des sociétés sous perfusion des marchés
Plus généralement, beaucoup d'entreprises de biotechnologies sont des sociétés "sous perfusion" des marchés dont dépendent leur financement, et subissent donc un contexte boursier adverses. "Les levées de fonds qu’elles ont l’habitude de mener risquent ainsi d’être réalisées à des prix très bas, synonymes de plus forte dilution pour les actionnaires actuels, ou dans les cas extrêmes de ne pas attirer les investisseurs, ce qui pourrait remettre en cause la pérennité de leur activité".
Pour celles qui ont besoin d'un refinancement dans les six mois à venir ce sera très compliqué, redoute le gérant. Celles qui bénéficient d'un horizon financier long sont donc à privilégier.
Des essais cliniques perturbés
Par ailleurs, la mobilisation de l'effort des hôpitaux sur le coronavirus commence à perturber fortement la tenue des essais cliniques dans d'autres indications, ce qui va compliquer encore plus la recherche de fonds.
De la même façon, certaines medtechs sont très fortement pénalisées par le fait que toutes les interventions dites "de confort" sont repoussées jusqu'à nouvel ordre alors que les équipes médicales se concentrent sur l'accueil des patients atteints par le Covid-19. "Si vous commercialisez des prothèses de hanche par exemple, il y a de quoi être préoccupé à court terme. Même les fabricants de dispositifs qui bénéficiaient de revenus relativement prévisibles se retrouvent pénalisés par l'épidémie", souligne Augustin Lecoq.
Solutions de bionettoyage et de désinfection
"Il est délicat de tirer des conclusions générale à l'échelle d'un secteur et anticiper un comportement boursier type alors que les conséquences de la crise du coronavirus seront très différentes d'une société à l'autre", ajoute-t-il.
Dans ce cadre, le gérant s'attache à rechercher des entreprises extrêmement spécialisées, à même de tirer les bénéfices d'une augmentation de leur activité. Augustin Lecoq cite par exemple le fabricant de solutions de bionettoyage et de désinfection en milieu hospitalier britannique Tristel, ou le japonais Taiko Pharma qui a récemment augmenté significativement ses prévisions de résultats compte tenu d'une demande record pour son produit de désinfection. "Sur des telles thématiques, on peut vraiment retrouver les bénéfices d'un positionnement de niche".
En Europe, le gérant mentionne notamment la société espagnole Ercros, établie à Barcelone. "Cette société centenaire cotée à Madrid produit des composés essentiels entrant dans la fabrication de la plupart des produits de désinfection. Ils vont maintenir leur production à pleine capacité. C'est vraiment l'une de ces petites sociétés du tissu économique européen qui par leur activité nous aident à faire face à la crise le mieux possible... Et cela montre aussi l'intérêt de conserver en Europe ces petits acteurs de niche, implantés localement, et qui dans ce type de situation apportent une solution précieuse".