(BFM Bourse) - Le principal indice de la Bourse de Francfort progresse assez nettement ce jeudi après que la coalition au pouvoir en Allemagne a éclaté à la suite du limogeage du ministre allemand de l'économie.
La dissolution de l'Assemblée nationale en France, en juin dernier, avait provoqué d'importants remous à la Bourse de Paris. Le CAC 40, qui évoluait au-dessus des 8.000 points avant cet évènement politique majeur, n'a plus jamais approché de près ou de loin ce seuil.
L'incertitude politique gagne désormais l'Allemagne. Outre-Rhin, le chancelier, Olaf Scholz, a révoqué mercredi le ministre des Finances, Christian Lindner, qui a été remplacé ce jeudi par Jörg Kukies, proche conseiller de Scholz.
Cette annonce a acté la fin de la coalition allemande "feu tricolore" qui regroupait les sociaux-démocrates (SPD) de Scholz, les écologistes et les libéraux (FDP) de Lindner. L'exécutif au pouvoir n'a ainsi plus de majorité au Parlement, réputé très puissant outre-Rhin.
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Le Dax ne panique pas
Des tensions avaient émergé entre le FDP et le SDP autour de la constitution du Budget 2025 et la direction de la politique économique (en clair: faut-il relancer la croissance quitte à ne pas tenir l'équilibre budgétaire). Ce dans un contexte économique dégradé, puisque l'Allemagne peine à renouer avec la croissance, laissant désormais ses voisins tirer l'activité de la zone euro.
À la suite de cette décision, Olaf Scholz a appelé à un vote de confiance à la mi-janvier 2025. "S'il perdait ce vote, comme cela semble probable, il demanderait au président fédéral Steinmeier de dissoudre le parlement dans un délai de 21 jours. Dans le cas où le président dissoudrait le parlement, de nouvelles élections devraient être convoquées dans un délai de 60 jours", explique UBS. Ce qui reviendrait donc à tenir des élections anticipées en mars.
Pourtant ce regain d'instabilité politique ne pèse absolument pas sur la Bourse de Francfort. Le Dax 40, son principal indice, gagne 1,3% ce jeudi en fin de matinée à 19.281 points.
Le baromètre phare de la place allemande peut bénéficier d'un rebond technique après avoir chuté de 1,1% mercredi à la suite de l'élection de Donald Trump. Le président américain élu a promis d'alourdir les droits de douane sur les importations, ce qui a provoqué des inquiétudes pour les secteurs exportateurs, comme les groupes automobiles allemands.
Par ailleurs, comme nous l'avons expliqué dans un précédent article, le Dax 40 est en réalité très peu exposé à son économie domestique, et par ricochet à l'instabilité politique allemande.
Selon les données de Goldman Sachs, seulement 18% des revenus des sociétés de l'indice sont générés en Allemagne. À titre de comparaison, le CAC 40, pourtant composé de sociétés très internationalisées, affiche un taux plus élevé, de 22,7% (de revenus générés en France), selon une étude du cabinet EY.
Vers un assouplissement du "frein à l'endettement"
Par ailleurs le risque politique mérite d'être relativisé. UBS note qu'au regard des sondages actuels, des coalitions traditionnelles (comme une grande coalition sociaux-démocrates-conservateurs) ont toutes les chances d'émerger. Alors que le parti d'extrême-droite AfD n'a que très peu de chance d'accéder au pouvoir.
De plus, ce bouleversement politique pourrait par ailleurs permettre à l'Allemagne d'obtenir plus de flexibilité sur la "règle d'or" ou "frein à l'endettement" qui limite fortement le déficit budgétaire, sauf en cas de détérioration importante de la conjoncture.
"Il y a une ouverture sur une politique budgétaire. Une fois qu'il y aura une nouvelle coalition gouvernementale, peut-être il y aura-t-il une réflexion sur une révision constitutionnelle qui permettrait de sortir de ce frein à l'endettement qui se révèle complètement toxique", a expliqué sur BFM Business ce jeudi Gilles Moëc, chef économiste du groupe Axa.
"La coalition allemande (actuelle, NDLR) ne fonctionne plus depuis plusieurs mois, ne parvient pas à trouver une réponse budgétaire et macroéconomique aux défis actuels de l'Allemagne pour des questions de divisions internes", a-t-il ajouté.
"On se dirige vers la sortie de cette situation de blocage avec peut-être une élection en mars. Donc on va plutôt vers une clarification, au rythme des institutions allemandes", a conclu l'économiste.