(BFM Bourse) - David Lebovitz, stratégiste monde chez JP Morgan Asset Management s'est inquiété de la vitesse à laquelle les rendements obligataires remontent et redoute que cela ne crée un accident sur le marché.
C'est le grand signe de la nervosité actuelle du marché: la hausse fulgurante des rendements obligataires. En l'espace de quelques semaines, les taux ont en effet grimpé à des niveaux inédits depuis 2007 aux Etats-Unis.
Le rendement de l'obligation du bon du Trésor américain à 10 ans est ainsi passé de 3,96% fin juillet à désormais 4,700% . Ce rebond des rendements concerne aussi l'Europe: le taux à 10 ans de l'obligation allemande à 10 ans a flirté avec les 3% la semaine dernière alors qu'il se situait sous les 2,5% il y a encore un mois.
Ces hausses sont à lier avec les anticipations de politique monétaire de la Réserve fédérale américaine (Fed). Le marché avait jusqu'à récemment intégré une hausse de taux supplémentaire de la part de la banque centrale américaine. Mais l'idée d'un autre relèvement commence timidement à émerger dans l'esprit des investisseurs, d'autant que lundi l'indice ISM manufacturier publié lundi a montré combien l'économie américaine demeurait résiliente.
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Un "accident financier"
Et, dans leurs dernières interventions, les différents membres de la Fed ont clairement confirmé avec une certaine fermeté que les taux resteraient à un niveau élevé pendant une durée longue.
D'où ces records atteints sur les taux obligataires. Ce ne sont toutefois pas tant les niveaux que la vitesse à laquelle remontent ces rendements qui préoccupent David Lebovitz, stratégiste de marché mondial chez JP Morgan Asset Management.
"Si les taux continuent d'augmenter comme ils le font, il y aura un accident financier. Quelque chose se brisera et la Fed agira dans l'autre sens (vers une baisse des taux, NDLR)", a-t-il déclaré lundi soir sur Bloomberg TV.
"Mais il semble que le marché actions a l'idée que la Fed va assouplir (sa politique monétaire, NDLR) pour le plaisir d'assouplir en 2024", poursuit-il.
L'expert de marché se dit ainsi étonné que les actions "continuent d'ignorer" les signaux d'alarme envoyés pour le marché obligataire, ce qu'il qualifie de "troublant".
Jamie Dimon se prépare à des taux à 7%
Ce qui est d'autant plus surprenant qu'en période de fortes incertitudes, comme cela est le cas actuellement, un "flight to quality", c'est-à-dire une ruée vers les actifs sûrs comme les obligations et le dollar, est censée déclencher un flux acheteur sur les titres de dette. Et donc tirer les rendements vers le bas et non vers le haut.
Le grand patron de JPMorgan, l'emblématique Jamie Dimon, un des rares grands banquiers encore à son poste à avoir connu la crise de 2007-2008, avait lui dès la semaine dernière prévenu qu'il n'excluait pas de voir les taux dépasser les 7%.
"Je demande aux chefs d'entreprise s'ils sont prêts à faire face à un taux de 7%. Dans le pire des cas, il s'agit de 7 % et d'une stagflation. Si les volumes sont plus faibles et les taux plus élevés, le système sera soumis à des tensions", avait-il affirmé au Times of India.. "Nous conseillons vivement à nos clients de se préparer à ce type de stress", concluait-il.